Issa Dominique Konaté : Sankara « savait écouter, mais ne se laissait pas convaincre facilement »


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Thomas Sankara
Thomas Sankara

Thomas Sankara avait l’écoute, était ouvert au dialogue, mais était redoutable dans une confrontation d’idées. Ceci lui a valu l’opposition de certains de ses camarades membres du CNR, qui voyaient en lui un chef autoritaire dont il fallait se débarrasser. En ces termes, on peut résumer le témoignage de Issa Dominique Konaté, le deuxième témoin passé à la barre, jeudi, dans le cadre du procès de l’assassinat du père de la révolution burkinabè.

Le deuxième témoin passé à la barre, jeudi 25 novembre, dans le cadre du procès de l’assassinat du capitaine Thomas Sankara, a pour nom Issa Dominique Konaté. À l’époque des faits, il était membre du Groupe communiste burkinabè (CGB). D’après son témoignage, il était à l’hôtel des indépendances, le jeudi 15 octobre 1987, quand il y a eu la fusillade au Conseil de l’entente. Il apprendra vers 18 h, en se rendant à son domicile à Gounghin, que le Président Thomas Sankara a été mortellement atteint, au cours de cette fusillade.

En sa qualité de membre du GCB, un groupe qui faisait partie du Conseil national de la révolution (CNR), il a été invité à la réunion organisée au lendemain du drame par les trois leaders restants de la révolution —le commandant Jean-Baptiste Boukari Lingani, les capitaines Blaise Compaoré et Henri Zongo— pour leur parler des événements de la veille au cours desquels le premier responsable de la révolution ainsi que 12 de ses camarades ont été abattus.

Et alors, le GCB, qui était déjà en désaccord avec le Président du Faso, selon la version de Jean-Marc Palm, un témoin auditionné précédemment, a pris fait et cause pour les nouvelles autorités. Au point où Issa Dominique Konaté a été désigné parmi les personnes auxquelles fut confiée la mission d’aller expliquer ce qui s’est passé au Burkina Faso, aux chefs d’État de la sous-région. À ce titre, il a conduit une délégation au Niger, au Mali et en Cote d’Ivoire pour aller rassurer les autorités de ces différents pays.

Interrogé sur la position de feu Valère Somé qui avait affirmé que c’est feu Salif Diallo, précédemment directeur de Cabinet de Blaise Compaoré et membre du GCB, qui a été l’éminence grise du coup d’État, ce qui place le groupe en première ligne dans les événements tragiques du 15 octobre 1987, Issa Dominique Konaté marque son désaccord. Selon le témoin, Salif Diallo n’était pas à l’époque membre du GCB qu’il a intégré bien plus tard.

Des propos du témoin, il ressort que certains membres du CNR étaient contre la personne de Thomas Sankara parce que ce dernier avait une telle force de persuasion que lors des confrontations d’idées, il prenait souvent le dessus. Ce qui faisait dire à ses détracteurs qu’il était autoritaire et voulait seul décider de tout. « Mon sentiment est qu’il (Thomas Sankara, ndlr) voulait aller vite. Je ne dirai pas aux pas pressés, mais, il était convaincant et avait foi en ses convictions. Il avait du leadership », avait déclaré le témoin à la barre, avant d’ajouter que le Président du Faso « savait écouter, mais ne se laissait pas convaincre facilement ».

Après le passage de Issa Dominique Konaté, l’audience a été suspendue et ne reprendra que lundi.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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