Le président sénégalais est dans l’impasse. Depuis la demande que lui a faite Kofi Annan, secrétaire général de l’Onu, Abdoulaye Wade se doit de garder Hissène Habré, l’ancien chef de l’Etat Tchadien, à Dakar. Mais ce dernier a officiellement demandé aux autorités sénégalaises des documents de voyage pour lui et sa famille afin de pouvoir quitter le territoire.
L’affaire est pleine de rebondissements. Il y a six mois, Abdoulaye Wade notifiait à Hissène Habré, accusé de crimes contre l’Humanité, que le gouvernement lui retirait l’asile politique accordé par les anciens dirigeants en 1990 et qu’il était prié de quitter le Sénégal dans un délai d’un mois. Peu après, Kofi Annan demandait au président sénégalais de garder l’ancien chef d’Etat à Dakar, le temps qu’un pays demande son extradition. Quant à Hissène Habré, il avait toujours voulu jusque-là rester au Sénégal. Et pour cause, la Justice de ce pays s’était déclarée incompétente pour le juger.
La donne change
L’ancien dictateur tchadien réclame des documents afin de quitter le Sénégal. Pourquoi donc ce retournement ? En fait, il paraîtrait que Hissène Habré ne se sente plus trop en sécurité à Dakar. En effet, depuis peu, il est question, à la demande de plusieurs organisations des droits de l’Homme, que la Belgique accepte d’abriter et d’arbitrer le procès de Hissène Habré. Or Abdoulaye Wade, dans une interview accordée fin septembre à un quotidien genevois, Le Temps, avait bien précisé qu’il était prêt à remettre Hissène Habré » si un pays capable d’organiser un procès équitable le veut « .
D’après Alioune Tine, secrétaire exécutif de la Raddho (Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme), il semblerait qu’Hissène Habré ait paniqué. » Même si la Belgique n’a pas encore demandé son extradition, il sait bien que c’est une compétence universelle capable d’organiser un procès équitable « . Ne sachant pas très bien ce que va décider Abdoulaye Wade, s’il le livrera à la Justice Internationale ou pas, il préfèrerait donc assurer ses arrières et fuir ! Aujourd’hui, on parle de cinq pays capables d’accueillir l’ancien homme fort du Tchad : l’Arabie Saoudite, l’Iran, l’Irak, le Zimbabwe et la Mauritanie, qui a démenti.
Les organisations des Droits de l’Homme sont très inquiètes et attendent la réaction de Abdoulaye Wade, actuellement en visite en Belgique. S’il permet à Hissène Habré de quitter le Sénégal, les chances que ce dernier soit jugé risquent de fondre comme neige au soleil. Mais s’il s’y oppose, alors Hissène Habré aura peut-être droit à son procès.