A 50 ans, Boulhos Loupino a déjà 32 ans de carrière derrière lui et encore de belles années en perspective. A l’occasion de la sortie de son nouvel album, l’artiste congolais nous confie sa vision de la musique africaine. Une musique qui se doit d’être ouverte, à la fois traditionnelle et mondialiste. Interview.
Avec plus de 30 ans de carrière derrière lui, Boulhos Loupino est un des anciens de la musique congolaise. Ancien, mais pas poussiéreux, à en juger par la vitalité de son dernier album » Florence « , tout récemment sorti dans les bacs. Si Boulhos réside en France depuis longtemps, son coeur reste congolais avant tout. Une légitimité que ne lui discute pas son pays natal qu’il représenta d’ailleurs à deux reprises (1996 et 1999), sélectionné par ses pairs, au Festival panafricain de musique (Fespam) de Brazzaville. L’artiste analyse avec recul l’oeuvre de la nouvelle génération dont il juge l’inspiration trop conjoncturelle. Pour lui, la musique doit être intemporelle et interculturelle. Ancrée dans la tradition, mais ouverte sur le monde et en particulier sur l’Occident.
Afrik : Quel est votre univers musical ?
Boulhos Loupino : J’écoute difficilement ma propre musique. Je me nourris essentiellement de celle des autres. J’écoute beaucoup d’artistes africains, comme j’écoute également du R’n B et pas mal de chansons françaises.
Afrik : Quel regard portez-vous sur la jeune génération d’artistes au Congo ?
Boulhos Loupino : Je ne voudrais pas aboutir à un conflit de génération, mais je dois avouer que je n’arrive pas à reconnaître du Werrason, du JB Mpianat ou du Extra Musica. Ils jouent tous de la même manière. Ce qu’ils font est bien, mais ça manque un peu de mise en perspective. La chanson ne doit pas rester une mode qui disparaît 6 mois après. Si l’on prend quelqu’un comme Tabou Ley, ce qu’il a fait dans les années 60 vit encore. Et puis aujourd’hui la musique congolaise reste malheureusement cloisonnée au ndombolo.
Afrik : Comment devrait être la musique congolaise ?
Boulhos Loupino : Il faut universaliser la musique. Il faut donner la chance à la musique congolaise et plus généralement à la musique africaine d’aller vers les autres musiques. C’est ce que fait très bien Mory Kanté par exemple. Il faut s’adapter et essayer d’occidentaliser notre musique. Il faut décloisonner la musique africaine. Arriver à ce que les gens vibrent dessus juste en tant que musique pas en tant que musique africaine. Une musique comme la salsa y est arrivée, elle n’est plus donnée à une communauté en particulier. Elle appartient à tous.
Afrik : Et pour ce faire comment travaillez-vous ?
Boulhos Loupino : Au cours des arrangements en studios, on discute beaucoup entre nous. On essaie de créer un peu en fonction de l’Occident.
Afrik : Créer en fonction de l’Occident ? N’est ce pas là une sorte de démagogie artistique ?
Boulhos Loupino : Ce que je voulais dire c’est qu’on essaie de tirer la musique vers quelque part. Il faut que nous sortions de la musique traditionnelle. En restant ouvert et honnête je crois qu’on peut arriver à quelque chose. Notre fonds musical doit demeurer, mais ce doit être une base pour évoluer. Il n’y a rien de mécanique et de calculé dans le fait de vouloir occidentaliser notre musique. On la nourrit simplement des influences que chacun peut apporter dans le groupe.