Les maux dont souffrent l’Afrique sub-saharienne sont divers et elle ne semble pas près d’en guérir. Trente-six pays africains sur 57 à travers le monde connaissent une « pénurie aiguë » de personnel médical, selon le rapport « Travailler ensemble pour la santé », publié ce vendredi, par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Cette pénurie est aggravée par l’eldorado que représentent les pays riches pour les agents de santé africains.
Trente-six pays Afrique subsaharienne, excepté quelques uns d’Afrique australe, connaissent une « pénurie aiguë » de personnel médical. C’est ce que révèle l’étude « Travailler ensemble pour la santé » publiée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), à l’occasion de la célébration, ce vendredi 7 janvier, de la Journée mondiale de la santé. Les cinquante-sept pays, dont certains en Asie du Sud-Est, concernés par le rapport auraient besoin de 2,4 millions de médecins, d’infirmiers et de sages-femmes.
Des ressources humaines nécessaires pour assurer des services médicaux vitaux comme la vaccination des enfants, les soins prénatals et obstétricaux ou encore le traitement du sida, du paludisme et de la tuberculose. A cela s’ajoute le personnel d’appui qui fait monter le déficit en personnel médical à 4,3 millions de personnes. « On ne forme et on ne recrute pas assez d’agents de santé là où ils sont le plus nécessaires, a indiqué le Dr Timothy Evans, sous-directeur général de l’OMS pour expliquer cette situation, et les professionnels qualifiés sont de plus en plus nombreux à émigrer dans des pays plus nantis pour un emploi mieux rémunéré, soit dans un pays voisin, soit dans un pays industrialisé riche ».
Echapper à la pauvreté
Alors que l’Afrique est confrontée à de nombreux défis sanitaires, elle est incapable d’y répondre par manque de ressources humaines adéquates. Elle compte à l’heure actuelle 2,3 agents de santé pour 1 000 habitants, un chiffre très en deçà de la moyenne mondiale qui se situe à 9,3 pour 1 000. De même, les Etats-Unis qui rassemblent 37% des agents de santé disponibles sur la planète ne doivent faire face qu’à une charge de morbidité de 10 % alors que l’Afrique noire, dont cette charge est estimée à 25%, ne dispose que de 3% du personnel médical mondial.
Ce manque est aggravé par un exode important de médecins et d’infirmiers formés en Afrique sub-saharienne, respectivement en moyenne de 23% et de 4%, vers les pays développés. La recherche d’une meilleure rémunération – les salaires sont 15 fois supérieurs en Occident selon l’étude de l’OMS – et le souci d’évoluer dans des conditions de travail plus optimales sont les principales raisons qui motivent les agents de santé à opter pour l’expatriation. Ils échappent ainsi au manque de moyens techniques, à l’accès difficile aux médicaments, à la surexposition à des maladies dangereuses et à la violence. En somme, à la misère de leurs pays qu’ils aggravent malgré eux.
L’Afrique aura encore besoin de l’aide extérieure
Cependant, le rapport 2006 de l’OMS ne fait pas état « que des problèmes », note le Dr Carmen Dolea du département Ressources humaines pour la Santé de l’OMS, qui a participé à la réalisation de cette étude. « Il propose également des solutions à mettre en œuvre dans les dix prochaines années ». La clé de voûte de ce dispositif est la mise en place d’un partenariat entre les acteurs de santé et leurs différents partenaires, et ce à tous les niveaux de la carrière de l’agent de santé, à savoir de sa formation initiale à sa retraite. Le rapport propose aussi « que 50 % de tous les nouveaux fonds que les donateurs alloueront à la santé soient consacrés au renforcement des systèmes de santé, et 50 % de cette part à la formation, à la fidélisation et à l’entretien du personnel sanitaire ».
Cette mesure pourrait pallier la pauvreté des Etats africains qui offrent néanmoins, dans la majorité, des services de santé par le biais de structures publiques. « Pour combler le déficit actuel en personnel médical que connaissent les 57 pays de l’étude, indique le Dr Dolea, il faudra accroître les dépenses de santé de dix dollars par habitant et par an dans les vingt prochaines années, selon les estimations des économistes de l’OMS ». Une charge financière supplémentaire, que l’organisation internationale pense supportable, bien que les Etats soient déjà fortement endettés.