Lors de la clôture du Forum sur la paix et la sécurité en Afrique, ce mardi, à Dakar, le Président tchadien Idriss Déby a affirmé que le travail en Libye a été achevé puisque l’objectif de l’OTAN était d’assassiner Mouammar Kadhafi, rappelant que la déstabilisation du Mali résulte de la chute du défunt leader libyen.
à Dakar,
Idriss Déby n’a pas mâché ses mots lors de la clôture du Forum économique sur la paix et la sécurité en Afrique, ce mardi, à Dakar. Très applaudi, le Président tchadien s’est lancé dans une diatribe acerbe contre l’intervention de l’OTAN en Libye, qui a, selon lui, provoqué le chaos libyen et déstabilisé le Mali.
« Contrairement à mon frère Macky Sall qui a dit que le travail en Libye n’a pas été achevé, le travail en Libye a bel et bien été achevé puisque l’objectif de l’OTAN était d’assassiner Kadhafi. Cet objectif a été atteint. Seulement, le service après-vente n’a pas été assuré », a déclaré le Président tchadien sous les applaudissements d’une salle comble, qui a visiblement apprécié sa sortie contre l’OTAN, intervenue militairement en Libye, arguant protéger ainsi la population libyenne.
« L’OTAN a assassiné Kadhafi, c’est donc à elle que revient de trouver la solution au chaos libyen »
« Maintenant, Kadhafi est mort, tout est terminé. La Libye est devenue le terreau du terrorisme et de tous les brigands et malfaiteurs. Et les Libyens ne savent pas à quels saint se vouer », déplore Idriss Déby. Selon lui, la « crise au Mali est une conséquence directe de la destruction de la Libye. La menace Boko Haram est aussi une conséquence directe de la destruction de la Libye. Tout le monde sait que la Libye est le pays le plus armé de l’Afrique, et même au monde. Toutes ces armes se trouvent dans la nature », a déploré Idriss Déby.
Par conséquent, « la solution n’est pas aux mains des Africains, comme l’affirme mon frère Ibrahim Boubacar Keita, mais entre les mains de l’OTAN. Après avoir assassiné Kadhafi, il n’y a que l’OTAN qui a les moyens nécessaires de résoudre donc la crise en Libye », a affirmé ironiquement le Président tchadien. « Si on veut résoudre les problèmes en Afrique, il faut s’occuper de la Libye. Et la solution, ce sont nos amis Occidentaux qui doivent la trouver, une solution pour la Libye et pour le peuple libyen et pour l’Afrique », renchérit de plus belle Idriss Déby, toujours très applaudi par le public. Pour lui, « il est désormais difficile de dialoguer avec les fondamentalistes et intégristes » qui minent le pays.
« Après 60 ans d’indépendance, nous ne pouvons pas continuer à être un poids pour nos partenaires ! »
Selon lui, il ne faut pas s’étonner que les armées africaines peinent à faire face aux crises que le continent rencontre, « car ce sont de petites armées issues de la décolonisation. Elles sont mal armées, mal entrainées ; ces armées ne peuvent donc pas faire face à une menace importante. Il faut que tous les pays africains se dotent d’au moins deux ou trois unités opérationnelles avec tous les moyens nécessaires ». Il faut donc « que nos amis nous aident à former les armées. Nous ne pouvons pas continuellement demander à nos amis de venir nous aider quand nous sommes menacés. Le Mali par exemple, à supposer que la France n’était pas intervenue, nous aurions perdu, et serions dans une situation de désespoir total. La France ne peut pas continuellement être là pour l’Afrique, la France a aussi son opinion, bien que les Occidentaux aussi aient leurs intérêts en Afrique », a-t-il déclaré ironiquement, provoquant de grands rires dans la salle.
Et le dirigeant tchadien d’ajouter : « Après 60 ans d’indépendance, l’Afrique ne peut pas faire fonctionner l’Union Africaine, alors que nous avons des matières ! Nous ne pouvons pas continuer à être un poids pour nos partenaires ! Nous devons nous assumer ! La responsabilité la plus grande, pour le changement, revient aux dirigeants africains, à la société civile africaine, aux partis politiques africains, à la masse, aux jeunesses (…). Il est possible, avec une volonté politique, de créer une armée pour le continent sous le commandement unique de l’Union Africaine, et uniquement de l’Union Africaine », conclut le Président tchadien, très ovationné par le public.
Un discours du Président tchadien loin d’avoir plu à Jean-Yves Le Drian qui peinait à cacher son malaise après de tels propos du dirigeant. « Je vois que le Président a déjà une feuille de route pour les années à venir, et qu’il est le nouveau président du Conseil de sécurité. Comme disait ma grand-mère : « Il ne reste donc plus qu’à faire ! » », a lancé Le Drian.