Le peintre Claudio Bravo est né au Chili mais a choisi de vivre au Maroc. Installé à Tanger, cela fait plus de 30 ans qu’il collectionne les objets du quotidien marocain et qu’il peint les lumières, les couleurs et les hommes du Maroc. L’Institut du monde arabe, à Paris, propose aujourd’hui deux expositions pour mieux cerner son univers chatoyant.
Le peintre chilien Claudio Bravo est tombé amoureux du Maroc en 1972. Débarqué à Tanger, il pose bagages, toiles et pinceaux dans cette ville ouverte sur la mer, à l’époque lieu de prédilection de la beat generation américaine. Il y côtoie l’écrivain Paul Bowles, y rencontre le peintre Francis Bacon et y trouve (surtout) l’inspiration. Il est « fasciné par la composition des choses dans ce pays », dit-il alors, « bouleversé par l’utilisation des couleurs qui y est faite dans la vie de tous les jours ». La lumière, les couleurs et les habitants de Tanger l’émerveillent. Il va les peindre de sa façon hyper-réaliste qui se ressource au classicisme, guidé par son obsession de représenter le monde tel qu’il est. Certaines toiles font penser aux grands maîtres, comme le « Diseur de bonne aventure » (1981) ou « Le turban rouge » (1977), portrait à la Rembrandt.
Réaliste coloriste, Claudio Bravo passe du portrait à la nature morte avec talent, s’illustrant également dans les allégories mises en scène. Inspiré par le Maroc et les Marocains, il l’est aussi par la religion musulmane. Avouant se sentir proche de la foi islamique, de son aspiration vers la mystique, il arrive à capter de belle manière une série d’hommes en prière.
Amour des plis
On découvre peu à peu, au fil des toiles présentées dans l’exposition de l’Institut du Monde arabe, que toute son œuvre est une célébration des tissus. Haïks suspendus, tapis brodés, tentures aux mille plis, nappes froissés… Claudio Bravo explore les drapés comme dans la sublime « Etoffe mauresque » datant de 1995 ou les « Laines » de 2003. Quant aux « Babouches » (2003), on pourrait presque les toucher du doigt, tant leur réalisme, qu’elles soient en cuir ou en tissus, est frappant.
Le peintre est aussi un collectionneur et il a prêté à l’Ima cinquante objets du quotidien marocains. Ces derniers lui servent de modèles et de bases pour ses recherches formelles et chromatiques. Claudio Bravo considère que la céramique est le plus abouti des arts traditionnels et sa collection reflète sa passion. On y trouve plusieurs exemplaires de khabia, grande jarre pansue à couvercle dans laquelle étaient autrefois conservées les viandes confites. Suivis par des plats de services délicatement décorés, des bols, des céramiques à décor bleu et blanc qui évoque les broderies de Fès, ainsi qu’une impressionnante lampe à huile, qandil.
Depuis 2000, Claudio Bravo a établi sa résidence d’hiver à Marrakech, ouvrant sa peinture sur l’Afrique. Il partage désormais son temps entre cette ville du Sud marocain et sa maison de Tanger. De quoi confronter leurs lumières et leurs couleurs.
Claudio Bravo et le Maroc, du 16 mars au 16 mai 2004 à l’Institut du monde arabe, 1, rue des Fossés-Saint-Bernard – Place Mohammed-V – 75005 Paris.