C’est via Internet que Kitine, 21 ans, rencontre un Français qui lui demande des photos d’elle nue. Au bout de deux semaines d’intenses conversations virtuelles, il la demande en mariage et elle accepte. Kitine pense ainsi fuir la Sierra Léone alors à la dérive. Mais elle retrouve en France un enfer qu’elle ne soupçonnait pas.
Propos recueillis par Amely-James Koh Bela
« Je l’ai rencontré sur Internet et très rapidement nous sommes tombés amoureux. Il m’a très vite demandée en mariage. J’ai accepté, ma famille aussi, contente que je parte de cet enfer. Au bout de trois mois, je me suis retrouvée à Lyon. Tout de suite, j’ai compris qu’il y avait un problème. Dès mon arrivée, il s’est montré très insatiable sexuellement parlant. Je me posais des questions sur ses tendances, la violence de ses étreintes et la bizarrerie de ses pratiques. J’avais tellement peur qu’il me renvoie en Afrique et cherche une autre femme que j’ai cédé à tous ces délires. Dès qu’il partait, je pansais mes blessures, je prenais des comprimés pour apaiser mes douleurs et je me reposais. Car dès son retour, le calvaire allait recommencer. Il était de plus en plus violent. Il m’attachait les pieds et les mains dans des positions inconfortables. J’étais au bord du malaise. Il me faisait très mal : il me pinçait les tétons avec des pinces à linge…
« Le prince charmant s’était transformé en crapaud »
Il ne parlait plus de mariage. Mon visa était arrivé à expiration et je suis devenue clandestine. C’est à ce moment qu’il a commencé à me faire du chantage. Le prince charmant s’était transformé en crapaud. Pour ne pas décevoir ma famille, j’ai tout supporté. La considération qu’elle avait pour moi était basée sur des fausses informations. Mais cela me faisait plaisir de lire les lettres pleines de joie de ma mère qui allait à l’église tous les jours pour remercier le Dieu pour ce fabuleux destin qu’il avait prévu pour sa fille…
La violence de Jacques est passée au stade supérieur quand il s’est mis à me fouetter, à me brûler le sexe avec la cire de bougie allumée ou à me brûler les tétons avec la cigarette. C’est en voyant mes souffrances et en m’entendant crier ou pleurer qu’il prenait son plaisir. Et c’est en m’aidant à soigner mes brûlures qu’il me témoignait son amour. C’était de plus en plus cruel, criminel… Le pire a été atteint quand il m’a brûlée une fesse avec une plaque de fer chaud. J’étais à plat ventre et je ne l’ai pas vu venir. J’avais les yeux fermés et j’attendais un coup de fouet, à la place, j’ai senti une douleur insoutenable qui m’a paralysé la jambe pendant un moment. J’ai alors poussé un cri qui a réveillé la moitié de l’immeuble. J’étais sérieusement brûlée et il m’a emmenée à l’hôpital. C’était gênant de justifier cette marque de fer sur la fesse. Je suis sûre qu’ils avaient compris que mon fiancé était un pervers sadomaso brûleur et fouetteur de femmes…
Celle qui ne fut pas esclave de la fatalité
Un jour, il m’a attaché les pieds et les mains et m’a suspendue au plafond sur un crochet qu’il avait installé. Ainsi pendant des heures, il jouait avec mon corps en me mettant des bougies, des légumes ou autres accessoires dans le corps. Plus d’une fois, je me suis évanouie. Et un jour, le crochet s’est dévissé et je suis tombée en me cassant trois dents sur le carrelage. Mon médecin, mon dentiste et mon gynéco se sont concertés car ils pensaient à une maltraitance conjugale. Voyant que je ne disais pas un mot, ils ont alerté les services sociaux. Ça devenait difficile de cacher les bleus, les brûlures et surtout, ses initiales marquées au fer sur mon épaule comme une esclave.
Cet enfer a duré six ans et tout le quartier était au courant. J’ai rencontré des assistantes sociales en cachette, car je ne voulais pas, malgré les sévices, porter plainte. Mais j’étais d’accord pour partir, lui annoncer mon départ et ensuite faire le nécessaire pour fuir loin de lui. Avec l’aide de l’assistante sociale, on lui a fait signer des engagements pour qu’il ne m’approche plus sinon il serait arrêté…Aujourd’hui, je suis sortie de là et je suis femme de ménage. Je porterai à vie ses initiales sur mes épaules. Je voulais faire comme les autres filles, trouver un mari blanc qui me sorte de la misère, je suis tombée sur un malade qui m’a trompée et qui a failli me tuer. Que ce témoignage serve aux filles, il n’y a aucune sécurité derrière les annonces. On peut tomber sur des criminels, il faut faire attention… »
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