La musique, la danse et la littérature africaines sont à l’honneur du 24 au 27 juillet, à Cajarc, dans le Sud de la France. Manu Dibango, Tiken Jah Fakoly, la compagnie Punta Negra, Emmanuel Dongala, Wilfried N’Sondé et bien d’autres participent à la dixième édition du festival Africajarc.
En ce premier dimanche de la deuxième quinzaine de juillet, c’est par une nuit de pleine lune et sous un ciel étoilé que nous arrivons à Cajarc, petite ville de mille deux cents habitants, située dans le département du Lot, dans le Sud de la France. Malgré plus de huit cents kilomètres de route, nous sommes enchantés par les paysages magnifiques de cette région. Il faut dire qu’autour de la ville s’étale un enchevêtrement de falaises du haut desquelles l’on a une vue panoramique exceptionnelle de la vallée. Avec sa vieille rue centrale et ses maisons anciennes, Cajarc est située sur la rive droite du Lot, une petite rivière qui est à nouveau navigable en amont et en aval, et sur laquelle se trouve le barrage d’une usine hydroélectrique, qui a permis à la ville de disposer d’un plan d’eau sur lequel sont pratiqués tous les sports nautiques.
Comme chaque année depuis dix ans, cette petite cité dont la création date de l’époque gallo-romaine, accueille le festival Africajarc. Pour ses initiateurs, ce festival est né « d’une rencontre fortuite entre des artistes burkinabés et des Cajarcois ». En effet, en 1997, le président d’une association de parents d’élèves, Jean-Pierre Lelubre, est séduit par une troupe de musiciens et danseurs du groupe burkinabé Kongo Ba, de passage dans la région dans le cadre d’un échange scolaire. Il leur propose alors de revenir l’année suivante. Pendant toute une année scolaire, deux artistes ont ainsi initié des élèves de Cajarc et des environs aux rythmes et aux danses d’Afrique de l’Ouest. En fin d’année scolaire, ce travail a débouché sur un spectacle, trois représentations, 180 enfants sur scène et près d’un millier de spectateurs. Un an plus tard, en juillet 1999, naissait le festival Africajarc.
« Une aventure humaine »
Depuis lors, tous les ans, pendant le dernier week-end du mois de juillet, Cajarc fête l’Afrique et jette un pont entre les cultures. Pour Régine Lacan, institutrice à la retraite reconvertie dans le management d’artistes et actuelle présidente bénévole de l’association Africajarc, ce festival « c’est avant tout une passion, une aventure humaine et beaucoup de travail ». Effectivement, si le festival ne dure que quatre jours, du 24 au 27 juillet cette année, chaque édition se prépare dès la fin du précédent festival. Et aujourd’hui, Africajarc c’est chaque année près de 300 bénévoles, 200 artistes et techniciens, 300 000 euros de budget, 20 000 festivaliers… D’ailleurs, Régine Lacan ne loupe pas une occasion de saluer le travail des bénévoles sans lesquels le festival n’existerait plus. C’est le cas par exemple de Philippe Lafferayrie, un des nombreux vice-présidents de l’association et surtout homme à tout faire ; ou encore de « Grazia », de son vrai nom Cajarc de Lagarrigue – une des plus vieilles familles de la ville -, grande figure parmi les bénévoles et surtout l’une des responsables de la cuisine. Chaque année ce sont près de 8 000 repas qui sont servis pendant le festival. Autofinancé à près de 70%, Africajarc ne dispose actuellement que d’un demi-poste de salarié. « Avec cette dixième édition, le festival se trouve à un tournant. Soit nous nous professionnalisons, soit alors il nous faudra revenir à quelque chose de moins ambitieux que ce que nous faisons actuellement », souligne Régine Lacan.
Et pour ce dixième rendez-vous, l’ambition est intacte et la programmation est des plus variées : concerts, rencontres littéraires, expositions, projections de cinéma, stages de danse et de percussions… Côté concert, Manu Dibango et Tiken Jah Fakoly, les deux parrains de cette édition, sont sans conteste les deux têtes d’affiche. Le premier est venu à Cajarc pour la première fois en 2000. Mais son concert fut annulé à cause d’un orage, ce qui l’obligea à revenir l’année suivante. Il sera en concert le vendredi 25 juillet avec son Big Band « Le Maraboutik ». Il sera précédé par les Congolais de La compagnie Punta Negra, un groupe de comédiens, danseurs, percussionnistes créé à Pointe-Noire en 1992. La soirée se terminera ensuite avec Papa Noël, dont le dernier album Café noir, enregistré à La Havane en 2007, compte de nombreux invités de prestige, dont Manu Dibango.
«Ne plus avoir peur de la différence»
Quant à Tiken Jah Fakoly, il se produira le samedi 26 juillet, juste après Jean Racine, la nouvelle voix de la chanson francophone, qui nous vient du Sénégal. C’est en 2002 que Tiken Jah est invité pour la première fois à Africajarc. Depuis, il est resté fidèle à ce festival. D’ailleurs, avant d’aller sur scène, il sera l’invité principal d’un débat autour des questions liées à l’immigration. Plusieurs autres débats et conférences auront également lieu tout au long des quatre jours que durera le festival. En effet, côté littérature, des auteurs de grand talent ont été invités : Emmanuel Dongala, Kangni Alem, Sami Tchak, Wilfried N’Sondé, Jean-Luc Raharimanana, Gaston Kelman, Michèle Rakotoson… Pour Agnès Decorsaint, vice-présidente de l’association en charge de la littérature, « il s’agit de faire découvrir la littérature africaine aux festivaliers et, surtout, à amener les gens à aller à la rencontre de l’autre, et à ne plus avoir peur de la différence ». Toujours dans le registre littéraire, la BD n’est pas en reste. Plusieurs dessinateurs de l’association « L’Afrique Dessinée » seront présents : Adjim Danngar, Simon-Pierre Mbumbo, Christophe N’Galle Edimo et Didier Randriamanantena.
Mais Africajarc c’est aussi les arts plastiques, les danses contemporaine et traditionnelle, le théâtre, les animations de rue, les contes. D’ailleurs, pour sa première grande soirée cette année, le jeudi 24 juillet, le festival met à l’honneur « A love supreme », un spectacle monté par Le Tarmac de la Villette, en hommage à John Coltrane. Ce spectacle qui comprend un acteur et un trio de musiciens, est monté sur un texte du Congolais Emmanuel Dongala, « Jazz et vin de palme ». Une pure merveille. Et pour finir en beauté, le festival rendra hommage aux femmes d’Afrique, avec une soirée entièrement consacrée aux grandes voix du continent le dimanche 27 juillet. La soirée s’ouvrira avec la capverdienne Gabriela Mendes ; puis suivra la jeune chanteuse, danseuse et percussionniste ivoirienne Dobet Gnahore.
Symboliquement, le festival sera clôturé par Adan et Kayi, deux des membres du groupe traditionnel « Kongo Ba », qui ouvrit la première édition en 1999. Une manière pour les organisateurs du festival de boucler la boucle, tout en souhaitant que le festival « vive » le plus longtemps possible.
Pour plus d’informations :
Consulter le site d’Africarjarc
Téléphone : 05 65 40 72 89 / 05 65 40 29 86