Les films africains sont toujours rares sur la Croisette. La tendance se confirme encore pour cette 65e édition du Festival de Cannes qui s’est ouvert ce mercredi. Seul le film du réalisateur égyptien Yousry Nasrallah Baad el Mawkeaa (Après la bataille) représentera le continent dans la course à la Palme d’or. Pour retrouver de nouveau la trace du cinéma africain dans la sélection officielle, il faudra se tourner vers la section « Un certain regard » où Les Chevaux de Dieu du Marocain Nabil Ayouch et La Pirogue du Sénégalais Moussa Touré ont été sélectionnés. Point commun de ces œuvres africaines : leur gravité.
En 2012, le porte-drapeau du continent africain au Festival de Cannes est l’Egypte. Le film du réalisateur égyptien Yousry Nasrallah Baad el Mawkeaa (Après la bataille) est en compétition pour la 65e édition du Festval de Cannes qui a démarré ce mercredi. Après avoir rendu hommage aux printemps arabes en faisant de l’Egypte son pays invité l’année dernière, le festival rallume les projecteurs sur une nation qui souhaite jouir (enfin) de la liberté acquise de haute lutte place Tahrir. C’est d’ailleurs l’une des thématiques de Baad el Mawkeaa. Yousry Nasrallah filme la rencontre de Mahmoud et de Reem qui n’ont pas le même « vécu révolutionnaire » et surtout qui n’appartiennent pas aux mêmes milieux sociaux. Le premier a fait partie de ces « cavaliers de la place Tahrir », des hommes instrumentalisés par le régime d’Hosni Moubarak pour faire la chasse aux manifestants place Tahrir le 2 février 2011 lors de ce qu’on appelle désormais la « Bataille des chameaux ». La seconde est une femme aisée, professionnellement accomplie, une féministe et une militante qui a activement milité pour la chute du rais.
Après avoir témoigné de la révolution dans l’œuvre collective 18 jours, projetée l’année dernière au Festival de Cannes, Yousry Nasrallah est de retour sur la Croisette. Cette fois-ci pour présenter l’Egypte « d’après » à un jury présidé par le réalisateur italien Nanni Moretti, et composé, entre autres, du cinéaste haïtien Raoul Peck.
Echo du réel
La sélection officielle cannoise, c’est aussi « Un certain regard » qui s’arrêtera sur Les Chevaux de Dieu du Marocain Nabil Ayouch et La Pirogue du Sénégalais Moussa Touré. Adapté du livre Les Etoiles de Sidi Moumen, Les Chevaux de Dieu revient sur le parcours des kamikazes qui ont commis les attentats de Casablanca en 2003. La production du dernier film de Nabil Ayouch était déjà présente à Cannes en 2010. Elle cherchait alors les financements nécessaires pour donner vie à la fiction. Moussa Touré s’intéresse également à une tragédie, celle de ces compatriotes qui tentent de gagner l’Europe en embarquant dans des pirogues de fortune. Capitaine d’une pirogue de pêche, Baye Laye est obligé de conduire 30 hommes en Espagne. L’aventure de La Pirogue s’annonce périlleuse. Tim Roth préside le jury de la section « Un certain regard » dont est membre la comédienne française Leila Bekthi, héroïne de la coproduction marocaine La Source des femmes de Radu Mihaileanu qui était en compétition en 2011.
En dehors de la sélection officielle, le film de l’Algérien Merzak Allouache sera présenté à « La Quinzaine des réalisateurs ». Le Repenti s’attache aux tribulations d’un ancien djihadiste algérien, amnistié par loi dans son pays, mais marqué au fer rouge par ses crimes.
A Cannes, entre les conséquences des révolutions, une jeunesse en souffrance et la menace islamiste, les nouvelles inquiétudes du continent seront visibles sur grand écran.