Ce lundi matin, Kinshasa a retrouvé sa vie habituelle après avoir été le théâtre des affrontements de jeudi 22 et vendredi 23 mars derniers entre la garde de l’ex vice-président Jean-Pierre Bemba et les Forces armées congolaises (FARDC). Mais les dégâts matériels et humains sont considérables.
Par notre correspondant en RDC
Le bilan humain des affrontements de la semaine dernière reste toujours provisoire et controversé. Selon le gouvernement, il y aurait eu, jusque-là, 60 morts et 74 blessés. Parmi les morts et les blessés figurent des membres de la garde de J. P. Bemba et de la Police nationale congolaise ainsi que des soldats des FARDC et des civils.
De nombreux civils parmi les morts et les blessés
Des sources humanitaires font état d’un bilan beaucoup plus lourd. « Caritas a recensé 79 morts à la morgue de l’Hôpital général de Kinshasa, 20 à l’hôpital de Kintambo, 6 à la clinique Ngaliema et 2 à l’hôpital Saint-Joseph. Elle a également répertorié 148 blessés graves dans ces quatre principaux centres hospitaliers de la capitale », affirme Guy-Marin Kamandji, le chargé de communication de cette Ong catholique.
Selon la Croix Rouge, ces combats ont fait « des centaines de blessés et de morts, aussi bien parmi les porteurs d’armes que la population civile ». Le chef de délégation du CICR à Kinshasa, Max Hadorn,ajoute pour sa part que parmi « des dizaines de corps, sans vie, laissés là au bord de la route, il y avait de nombreux civils ».
La situation humanitaire encore préoccupante
Le cri d’alarme vient de tous les hôpitaux. De grandes formations hospitalières aux petits centres médicaux des quartiers, on est débordé par l’afflux des blessés et des morts. « Nous manquons des médicaments appropriés, du matériel nécessaire pour la chirurgie des blessures dues aux balles et surtout du sang pour la perfusion », déclare un infirmier d’un centre médical de la commune de Barumbu, juxtaposant celle de la Gombe où il y a eu des combats.
Le S.O.S. vient plus de la clinique Ngaliema, l’une des plus grandes formations médicales de la capitale congolaise. « Il nous faut un euro-médecin pour des interventions chirurgicales assez complexes. Nous avons une fille de 8 ans qui a une balle dans la tête; une femme qui a une balle dans le ventre et des intestins sont dehors; enfin un homme qui a une balle dans la jambe et qu’on doit malheureusement amputer », affirme le docteur Pascal Tshamala, directeur de l’hôpital.
Pour sa part, le CICR a dépêché samedi un avion, avec à son bord un chirurgien et 1200 kg de fournitures médicales. L’organisation humanitaire a déjà remis ces médicaments pour soigner environ 70 blessés traités à l’Hôpital général de la ville.
Jean-Pierre Bemba et les siens « se rendent »
Le chef de l’opposition congolaise et adversaire malheureux de Joseph Kabila à la présidentielle de 2006, Jean-Pierre Bemba, élu sénateur en janvier, est « hébergé » depuis jeudi soir à l’ambassade d’Afrique du Sud, à Kinshasa. Il est depuis vendredi sous le coup de poursuites judiciaires. Le gouvernement l’accuse d »entretien de milice », un crime de « haute trahison », selon les articles 188 et 190 de la Constitution de la RDC. « Ses hommes ont été très largement défaits par l’armée et lui-même est hébergé depuis jeudi par l’ambassade d’Afrique du Sud », affirme un officier militaire de la Monuc (la mission de l’Onu).
De leur côté, réunis samedi pour appeler à une plénière qui sera consacrée ce lundi à la crise à Kinshasa, les présidents des groupes parlementaires de l’Assemblée nationale (dont ceux du MLC, le parti de Bemba) ont condamné les violences et les pillages et recommandé au gouvernement de « s’assurer » que les éléments de la garde de M. Bemba qui ont fait acte de reddition soient pris en charge dans le respect des règles et de la loi.
Enfin, « la MONUC vient d’installer un point de regroupement qui restera ouvert jour et nuit à l’usine de mousse au sud de l’aéroport de N’Dolo à Lumumba. Sécurisé par des casques bleus sénégalais, ce point permettra d’accueillir les hommes de la garde de JP Bemba qui souhaitent se présenter ou s’y rendre et de leur apporter des soins s’ils sont blessés », a dit le Lieutenant-colonel Didier Rancher.