Dans les années 1970, le Congolais Jean Samba, tel un archéologue, tirait des oubliettes de l’Histoire une discipline sportive pratiquée du temps de l’Egypte antique. Aujourd’hui, à l’occasion des 11èmes Jeux Africains de Brazzaville, la boxe des pharaons – c’est son nom –, figure au rang de sport de démonstration. Pour le plus grand plaisir des spectateurs, curieux de savoir comment se pratique un sport qui puise ses racines dans la grande Histoire des hommes.
Et si le trésor des Pharaons n’était pas celui que l’on croyait ? À voir les mines réjouies des spectateurs venus assister, ce jeudi 10 septembre, aux combats de démonstration de boxe des Pharaons, il y a de quoi s’interroger. « Ce sport est fascinant. En le regardant pratiquer, j’ai l’impression de traverser l’Histoire », s’exclame Martin, un étudiant Brazzavillois, originaire de Mfilou. « Juste génial ! », exulte son voisin, Anicet, un jeune licencié d’un club de karaté de la capitale congolaise, avant d’ajouter avec conviction : « dès demain, je m’y mets ».
Ancestrale mais souvent méconnue, la boxe des Pharaons figure en effet au programme de la 11ème édition des Jeux Africains de Brazzaville en tant que sport de démonstration. Le public congolais est invité à découvrir cette discipline originale au Complexe sportif de la Concorde à Kintélé. Les combats de démonstration sont accompagnés d’une exposition sur l’histoire de ce sport.
Cette opération séduction, entreprise à l’occasion des Jeux Africains, permettra donc au public, sportif comme non sportif, de découvrir ce pan du patrimoine sportif congolais. Car comme son nom ne l’indique pas, ce sport est bien… congolais. Plus exactement, il s’agit d’un sport né dans l’Égypte antique, tombé en désuétude, avant d’être exhumé et rénové par le Congolais Jean Samba à partir de 1976. Ses travaux de recherche appliquée, via l’étude de l’iconographie de l’Egypte ancienne, l’ont en effet conduit à la découverte de ce sport de combat, pratiqué jadis par les nobles de l’Égypte antique. Jean Samba a alors entrepris de le moderniser pour le remettre au goût du jour.
Art martial essentiellement basé sur le corps, la boxe des pharaons rénovée utilise aujourd’hui ces armes naturelles que sont le poing, la main ouverte, la pointe des doigts, le coude, le genou, le pied et le talon. Mais également des armes blanches telles que le couteau ou le bâton. Durant les combats, les pratiquants sont vêtus d’une tenue caractéristique, composée d’un ensemble pagne-jupe et d’une marinière.
Au Congo, la discipline est dotée d’une Fédération très organisée, la Fédération Congolaise de Boxe des Pharaons Rénovée (FECOBOPHAR), qui organise un championnat national. Sous sa houlette, les licenciés se sont préparés avec beaucoup de rigueur et de discipline pour être fin prêts pour les Jeux. « Les entraînements ont été difficiles. Mais l’enjeu en valait la peine », nous confie Loïc, qui pratique ce sport depuis près de dix ans. Dès janvier 2014, Jean Samba, qui est le président de la FECOBOPHAR, avait exhorté les adeptes de la discipline à « travailler davantage » car, avait-il averti, « aucune complaisance, ni aucun sentimentalisme ne prévaudront dans le choix des athlètes devant faire partie de l’équipe nationale du Congo, les Diables rouges », à l’occasion des Jeux.
Désormais bien ancrée au Congo, la discipline entend poursuivre son expansion sur le plan géographique. Des pays comme la RDC ou encore l’Angola l’ont déjà adoptée. Mais Jean Samba voit plus loin. « Les Jeux Africains doivent être l’occasion de montrer le caractère universel de la boxe des Pharaons rénovée, ainsi que sa capacité à s’internationaliser ou à se mondialiser », a-t-il déclaré il y a quelques mois.
Secrètement, Jean Samba rêve de voir « son » sport figurer un jour aux Jeux Olympiques. Des Jeux Olympiques qui, eux aussi, tirent leurs origines de l’Antiquité. Exhumé des sables de l’Histoire, la boxe des Pharaons est promise à un bel avenir.