Les crédits bancaires accordés à l’économie représentent 20 % du PIB, en moyenne, en Afrique subsaharienne. Malheureusement, cette « performance » ne tient pas la comparaison avec le Maroc (environ 80 % aujourd’hui), le Brésil ou la Chine (respectivement 60% et 135 % en 2014), bref avec des pays ayant enregistré, sur les dernières décennies, une avancée spectaculaire sur le plan économique et social.
Il est souvent dit, et écrit, que la raison principale de ce retard réside dans la politique de gestion des risques des banques subsahariennes qui serait, le plus souvent, copiée sur celles de leurs homologues européennes et donc inadaptée aux fameuses « particularités » africaines tant redoutées et décriées ….
Si cette affirmation ne semble pas dépourvue d’un certain fondement et correspond à une partie (pour ne pas dire plus) de la réalité du terrain, n’y a-t-il pas d’autres raisons qui pourraient expliquer un phénomène qui constitue un véritable frein à l’émergence africaine et à l’essor de sa classe moyenne ?
En d’autres termes, s’il est incontestable que les établissements financiers implantés en Afrique subsaharienne pourraient réaliser davantage d’efforts pour s’adapter aux jeunes entrepreneurs locaux, l’inverse est-il vrai ?
La réponse est, selon mon expérience, oui !
De quelle manière ? En structurant mieux leurs projets et en accordant plus d’importance à des sujets fondamentaux qui, de fait, sont trop souvent négligés par les principaux intéressés faute de formation ou d’information pertinentes.
Soyons pragmatiques et avançons quelques exemples concrets :
Les « business plan » (ou plans d’affaires) préparés et présentés à l’occasion d’une demande de financement ne répondent que très rarement aux normes internationales, tant sur le fond que sur la forme, et ne permettent pas de générer la crédibilité et la confiance indispensables dans une relation financière.
Peu de jeunes investisseurs maîtrisent les règles de base de la gestion comptable et financière d’une structure. Ainsi, beaucoup de négligences ou d’imprécisions se retrouvent en termes d’appréhension et d’anticipation des problématiques de trésorerie d’entreprise, pourtant responsables de l’échec de grand nombre de projets prometteurs à l’origine.
La fiscalité, le droit du travail, le choix de la structure juridique de l’entité, ainsi que leurs impacts sur la création d’entreprise, sont encore trop souvent méconnus.
La mise en place de tableaux de bord et d’indicateurs de suivi quantitatif et qualitatif de la performance ne constitue pas toujours une priorité alors qu’elle devrait l’être….Le « pilotage à vue » est donc parfois privilégié au détriment, notamment, d’une politique de maitrise des couts rigoureuse.
Le banquier et l’entrepreneur en Afrique doivent faire chacun un pas l’un vers l’autre afin de concilier des états d’esprit et des méthodologies de travail qui, pour le moment, sont encore trop souvent antinomiques.
A vrai dire, si cela ne se fait pas, on voit mal comment les PME-PMI subsahariennes pourraient financer pleinement leurs investissements, se développer et donc générer, de manière massive, des emplois stables caractérisés par un cadre contractuel sécurisant.
Ne nous voilons pas la face, il y a urgence sur ce sujet : alors que la contribution des PME à la création de postes est de 90 % en moyenne sur la planète, elle n’est que de 45%, à peine, sur le continent….
Par Christian Christian Kazumba, conseil en management et organisation pour des entreprises implantées en Afrique