Nicolas Sarkozy a annoncé la future indemnisation des anciens combattants harkis, mercredi, à Paris. Le président français estime que l’Hexagone leur « doit réparation » et, pour honorer cette « dette », il a notamment demandé à son gouvernement de prendre pour les enfants de harkis des mesures de « discrimination positive ». Certains estiment toutefois que le chef de l’Etat n’a pas tenu toutes les promesses faites à la veille de son élection.
Par Awa Traoré
La France indemnisera les anciens supplétifs musulmans qui ont servi l’armée française pendant la guerre d’Algérie (1954-1962). Le président français l’a annoncé, mercredi, à l’occasion de la journée d’hommage national aux combattants morts pour la France pendant ce conflit. « Pour la France, pour moi, la cause des harkis est une cause sacrée car on ne peut pas les tenir responsables d’avoir cru en la parole de la France, a justifié Nicolas Sarkozy devant les harkis réunis à l’Elysée. Si une faute a été commise ce n’est pas par eux, c’est par la collectivité nationale qui leur a demandé de faire cela. »
« La France leur doit réparation »
Le dirigeant, qui revenait juste de sa première visite d’Etat en Algérie, a annoncé le lancement prochain d’un processus de « réparation » des quelque 400 000 harkis qui vivent dans l’Hexagone. « Pour les enfants de harkis (…) j’ai demandé au gouvernement de mobiliser tous les moyens pour mettre en œuvre une politique de formation, une politique individualisée d’accès à l’emploi, une politique d’accès au logement, une politique particulière d’accès à la fonction publique », a annoncé le président, qui souhaite les « voir plus nombreux aux postes de responsabilité administratifs, économiques, politiques, médiatiques ».
Il fait de cette « discrimination positive » une « question d’honneur », estimant que, « pendant très longtemps, les harkis n’ont pas bénéficié de mesures qui auraient permis d’assumer dignement leur insertion au sein de la communauté nationale ». En effet, à leur arrivée en France après les accords de paix d’Evian de 1962, des dizaines de milliers d’entre ont été placés dans des camps de transit où ils resteront plusieurs années. Quant aux dizaines de milliers d’autres harkis restés en Algérie après la paix, ils ont été massacrés par le Front de libération nationale (FLN), qui les considérait comme des traîtres.
Le massacre des harkis toujours pas reconnu
En ce qui concerne l’indemnisation des biens spoliés et des préjudices moraux, dont le coût est estimé à 40 milliards d’euros, Nicolas Sarkozy a souligné que le Conseil économique et social avait été saisi « pour étudier les conditions financières concrètes relatives à cette période ». Mais il a « d’ores et déjà demandé » à son équipe de lever les obstacles légaux afin que les « harkis, leurs orphelins et les rapatriés [d’Algérie] d’origine européenne » puissent souscrire à l’allocation prévue par la loi du 23 février 2005 « portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés ».
Certains regrettent toutefois que le président n’ait pas tenu la promesse qu’il leur avait faite le 31 mars, à Paris, à la veille de son accession à la magistrature suprême. « Si je suis élu président de la République, avait déclaré Nicolas Sarkozy, je veux reconnaître officiellement la responsabilité de la France dans l’abandon et le massacre des harkis ». Mercredi, il n’a rien fait de tel. Ce qui a suscité la colère de la plupart des associations de harkis.
L’association Harkis et Droits de l’Homme s’est déclarée « consternée par le camouflet infligé aux harkis et à leur famille : nous avons assisté, le mercredi 5 décembre 2007, « journée nationale d’hommage aux morts pour la France des combattants d’Afrique du Nord », à une formidable opération de communication, d’intoxication des médias, de la part du Président de la République ». L’Association justice information et réparation pour les harkis (Ajir) fait part de sa déception. « On attendait la reconnaissance de la responsabilité de la France dans l’abandon et la relégation des harkis, ce qui n’a pas été le cas, a indiqué Saïd Merabti, le président de la structure. Je pensais qu’il y aurait quelque chose d’important. Ca veut dire que le combat continue ».
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