Henriette Diabaté est une femme de tête. Dans tous les sens du terme. Intellectuelle brillante et secrétaire générale du RDR, elle continue, à 66 ans, à lutter pour un régime politique stable, juste et transparent en Côte d’Ivoire. Portrait d’une militante.
» Henriette Diabaté, c’est la Jeanne d’Arc de la Côte d’Ivoire « , clame un journaliste ivoirien. Une Jeanne d’Arc d’ébène, moderne, élégante, aujourd’hui secrétaire générale du Rassemblement des Républicains (RDR), le parti d’Alassane Ouattara. Son combat : » lutter contre l’arbitraire et l’exclusion afin de faire triompher la vérité et la transparence « .
Première Ivoirienne à accéder à un poste politique de cette envergure en 1999, elle en fut la première étonnée. Née en 1935 à Bingerville, elle baigne dans une atmosphère familiale relativement politisée. » C’était l’époque coloniale et les gens luttaient pour leur indépendance, mais jamais je n’ai pensé m’investir en politique « , avoue-t-elle.
RDR, mon amour
Pourtant, la doctoresse d’Histoire, professeur reconnu à l’Université, fait le grand saut et s’engage politiquement dans les années 80, tardivement et » par conviction « . Elle se tourne vers le RDR. » Ce parti défendait des idées qui me plaisaient et me donnait la possibilité de m’exprimer, de critiquer, d’émettre des opinions. »
Elle est appelée comme ministre de la Culture en 1990 et s’acquitte de son rôle en » technicienne « . Pourtant, cette parenthèse marque les esprits. » Elle a donné un relief à un ministère qui n’en avait pas « , explique Amadou Coulibaly, secrétaire national adjoint à la communication du RDR, qui côtoie Henriette Diabaté depuis 1994. » Elle a créé le Marché des Arts et Spectacles Africains (Masa), elle a mis en place des actions sociales pour les artistes et les musiciens. Elle a été très active. »
Elle démissionne de ce poste en 1993 lorsque le général Gueï exclut du gouvernement les autres membres du RDR. Son sacre politique arrive le 30 janvier 1999. Ce jour-là, elle est élue à l’unanimité, par acclamation, secrétaire générale du RDR, devant un parterre de supporters qui scandent son nom. Pour elle, cette nomination est d’abord le jeu du hasard et des circonstances : la démission du numéro deux du RDR, Adama Coulibaly, et le décès du secrétaire général de l’époque, Djéni Kobina.
Engagement sans faille
Lorsqu’on évoque avec elle certaines des qualités qui l’ont portée à ce poste, elle hésite, mais reconnaît sa constance et sa fidélité. » Je suis tempérée et modérée. Je travaille avec détermination mais je garde toujours la tête froide « . » C’est une boule de détermination « , confirme Amadou Coulibaly, » elle est très engagée, à la limite de l’obstination « .
Une force de caractère qui l’aide à traverser les épreuves et à en sortir grandie. Discrète, elle évoque avec réticence l’emprisonnement arbitraire de son fils, parmi d’autres membres du RDR. Elle a elle-même passé deux mois à la Maison d’arrêt d’Abidjan, emprisonnée avec plusieurs adhérents de son parti, en 1999. Militante, à la pointe du combat, elle est aussi la plus exposée. On la compare souvent à un » bouclier » pour le RDR. Ce qu’elle nie. » J’essaie de faire mon travail au mieux, c’est tout « .
Grand-mère courage
Mais Henriette Diabaté a beau clamer qu’elle est une personne » normale « , on ne peut voir dans son parcours de femme à la fois mère de cinq enfants et personnage politique qu’un exemple pour les jeunes Ivoiriennes d’aujourd’hui. Elle qui salue le courage des femmes de Côte d’Ivoire dans son célèbre livre » La marche des femmes sur Grand-Bassam « , elle a réussi à dépasser le handicap naturel d’être née fille, et à s’imposer dans la vie politique de son pays. Elle se bat aujourd’hui pour une parité, au moins partielle, au sein de son parti et de la société ivoirienne.
Les Ivoiriens l’adorent et Henriette rassemble : » Elle est adulée par les membres du RDR et respectée par ceux qui n’appartiennent pas à ce parti « , note un journaliste. Humble, elle tente de trouver une explication : » Je suis sincère, je ne suis pas une » femme politique politicienne » justement. Je suis toujours restée fidèle à mes convictions. »
La sexagénaire Henriette Rose Dagri Diabaté est repartie au combat, pas plus tard que le 3 avril. Elle a déposé, avec trois autres candidats du RDR, une requête pour l’annulation des résultats des dernières élections municipales, suite à son échec dans la commune de Port-Bouët. Son espoir : l’avènement d’un régime politique, économique et social qui réponde positivement à l’éternelle question : » Comment faire pour vivre mieux ensemble ? » Henriette est prête à donner ses réponses.