Sonia Terrab : « Je voulais montrer le quotidien des cols blancs marocains »


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Sonia Terrab
Sonia Terrab

Loin des clichés exotiques de médinas impériales, souks et chameaux, Shamablanca évoque le quotidien d’une réalité méconnue du royaume chérifien : le Marock. Rencontre avec l’auteure.

Sonia Terrab, l’auteure de Shamablanca explique le contexte de la naissance de son roman et réagit quand à l’accueil du public.

Afrik.com : Pouvez-vous nous dire comment est né Shamablanca ? Ce thème de la jeunesse dorée marocaine s’est-il imposé de lui-même ?

Sonia Terrab : Le roman est né il y a à peu près deux ans et demi. À cette époque, j’étais journaliste à Casablanca et j’ai ressenti le besoin d’écrire sur ce que je voyais, ce qui m’entourait. Avec la bourgeoisie marocaine j’ai su que je tenais un sujet intéressant à creuser car c’est quelque chose dont on ne parle quasiment jamais lorsqu’on aborde le Maroc. Je voulais réaliser un roman urbain et montrer le quotidien de ces cols blancs marocains. En leur donnant la parole, il s’agissait pour moi de dénoncer le vide. Le vide des apparences qui régit cette société et qui en fait une vitrine.

Afrik.com : Dans votre roman la ville de Casablanca est omniprésente, à la fois tentaculaire et chaotique. Comment décririez vous votre rapport à la ville blanche ?

Sonia Terrab : Pour moi Casablanca est un personnage à part entière dans le roman. Il y a un éternel combat entre Shama et Casa, elles ne se comprennent pas car elles ne parlent pas le même langage. Moi aussi, qui ne suis pas originaire de cette ville, j’ai subi son choc lorsque je m’y suis installée et cela m’insupporte toujours de ne pas pouvoir marcher en paix dans la rue, de me sentir enfermée car l’espace public ne m’appartient pas… Avec Casa on est dans un rapport d’amour-haine constant. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai dû partir à Paris pour finir Shamablanca, ne pouvant pas travailler sur place.

Afrik.com : Shama, qui n’arrive plus à se réadapter à la société marocaine après plusieurs années à l’étranger, est en colère contre les hommes mais aussi contre les femmes qu’elle accuse d’être « consentantes et déchaînées (…) voulant la suprématie du patriarcat contre elles-mêmes ». Les femmes seraient-elles aussi leurs propres bourreaux ?

Sonia Terrab : En effet, pour moi, quelque part, on n’a que ce que l’on mérite. Et les femmes sont tout autant responsables de leur situation. Dans ces cercles bourgeois on aurait tendance à croire qu’avec l’ouverture sur le monde et le cosmopolitisme, les mentalités sont modernes. Or, ce n’est pas le cas et l’on y reproduit invariablement le même schéma. J’irais même plus loin en disant que certaines jeunes femmes font preuve de plus de traditionalisme que leurs mères. Elles reviennent à un esprit archaïque, ne se construisent qu’autour de l’homme et espèrent obtenir une légitimité par leur mariage.

Afrik.com : Shamablanca est actuellement en rupture de stock dans les librairies de Casablanca et vous êtes lice pour le prix littéraire de la Mamounia… Vous attendiez-vous à autant de succès ?

Sonia Terrab : Non pas du tout. Avant de publier Shamablanca j’ai essayé d’imaginer l’accueil du roman mais j’ai fini par y renoncer et tout est allé ensuite très vite. Ceci dit, j’en suis heureuse car je voulais vraiment que mon roman soit accessible et parle à tous, dans un langage simple, direct et visuel. Aujourd’hui, je pense sérieusement à le faire traduire en darija (arabe marocain) pour toucher encore plus de Marocains.

Par Marianne Roux-Bouzidi

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