Kinshasa, Dakar, Lagos et Le Caire : les métropoles africaines prises au piège de la pollution


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Les mégapoles africaines, moteurs économiques du continent, font face à un ennemi invisible mais dévastateur : la pollution atmosphérique. Kinshasa, Dakar, Lagos et Le Caire, symboles de la croissance urbaine effrénée de l’Afrique, se trouvent aujourd’hui au cœur d’une crise environnementale et sanitaire majeure. Plongée dans le quotidien suffocant de ces géants urbains et analyse des défis à relever pour un avenir plus respirable.

L’Afrique, berceau de l’humanité, voit aujourd’hui ses métropoles confrontées à un défi sans précédent : la pollution atmosphérique. Parmi les cités les plus touchées, Kinshasa, Dakar, Lagos et Le Caire se distinguent tristement, leurs cieux autrefois clairs désormais obscurcis par un brouillard toxique.

Kinshasa, la vibrante capitale de la République démocratique du Congo, plus grande ville francophone du monde, est aujourd’hui prisonnière d’un cocktail explosif de polluants. Fondée en 1881 sous le nom de Léopoldville, la ville a connu une croissance fulgurante, passant de quelques milliers d’habitants au début du XXe siècle à près de 20 millions aujourd’hui. Cette expansion rapide, couplée à un manque d’infrastructures adaptées, a engendré une crise environnementale majeure. La combustion du bois de charbon, principale source d’énergie pour la cuisine et le chauffage, libère des particules fines en quantité alarmante. Le parc automobile vieillissant, héritage d’une économie en difficulté, contribue largement à la dégradation de l’air. Enfin, les industries, vestiges d’une ère d’industrialisation mal maîtrisée, ajoutent leur lot de toxines à ce mélange délétère.

Un héritage historique au prix lourd

À plus de 3 000 kilomètres de là, Dakar étouffe sous un ciel de plus en plus opaque. La capitale sénégalaise, autrefois célébrée pour sa douceur de vivre, fait face à une pollution grandissante. Fondée au milieu du XIXe siècle par les colons français, Dakar est devenue en moins de deux siècles une métropole de près de 4 millions d’âmes. La pratique ancestrale de la combustion des déchets, jadis inoffensive dans un contexte rural, est devenue un fléau urbain majeur. Le trafic routier, en constante augmentation, contribue largement à la dégradation de l’air. À cela s’ajoute un phénomène naturel ancestral : les vents chargés de poussières sahariennes, dont l’impact est aujourd’hui exacerbé par le changement climatique.

Lagos, mégapole tentaculaire du Nigeria, n’est pas en reste. Ancienne capitale du pays jusqu’en 1991, cette ville-monde de plus de 25 millions d’habitants est l’une des plus polluées d’Afrique. Son histoire, qui remonte au XVe siècle, est marquée par une croissance démographique explosive depuis les années 1960. Le trafic routier y est si dense qu’il paralyse régulièrement la ville, transformant l’atmosphère en une chape de plomb toxique. Les industries, moteurs économiques de la région, sont également de grands pourvoyeurs de pollution.

Le Caire, ville millénaire fondée en 969, voit son riche patrimoine menacé par un air de plus en plus irrespirable. Avec ses 20 millions d’habitants, la capitale égyptienne est confrontée à des défis similaires à ceux de ses consœurs africaines, auxquels s’ajoute la proximité du désert, source constante de poussières fines.

Des conséquences alarmantes et des solutions émergentes

Les conséquences de cette pollution sont dramatiques. Selon l’Organisation mondiale de la Santé, la pollution de l’air est responsable de près de 780 000 décès prématurés chaque année en Afrique. À Kinshasa, on estime que 10% des enfants de moins de 5 ans souffrent d’asthme, une proportion qui a doublé en 20 ans. Sur Dakar, les cas de maladies respiratoires ont augmenté de 30% en une décennie. À Lagos, la pollution atmosphérique réduirait l’espérance de vie de près de 5 ans. Au Caire, on estime que la pollution de l’air coûte à l’Égypte près de 1,5% de son PIB chaque année en frais de santé et perte de productivité.

Face à ce fléau, des solutions émergent. Le développement des transports en commun, l’instauration de normes industrielles plus strictes, la plantation massive d’arbres et la sensibilisation de la population sont autant de pistes explorées par les autorités. Certaines villes, comme Dakar, expérimentent déjà l’utilisation de bus électriques. À Kinshasa, un ambitieux programme de reboisement urbain vise à planter 1 million d’arbres d’ici 2030.

Le chemin vers un air plus pur est encore long, mais la prise de conscience est là. L’avenir de ces métropoles africaines, et de millions de vies, en dépend. Il est temps que ces géants d’Afrique, poumons économiques de leurs pays, puissent à nouveau respirer librement.

Masque Africamaat
Kofi Ndale, un nom qui évoque la richesse des traditions africaines. Spécialiste de l'histoire et l'économie de l'Afrique sub-saharienne
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