Depuis samedi, au Burundi, la première force de paix mise en place par l’Union africaine est au complet. 2 870 soldats sud-africains, éthiopiens et mozambicains doivent soutenir les opérations de désarmement et superviser la transition démocratique. Alors que le cessez-le-feu entre forces armées gouvernementales et groupes rebelles n’est toujours pas total.
2 870 hommes. La Mission de l’Union africaine au Burundi est au complet. Le dernier contingent de 90 soldats mozambicains (ils sont 290 au total) est venu renforcer samedi les 1 600 Sud-africains présents depuis novembre 2001 et les 980 soldats éthiopiens qui ont été déployés entre le 27 septembre et le 4 octobre dernier. La première force de paix mise sur pied par l’Union africaine (UA) est chargée de veiller à la mise en application des accords de cessez-le-feu signés en 2002 entre Bujumbura et trois des quatre mouvements rebelles hutus. Elle doit soutenir les opérations de désarmement, de démobilisation et de réintégration dans la société des groupes rebelles. Elle aura à superviser la transition démocratique et à faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire.
« Je peux vous dire qu’à partir de maintenant, nous sommes disposés et prêts à déployer les contingents à l’intérieur du pays pour le travail qu’ils sont venus faire ici », a déclaré samedi Mamadou Bah, le représentant de l’UA au Burundi. « La prochaine tâche est d’organiser les sites de cantonnements qu’on appelle sites de désarmement », a-t-il précisé. Ces sites de désarmement sont censés accueillir les rebelles des différents mouvements et recueillir leurs armes.
Cesser les hostilités
Après dix ans d’une guerre civile meurtrière (au moins 300 000 morts, en majorité des civils), les Burundais veulent croire à la paix. Leur première raison d’espérer : le Président Domitien Ndayizeye (Hutu, en poste depuis avril) et le leader de la principale faction rebelle hutue (Forces pour la défense de la démocratie, FDD), Pierre Nkurunziza, ont lancé un appel conjoint à la cessation immédiate des hostilités. Ils ont signé, mercredi dernier, un accord de paix prévoyant un partage du pouvoir militaire (dominé pour le moment par la minorité tutsie) et du pouvoir politique. Cet accord vise à appliquer le cessez-le-feu décidé en décembre dernier et doit également permettre d’organiser des élections en 2004.
Seule ombre, et de taille, au tableau : la majorité des Forces nationales de libération (FNL), conduite par Agathon Rwasa, a refusé de participer aux négociations de paix et a décidé de poursuivre la guerre. Depuis le 6 septembre dernier, des affrontements ont d’ailleurs régulièrement lieu dans l’ouest du pays entre les FDD et les FNL. Jeudi dernier, une dépêche AFP faisait état de deux morts et d’une dizaine de blessés dans un quartier du nord de la capitale, Bujumbura, au cours de l’un de ces affrontements. De plus, l’armée a accusé le 14 octobre dernier les FDD de ne pas respecter totalement l’appel à la cessation des hostilités, alors que les FDD nient avoir violé le cessez-le-feu.
Manque d’argent
Face à cette situation, les Burundais fondent leurs espoirs sur la mise en place de la Mission de l’Union africaine, malgré le fait qu’elle connaisse différents problèmes logistiques et financiers. Son déploiement à l’intérieur du pays s’avère d’ores et déjà compliqué à cause du manque d’argent même si « des gens sont en train de travailler à la mobilisation de fonds », a affirmé Mamadou Bah. Ce sont les Etats-Unis qui ont financé le déploiement du contingent éthiopien alors que le ministre de la Défense du Mozambique annonçait le 15 octobre le déblocage de 14 millions de dollars pour soutenir les soldats mozambicains pendant 12 mois. Le reste du financement, affecté aux troupes mozambicaines, est assuré par la Grande-Bretagne, la France et les Etats-Unis.
Chris Mullin, du gouvernement britannique, s’est d’ailleurs déclaré « heureux d’avoir fourni une assistance au gouvernement mozambicain pour que celui-ci envoie ses troupes ». « Cette Force de paix est un grand pas pour le Mozambique et le Burundi. C’est aussi la première opération de la paix sur le continent organisée par l’Union africaine. C’est un exemple concret de l’engagement des chefs d’Etat africains pour établir la paix et la sécurité sur leur continent. » C’est un test pour l’UA. Et encore plus pour le Burundi.