Le Maroc doit faire face à un important déficit de médecins spécialistes dans les campagnes. Le ministère de la Santé peine à combler cette « pénurie », au point d’envisager recourir à des médecins étrangers.
Par Vitraulle Mboungou
Les campagnes marocaines manquent cruellement de médecins spécialistes. Ces derniers refusent d’exercer dans les établissements publics des régions les plus enclavées du pays, cela malgré les nombreuses tentatives d’encouragement de Mohamed Cheikh Bladillah, ministre de la Santé. Pour preuve : l’appel à candidature d’embauche lancé par la direction des ressources humaines de ce ministère, et publié dans la presse nationale en septembre dernier, n’a suscité aucune réaction. Le ministère de la Santé se retrouve donc incapable de fournir les 260 médecins spécialistes dont son département a urgemment besoin.
Interviewé par le quotidien marocain, Aujourd’hui Le Maroc, Jalal Hassoun, traumato-orthopédiste et secrétaire général du bureau local du Syndicat de l’enseignement supérieur, évoque des raisons à la fois humaines et professionnelles pour expliquer le manque de motivation des médecins marocains pour travailler dans les « coins perdus » du Royaume. « Un médecin ne peut travailler dans une région où son avenir et celui de ses enfants sont compromis », explique-t-il. Ils préfèrent évidement s’installer dans les grandes villes.
Il semblerait que le départ volontaire de la fonction publique de nombreux spécialistes n’ait fait qu’aggraver la situation déjà précaire du secteur. Plus de 10% des départs, ont concernés les médecins spécialistes, soit 236 praticiens. Cette carence a été accentuée par le manque tout aussi important d’infirmiers. Aujourd’hui, le pays a un besoin urgent de près de 9 000 infirmiers, alors qu’il a laissé partir 1 183 pendant la vague de départs volontaires. Cependant, seuls 600 d’entre-eux pourront être engagés cette année par manque de postes budgétaires.
Le recours aux médecins étrangers
Selon la presse marocaine, le ministère de la Santé du Royaume envisagerait d’embaucher des médecins étrangers pour régler le problème du déficit des hôpitaux publics en personnel de santé. Beaucoup parlent des médecins d’Europe de l’Est, notamment bulgares. Un travail de prospection aurait été mené dans ces pays, où un certain nombre de spécialistes seraient prêts à venir travailler dans ces régions marocaines tant boudées par leurs homologues chérifiens.
Cette éventualité est très critiquée par les professionnels marocains, qui considèrent cette solution complètement aberrante et insensée. Le professeur Jalal Hassoun pense que le recours aux médecins spécialistes étrangers dans les régions les plus reculées du pays ne résoudra en aucune façon le problème du déficit. Selon lui, le fait que ces « médecins ne connaissent ni la langue nationale, ni la culture, ni les données épidémiologiques du pays constituent des obstacles à leur adaptation pour répondre d’une manière efficace aux besoins nationaux ».
Nombreux sont ceux à penser que le pays aurait sans doute besoin d’une politique incitative plus attrayante dans ce domaine. Ils estiment que le ministère de la Santé pourrait par exemple encourager les jeunes médecins, à s’installer dans les régions rurales en leur accordant des avantages sociaux ou des indemnités.