Le Président congolais, Denis Sassou N’Guesso, a donné, samedi, le coup d’envoi de la cinquième édition du Festival panafricain de musique. Du 9 au 16 juillet, Brazzaville est en effet la capitale africaine de la musique. Le lever de rideau s’est déroulé au stade Félix Eboué, un lieu au nom symbolique pour une fête qui tenait doucement la route. Près de 15 000 personnes avaient fait le déplacement. Reportage.
De Brazzaville
Il est 15 heures quand les premiers spectateurs prennent place dans les gradins du stade Félix Eboué à Brazzaville. Ce soir le Président sera là pour le lancement du Festival panafricain de musique. Fouilles au corps et vérifications des sacs à l’entrée, les miliaires veillent au grain pour qu’il n’y ait aucun trouble fête. Les tribunes se remplissent petit à petit. Il y aura du monde. La soirée, qui se veut populaire le sera, parce que l’entrée est gratuite, parce que c’est l’événement majeur de ce mois de juillet et également parce que Koffi Olomidé, « La » tête d’affiche du concert d’ouverture, jouera ce soir.
Il fait bon, malgré le ciel bas de cette saison sèche. Au centre de la pelouse, la régie son et une partie de l’éclairage, montées sur un échafaudage de trois étages. Les techniciens s’activent pour les dernières balances. En l’occurrence celles du groupe de kompa (Haïti) Original H qui augurent un show caribéen que nous sommes pressés de découvrir. C’est ainsi que nous pouvons également apprécier la nouvelle acquisition du Festival : un vrai podium qui faisait jusque-là cruellement défaut au pays, obligé jusque-là de louer à chaque fois une scène. Ce soir, personne ne ratera le spectacle. Deux écrans géants encadrent la scène. Et ceux qui n’ont pas pu faire le déplacement pourront le regarder en direct à la télévision.
Claudy Siar et Ayden
Les jeunes hommes du public sont déjà à la fête. Assis à l’opposé de la tribune présidentielle, ils interpellent joyeusement et avec vigueur chaque fille un peu sexy qui s’aventure à passer devant eux. Une ambiance bon enfant pour une drague collective flatteuse, mais qui ne doit pas être des plus efficaces. Le monde ne cesse d’arriver. A l’extérieur du stade, la queue ne désemplit pas. Pour les vendeurs d’arachide, bassine remplie sur la tête, la soirée s’annonce excellente. 100 FCFA le cornet. L’avant spectacle commence. On retiendra plus particulièrement la prestation vivifiante du groupe Kongo salsa et le savoureux passage de l’humoriste Tchakou (« Le perroquet » en lingala) avec sa singulière leçon de mathématique et surtout son imitation du Maréchal Mobutu avec son fameux discours diffusé jadis avant chaque journal télévisé, un discours revu, corrigé et adapté pour la circonstance à la tenue du Fespam.
Si la première partie de la soirée était présentée par l’animateur congolais Medard Milandou, les cinq artistes programmés (Debbie Davis, Bana Poto-Poto, Original H, Koffi Olomide et Patrouille des stars) seront introduit par la vedette incontesté des animateurs afro : Claudy Siar de Radio France international (et son émissions Couleurs tropicales). Il sera accompagné par la radieuse journaliste et présentatrice de Télésud, Ayden. Tout deux, originaires des Antilles, ne manquent pas de saluer le thème de ce Fespam 2005 : « Héritage de la musique africaine dans les Amériques et les Caraïbes ». Ils ne manquent pas également de souligner le symbolisme des lieux, le stade portant le nom d’un descendant d’esclaves guyanais, gouverneur de l’Afrique équatoriale française : Félix Eboué. Les organisateurs ont eu la délicatesse de nous épargner les longs discours. Des salamalecs inutiles, comme l’a bien compris le Président Sassou N’Guesso. « Je déclare ouverte la 5e édition du Festival panafricain de musique » seront les seuls mots qu’il prononcera sur le podium avant de retourner s’asseoir.
Le show va commencer. Le public prend d’assaut la pelouse du stade pour avoir les meilleures places devant. Le premier grand temps fort de la soirée répond aux exigences. Une remarquable fresque dansée de 45 minutes décline en différents tableaux l’histoire de l’esclavage. La programmation commence avec l’artiste américaine Debbies Davis, qui pour s’attribuer les bonnes grâces du public, débute avec des chansons congolaises qu’elle chante en langue vernaculaire. Si la prestation ne se prêtait pas exactement au public, l’une des compagnonnes de route du grand Al Jarreau a tout de même fait bonne figure en faisant montre de ses impressionnantes qualités vocales.
Koffi Olomide comme clou du spectacle
Le public, il faut le reconnaître très chauvin, veut de la musique congolaise. Qu’à cela ne tienne, la Patrouille des stars, un des grands groupes du pays, prend le relais. Et réalise un efficace mélange des différentes danses du pays sur des fusions musicales ndombolisantes. L’assistance est forcément très chaude et chacun y va de ses pas de danse. De 7 à 77 ans. Le soufflet retombe quelque peu avec Original H, notamment pour de tristes problèmes techniques. La transition de scène est trop longue et seul un micro sur trois fonctionne. Malgré cela, l’énergie est là. La musique est là. Puissante, entraînante, mais amputée de toute sa force avec deux des chanteurs réduits au silence ou presque.
La fin de la soirée est 100% congolaise (des deux rives). Koffi Olomidé, qui devait clore les débats après Bana Poto-Poto, inverse son passage, sans doute pour que le Président, encore à la tribune, puisse le voir sur scène. Inutile de décrire l’ambiance. Le grand Mopao, parmi les quatre illustres figures contemporaine de la musique congolaise (avec Werrason, JB Mpiana et Papa Wemba), est en terrain conquis. Et c’est pour lui que tout le monde est finalement resté jusqu’au bout. Le Festival panafricain de musique 2005 est lancé. On pourra toutefois regretter les quelques errances techniques qui ont parasité le show. Mais l’organisation a une pleine semaine de festivités pour se rattraper. Fespam Oyé !