Le gouvernement rwandais, selon l’agence de presse Misna, prévoit de lancer des poursuites judiciaires contre Agathe Habyarimana, veuve du Président rwandais assassiné en 1994, Juvenal Habyarimana. Elle serait l’un des cerveaux du génocide rwandais.
L’agence de presse Missionary Service News Agency (Misna) a indiqué, mercredi dernier, que le gouvernement rwandais comptait lancer des poursuites judiciaires contre l’ancienne Première Dame rwandaise, Agathe Habyarimana. Cette dernière serait la « numéro un » d’une liste, rendue publique par le gouvernement de Paul Kagamé, de « 300 hauts officiers et fonctionnaires compromis avec le régime de Habyarimana et ayant fui à l’étranger après la fin des massacres ». « Nous savons qu’elle vit en France et qu’elle devra comparaître devant les tribunaux», a indiqué le procureur général du Rwanda, Emmanuel Rukangira dont les propos ont été rapportés par Misna. Elle est accusée d’avoir contribué à la planification du génocide. Une tragédie dont le crash aérien, le 6 avril 1994, qui a coûté la vie à son mari et ex-président rwandais Juvénal Habyarimana, est considéré comme le catalyseur. Le génocide rwandais a fait plus de 800 000 victimes. Le Rwanda exige de Paris que lui soit livrée Agathe Habyarimana.
Le crime d’une élite d’extrémistes
Cette procédure, si elle devenait effective, viendrait corroborer les accusations qui planent depuis, une dizaine d’années, sur Agathe Habyarimana. Des accusations relayées par de nombreuses organisations internationales comme l’Union Africaine et la Ligue des Droits de l’Homme (LDH). Ainsi, dans un rapport de l’Union africaine, paru en 2000, on pouvait lire : « Mme Habyarimana aurait elle-même été impliquée dans certaines des premières décisions politiques prises avant le 9 avril, date à la laquelle elle fut au nombre des premières personnalités évacuées sur Paris par les Français ». Or les premiers massacres ont eu lieu quelques douze heures après l’assassinat du Président Habyarimana. De même la LDH et la Fédération internationale des ligues des Droits de l’Homme (FIDH) ont, dans un récent communiqué, évoqué «le rôle» d’Agathe Habyarimana «dans l’animation des milices Interahamwe et de la radio des Mille Collines».
Dame Habyarimana a été, en effet, un membre très influent voire incontournable du mouvement Akazu (petite case) qui a activement contribué au génocide des Tutsi et des Hutu modérés. Akazu rassemblait l’entourage proche du Président Habyarimana. Des gens issus de sa région (nord-ouest du Rwanda) et des membres de la famille de son épouse. Le groupuscule extrémiste hutu, « un Etat dans un Etat » selon certains, finançait les Interahamwe (la milice du Mouvement National pour la Reconstruction et le Développement), les escadrons de la mort «Réseau Zéro» (ou « Zero tutsis ») et Amasasu (balles) qui « se sont tous deux chargés des assassinats politiques avant le 16 avril et durant le génocide ». Ce nouvel épisode judiciaire risque encore d’envenimer les relations entre Kigali et le Quai d’Orsay. Des relations déjà très tendues suite aux conclusions de l’enquête du juge anti-terroriste français, Jean-Louis Bruguière, qui désigne l’actuel président rwandais, Paul Kagamé, comme le principal responsable du meurtre de Juvénal Habyarimana. Les manifestations commémorant les dix ans du génocide rwandais se tiendront le 7 avril prochain au Rwanda.