Le vice-président kényan Rigathi Gachagua a été destitué, un événement sans précédent qui met en lumière des tensions croissantes au sein du gouvernement.
Le Kenya, souvent considéré comme un modèle de stabilité politique dans une région tourmentée, vient de vivre un événement sans précédent. Le vice-président Rigathi Gachagua, figure influente du gouvernement, a été destitué dans la nuit du jeudi à vendredi, marquant une première dans l’histoire politique du pays. Ce rebondissement spectaculaire survient après plusieurs mois de tensions palpables entre le président William Ruto et son adjoint, mettant en lumière des divisions profondes au sein de l’exécutif kényan.
Un procès en destitution inédit
La procédure, prévue par la Constitution de 2010, s’est conclue après un vote au Sénat où Rigathi Gachagua a été reconnu coupable de cinq des onze chefs d’accusation retenus contre lui. Ces accusations, allant de la corruption au détournement de fonds publics, font de Gachagua le premier vice-président kényan à être écarté du pouvoir à la suite d’une procédure de destitution. Ce procès, hautement médiatisé, a mis en lumière les querelles politiques au sommet de l’État, notamment après que le vice-président ait été accusé d’insubordination envers le président Ruto.
Corruption et abus de pouvoir au cœur des accusations
Parmi les charges retenues contre Rigathi Gachagua, la corruption et l’abus de pouvoir sont les plus graves. Le vice-président, âgé de 59 ans, aurait détourné des fonds publics et utilisé son influence pour acquérir frauduleusement des hôtels et des appartements. Ce procès survient dans un contexte de mécontentement populaire croissant, où de nombreuses voix accusent l’élite politique de déconnexion totale avec les réalités du peuple. Gachagua, quant à lui, dénonce ces accusations comme étant un complot destiné à l’évincer pour des raisons purement politiques.
Une procédure controversée et des tensions internes
Bien que les sénateurs aient validé sa destitution, le déroulement du procès a suscité de vives critiques. Gachagua, hospitalisé dans l’après-midi pour des douleurs thoraciques, n’a pas pu revenir pour se défendre lors du vote final. Ses avocats ont tenté en vain de repousser le verdict, dénonçant une décision précipitée en l’absence de l’accusé. Pour Karungo Thangwaune, sénateur et proche de Gachagua, « la question que l’on se pose est : quelle est l’urgence ? Nous avions encore vendredi et même samedi. Pourquoi vouloir en finir aujourd’hui, en pleine nuit et en l’absence du vice-président ? »
La fin d’un duo politique prometteur ?
L’élection de 2022 avait vu William Ruto et Rigathi Gachagua triompher ensemble face à Raila Odinga. Cependant, les relations entre les deux hommes se sont progressivement dégradées, notamment après les manifestations antigouvernementales de juin et juillet. Rigathi Gachagua est accusé de ne pas avoir soutenu le président dans la gestion de ces troubles, qui ont fait plus de 60 morts. Le ressentiment né de cette crise a exacerbé les tensions, menant à cette destitution qui, pour beaucoup, symbolise une fracture profonde au sein de la classe politique kényane.