Le Festival du court-métrage de Clermont-Ferrand (France) n’oublie pas l’Afrique. Cette année, deux programmes aux choix judicieux permettent aux festivaliers de goûter aux dernières réalisations du continent.
25 ans d’existence et toujours autant de dynamisme. Le Festival du court-métrage de Clermont-Ferrand (France) propose cette année, en dehors des compétitions nationales et internationales (jugées comme excellentes par la majorité des festivaliers), des sélections thématiques (l’Algérie, l’Allemagne, Venise) et deux programmes africains. Pour une fois, le continent noir n’est pas oublié !
La première sélection rassemble deux fictions (Petite lumière d’Alain Gomis et Histoire de tresses de Jacqueline Kalimunda) et deux documentaires (L’eau, la forêt, la terre de David-Pierre Fila et Le mariage d’Alex de Jean-Marie Teno). Quant à la deuxième, elle donne l’occasion de voir un panorama très large de la réalisation africaine en matière de courts-métrages, de l’Afrique de l’Ouest à l’Afrique australe. Là encore, documentaires et fictions se côtoient.
Papa Augustt
Coup de coeur pour Djaatala, preneur d’ombre, documentaire de Dorris Haron Kasco sur le travail d’Augustt, né en 1924 et qui a introduit la photographie en 1949 dans la ville de Khorogo en Côte d’Ivoire. » Papa Augustt » raconte la » box-camera « , fabriquée à l’époque par les menuisiers et munie d’une manivelle en fer pour la mise au point, précisant qu’il a vite préféré utiliser un appareil Roleflex, tout de même moins rudimentaire. Il commente ses photographies, comme ce jeune homme fringant venu se faire tirer le portrait » en cow-boy » ou ces trois femmes nigérianes portant le deuil de leur soeur. » Selon leur tradition, elles portent un pagne noir, torse nu, avec une main sur la joue. Elles voulaient envoyer cette photo à leur famille au Nigeria pour lui faire savoir que la triste nouvelle leur était parvenue « , se souvient Augustt.
Même s’il ne se départit pas de son sourire, le monsieur photo qui a immortalisé tous les habitants de la région avoue que son petit commerce ne marche plus aussi bien qu’avant : la concurrence des laboratoire, depuis les années 80, a ruiné son travail d’artisan minutieux. Grâce à ce documentaire, véritable tranche d’histoire de la photographie ivoirienne, l’art d’Augustt est reconnu à sa juste valeur. Ce film est un hommage posthume : le vieil homme a définitivement mis un voile sur sa vie avant sa sortie.
Filmer le sida
Le Mozambicain Orlando Mesquita a choisi de parler du sida dans une fiction-documentaire, loin de tout voyeurisme et de tout misérabilisme. Dans Eclipse, il suit la vie brisée de quatre orphelines (16, 15, 13 et 10 ans) dont la mère est morte il y a cinq ans du sida, entraînant le suicide de son mari, et dont la soeur aînée vient elle aussi de mourir… à 17 ans. Il est également question du sida dans le très poétique Le ciel dans les yeux de Ouida Smith et Madoda Ncayiyana (Afrique du Sud).
Plus léger, Tatyou de Jonathan Israel, joue la carte de l’humour. Comment expliquer à une classe de petits Burkinabés qui ne connaissent ni l’eau courante ni l’électricité à quoi ressemble un ordinateur ? Dur, dur, pour le nouveau maître d’école récemment muté… Ces programmes variés, qui ont amené pendant une semaine l’Afrique au coeur de l’Auvergne, démontrent, si besoin était, que le cinéma africain sait ne pas être pris de court.
Festival du court-métrage de Clermont-Ferrand, du 31 janvier au 8 février.
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