Homme à éliminer


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L’humoriste Dieudonné M’Bala M’Bala n’en est pas à son coup d’essai politique. Aux législatives de 1997 à Dreux, comme aux régionales de 1998, il faisait un score honorable. Ses récents démêlés judiciaires et médiatiques qui l’accusent d’antisémitisme ont cette fois eu raison de sa candidature aux élections présidentielles. Explications du comédien sur l’engagement politique et ses embûches.

Afrik : Que répondez-vous aux accusations d’antisémitisme qui ont été portées contre vous ?

Dieudonné :On a essayé de faire de moi le chantre de l’antisémitisme et presque d’ambassadeur d’Al Qaïda à Paris. Ce qui est plutôt drôle lorsqu’on sait que je me bats depuis 1997 contre le racisme à Dreux. Mes propos ont été tronqués et sortis de leur contexte. Dans une interview, j’ai effectivement soutenu qu’il n’existait pas de juifs, de Noirs, de catholiques, mais seulement des humains et que le seul peuple élu que je connaisse était celui des hommes. Je cherchais volontairement à heurter le sentiment communautariste qui est à mon sens un frein à la république. L’humanité doit être une et indivisible et chacun doit transcender son appartenance ethnique ou religieuse. Mais la presse a retenu uniquement ce qui concernait les juifs et y a vu un exemple de révisionnisme. D’où la campagne de diffamation très violente que j’ai dû essuyer.

Afrik : Quelles ont été les conséquences de cette cabale ?

Dieudonné :Cela m’a écarté des présidentielles. Nous étions parvenu à obtenir 500 promesses de parrainage et les sondages que nous avions demandés nous créditaient de 6 à 8% d’intentions de vote. La cabale est arrivée à point nommé. Dix jours avant le dépôt des signatures, 200 promesses s’étaient dédites. Sans parler de complot, je dois avouer que c’était bien orchestré. J’ai également subi d’énormes pressions professionnelles. On m’a dit que j’étais désormais grillé dans le métier et les portes de certaines émissions de télévision, importantes pour la promotion d’un spectacle, m’ont été fermées. Si je n’avais pas eu de crédit artistique, ç’aurait pu être désastreux pour ma carrière.

Afrik : Votre candidature était plus symbolique que destinée à drainer des voix. Considérez-vous votre éviction comme un échec ou votre candidature a-t-elle servi à éveiller les consciences?

Dieudonné : Je croyais possible d’emmener une dynamique en dehors des structures politiques habituelles. Mais c’est très difficile. Et très décevant car on sillonnait la France depuis un an en vue de ces élections. Mais je crois que ma candidature a été utile. Il est important qu’un citoyen, sans appartenir à aucun mouvement, s’engage et teste son accès à la tribune. Même si ça ne fait que montrer les difficultés et les multiples pressions qui s’exercent. L’engagement politique est un long parcours semé d’embûches, et j’apprends encore pour être présent dans d’autres élections.

Afrik : On vous a reproché à votre tour des revendications communautaires. Comment conciliez-vous votre combat pour les minorités avec votre volonté de transcender les communautés ?

Dieudonné : Je ne suis pas communautariste. Simplement le système me renvoie depuis toujours mon appartenance à la communauté noire qui est loin d’être un lobby. Juste un groupe d’indésirables. La communauté à laquelle j’aspire est celle des hommes, mais toutes les sensibilités doivent y être représentées et je ne voudrais pas que le continent africain soit oublié. C’est pour cela que je me bats.

Afrik : Quelle est la place de la communauté noire dans la société française ?

Dieudonné : C’est toujours la plus pauvre. Heureusement, les métissages fréquents en France font beaucoup pour l’intégration. A l’initiative des femmes, la plupart du temps. Mais je crois qu’il faut mettre en place une discrimination positive, en instaurant des quotas par exemple dans tous les secteurs de la société. C’est le meilleur moyen d’obtenir une égalité à terme. L’efficacité de la parité nous l’a assez prouvé. Même s’il y a encore du chemin à faire pour avoir une femme président.

Afrik : Vous plaidez aussi pour un plus grand équilibre des relations entre l’Europe et l’Afrique. Par quoi cela passe-t-il ?

Dieudonné : Par davantage d’éthique dans les échanges commerciaux et culturels. Les gouvernements en place sont des fantoches à la solde des intérêts économiques européens. Ce qui permet à la France en particulier de piller impunément les ressources africaines sans contrepartie financière et de fournir en armes quelques voyous qui mettent l’Afrique à feu et à sang. L’Afrique doit compter sur l’importante diaspora africaine en Europe. C’est ici que les choix politiques se font. C’est donc là qu’il faut agir.

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