L’Algérie a décidé de lever la suspension de ses échanges commerciaux avec l’Espagne, mise en place depuis juin 2022 suite à des tensions diplomatiques entre les deux pays. La Banque d’Algérie a émis, le 6 novembre 2024, une directive aux banques et établissements financiers, leur demandant de reprendre les opérations de commerce avec l’Espagne. Cette normalisation tant attendue est une étape importante pour le rétablissement des liens économiques et diplomatiques entre les deux nations.
« Il est à rappeler qu’en vertu de la réglementation des changes en vigueur, les banques intermédiaires agréées doivent veiller à la régularité des opérations de commerce extérieur et de change qu’elles traitent. A ce titre, les banques intermédiaires agréées voudront bien noter que les opérations de domiciliation bancaire des opérations de commerce extérieur de et vers l’Espagne, doivent être traitées conformément à la réglementation des changes en vigueur », a toutefois précisé la Direction Générale des Changes de la Banque d’Algérie.
Mise en pause des échanges commerciaux
La suspension des échanges avait été initiée par Alger en réponse à la position prise par Madrid concernant le Sahara Occidental, territoire disputé entre le Maroc et le Front Polisario. En mars 2022, l’Espagne avait, en effet, soutenu le plan d’autonomie proposé par le Maroc pour le Sahara Occidental, une décision qui avait suscité l’ire des autorités algériennes, fermes soutiens de la cause sahraouie. Ce désaccord avait alors entraîné la mise en pause des échanges commerciaux, à l’exception des hydrocarbure.
L’arrêt des transactions a eu un impact économique notable, puisqu’il a particulièrement affecté les entreprises espagnoles qui dépendaient de leurs relations commerciales avec l’Algérie. Avant cette rupture, l’Espagne était un partenaire économique de premier plan pour l’Algérie, en particulier dans les secteurs de l’énergie, des infrastructures et de l’agriculture. La suspension a, par ailleurs, mis à mal plusieurs contrats commerciaux et perturbé les échanges de gaz naturel et d’autres produits essentiels.
Rôle de l’Union Européenne dans la réconciliation
Le secteur énergétique a particulièrement ressenti les effets de cette décision. L’Algérie, qui fournit une part importante du gaz naturel consommé en Espagne, avait réduit ses exportations. Décision qui a obligé Madrid à trouver des alternatives pour compenser cette baisse. La reprise des relations commerciales pourrait donc être une aubaine pour l’Espagne, qui cherche à diversifier ses approvisionnements énergétiques dans un contexte de fluctuations sur les marchés mondiaux.
Cette reprise intervient dans un contexte de détente diplomatique. Selon certaines sources, des discussions intensives ont été menées, ces derniers mois, entre les représentants des deux pays pour apaiser les tensions. Ce qui témoigne de l’importance stratégique des relations hispano-algériennes pour la région méditerranéenne et l’Europe.
Des intermédiaires de l’Union Européenne auraient également joué un rôle dans cette réconciliation. Il faut aussi rappeler que l’UE a récemment pris une décision forte rappelant le droit international avec l’annulation par la CJUE de deux accords commerciaux conclus avec le Maroc qui incluaient illégalement les territoires sahraouis occupés.
L’Espagne, un partenaire attractif pour l’Algérie
Le rétablissement des relations commerciales est également perçu comme une opportunité pour les entreprises algériennes qui se sont tournées vers d’autres marchés durant la suspension, mais pour lesquelles l’Espagne reste un partenaire attractif. Des secteurs comme l’agriculture et la transformation industrielle, affectés par la hausse des coûts des importations en provenance d’autres pays, espèrent désormais renforcer leurs collaborations avec leurs partenaires espagnols.
Les analystes estiment que cette reprise pourrait redynamiser l’économie algérienne, qui cherche à diversifier ses sources de revenus au-delà de l’exportation de gaz. La normalisation avec l’Espagne pourrait ainsi faciliter la mise en place de nouveaux accords commerciaux, dans des domaines tels que l’agro-industrie, la construction et les services bancaires, pour lesquels des partenariats avec l’Espagne avaient déjà été envisagés.
Vers une évolution de la position de l’Espagne sur le Sahara ?
Cette décision pourrait également être bénéfique pour les échanges académiques et culturels entre les deux pays, souvent impactés par les relations politiques. Avec une population hispanophone croissante en Algérie et un intérêt pour la coopération culturelle, ce réchauffement diplomatique pourrait favoriser des échanges plus fluides dans ces domaines. Toute chose qui renforce le lien entre les deux rives de la Méditerranée.
Les observateurs attendent toutefois de voir si cette reprise des échanges commerciaux s’accompagnera d’une évolution de la position de l’Espagne sur le Sahara Occidental, un dossier sensible pour l’Algérie. Bien que le retour aux relations commerciales semble être une avancée significative, la situation pourrait rester fragile si des désaccords persistent sur cette question cruciale.