L’affaire Bennis-Alj-Slaoui miroir des luttes féminines au Maroc


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Emblèmes de la justice
Emblèmes de la justice

Dans une affaire qui secoue le Maroc depuis le 21 novembre 202′, Felix Sixtine, avocate française de 27 ans, accuse de viol collectif trois fils de familles influentes. Son combat judiciaire met en lumière les défis persistants de l’égalité femmes-hommes dans un royaume tiraillé entre réformes progressistes et pesanteurs sociales.

La détermination de Felix Sixtine résonne dans les rues de Casablanca depuis novembre dernier. Cette avocate française de 27 ans bouleverse les codes d’une société où le silence des femmes fut longtemps la norme. Son accusation de viol collectif contre trois héritiers de l’élite marocaine – Kamil Bennis, M’hamed Alj et Saâd Slaoui – secoue un pays en pleine mutation.

Dans les cafés de la ville blanche, l’affaire divise et révèle les tensions d’une société partagée entre conservatisme et aspirations au changement.

Le Maroc des paradoxes

Pour comprendre l’onde de choc provoquée par cette affaire, il faut remonter aux racines d’une société en tension entre tradition et modernité. En 2004, la réforme de la Moudawana (le code de la famille) marquait une avancée historique pour les droits des femmes marocaines. Exit la tutelle matrimoniale obligatoire, entrée du principe de coresponsabilité des époux. Pourtant, vingt ans plus tard, les mentalités évoluent plus lentement que les textes et le Code de la famille est de nouveau en phase d’évolution.

Les sociologues observent cette évolution paradoxale : si les femmes occupent aujourd’hui des postes à haute responsabilité impensables il y a quelques décennies, les violences sexuelles restent un sujet tabou dans la société marocaine.

Une bataille judiciaire sous haute tension

Les faits présumés remontent au 2 novembre. Une soirée privée dans un quartier huppé de Casablanca. Felix Sixtine affirme avoir été droguée, séquestrée et violée. Face à elle, la défense des trois accusés déploie l’arsenal classique : remise en cause du consentement, allusions à l’alcool consommé, à l’attitude provoquante de la victime et supposée volonté de nuire.

Le retrait de la plainte du fiancé de la victime, cadre influent de la CGEM, ajoute une couche de complexité à l’affaire. Sella on plusieurs observateurs du dossier, les pressions exercées révèlent l’influence persistante des rapports de force sociaux et économiques dans le système judiciaire marocain.

Un test pour la justice marocaine

Cette affaire dépasse le cadre d’un simple fait divers pour devenir le symbole d’une lutte plus large pour l’égalité devant la justice. Dans un pays où 54,4% des femmes déclarent avoir subi une forme de violence, selon les chiffres officiels de 2019, le verdict sera scruté bien au-delà des frontières pour montrer la volonté d’évolution du pays. Pour les experts, ce procès est un test pour la capacité du système judiciaire marocain à traiter équitablement une affaire impliquant des membres de l’élite économique.

Felix Sixtine poursuit son combat, qui résonne avec celui des Soulaliyates, ces femmes qui se sont battues pour leurs droits fonciers. Des voix qui, peu à peu, fissurent le mur du silence.

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