Pour le pèlerinage à La Mecque 2006, les autorités françaises comptent distribuer aux 26 000 personnes sur le départ une brochure pour les informer sur leurs droits lors de leur voyage. En effet, chaque année, on observe des défaillances dans l’organisation et les vols. Le guide, version papier ou Internet, ne règlera pas tous les problèmes mais devrait en atténuer certains.
Cette année, une brochure de 5 pages intitulée « Pèlerinage à La Mecque, conseils pratiques » sera remise aux passagers des charters en partance pour la ville sainte. Un guide pratique, en français et en arabe, qui indique que faire avant, pendant et après le pèlerinage. Fruit d’un travail interministériel (ministères des Affaires étrangères, du Tourisme, de l’Intérieur et des Transports), il est également consultable [en ligne->
_12191/arabie-saoudite_12199/index.html].
« C’est un document provisoire, qui sera plus complet dans les années à venir », explique-t-on au Quai d’Orsay. « C’est une brochure pratico-pratique. Les conseils donnés paraissent basiques, mais la plupart des pèlerins n’y pensent pas. Par exemple, les pèlerins donnent leurs passeports aux personnes qui les accueillent sur place. Aussi nous leur conseillons d’avoir une deuxième pièce d’identité et de ne pas laisser leur billet d’avion. De plus, si l’on a un accident et que l’on se retrouve à l’hôpital, en état de choc, il vaut mieux avoir sur soi un numéro de téléphone à joindre en France ou le nom du chef du groupe. »
« Le risque zéro n’existe pas »
L’année dernière, le pèlerinage à La Mecque s’était mal terminé pour près de 3 000 des 22 000 personnes parties de France. Elles étaient restées coincées pendant une semaine au moment du retour à cause d’une défaillance d’un affréteur et quatre d’entre elles avaient trouvé la mort. « Il n’y a pas eu de situations dramatiques. Ces personnes sont mortes de mort naturelle. Chaque année, malheureusement, il y a entre 5 et 6 décès », précise-t-on au Quai d’Orsay. L’Arabie Saoudite avait dû réquisitionner des avions de la Saoudia, la compagnie nationale, pour mettre en place des vols spéciaux et exceptionnels. « D’une manière générale, le pèlerinage se passe bien. L’année dernière est un mauvais exemple à ne pas suivre. » L’Etat français, qui ne participe pas à la structuration du pèlerinage, a tenu des discussions avec les représentants du Conseil français du culte musulman (CFCM) pour tenter d’améliorer les choses.
« Le risque zéro n’existe pas. De plus, nous ne maîtrisons pas la totalité du processus en Arabie Saoudite, nous ne pouvons pas contrôler les conditions d’hébergement sur place, qui ne sont pas toujours le fait d’hôteliers… Les pèlerins, âgés, se retrouvent chez des marchands de sommeil ou dans des dortoirs, c’est un phénomène classique. Le premier problème, c’est le manque d’information des pèlerins. C’est une clientèle largement ignorante de ses droits. Cette brochure, tirée à 20 000 exemplaires, ne résoudra pas tous les problèmes mais elle peut en atténuer certains. »
26 000 pèlerins
Selon les chiffres fournis par l’Arabie saoudite, les prévisions du ministère du Hadj pour 2006 font état de 26 000 pèlerins, dont 6 000 de nationalité française et de Français de Mayotte, et 17 000 de bi-nationaux ou d’étrangers (en majorité d’origine maghrébine et turque et quelques Africains subsahariens). Les pèlerins font partie de la classe moyenne, leur âge minimum est de 40-45 ans et il y a beaucoup de retraités. On note que le nombre de Français qui effectuent le pèlerinage n’est pas vraiment en augmentation, contrairement à celui des étrangers. En 2001, on comptait 7 000 Français parmi les 18 000 pèlerins. « Du 1er au 30 janvier 2006, trois agents français, qui ont accès au site, seront à disposition sur place, joignables à tout moment à l’hôtel Mercure. Le personnel du consulat est mobilisé entièrement 24h/24, sur la ville et à l’aéroport », rassure le ministère des Affaires étrangères.
« La plupart des problèmes se passent au retour, car si les arrivées sont progressives, les pèlerins veulent tous repartir le même jour ce qui provoque un engorgement. » Autre gros problème : un tiers des voyages sont commercialisés par des agences commerciales et deux tiers par le monde associatif musulman. « Certaines organisations culturelles organisent des voyages sans aucunes garanties. Elles doivent aligner leurs standards sur ceux des voyagistes les plus sérieux. En 2006, nous souhaitons aider les associations musulmanes à acquérir plus de professionnalisme, car on ne s’improvise pas voyagiste, surtout quand il s’agit de voyages à forfait, et surtout quand cela concerne un aussi grand nombre de gens. Les représentants du CFCM sont d’ailleurs tout à fait d’accord avec ça », explique un cadre du ministère des Transports.
Pas de liste noire
Il n’existe pas encore de liste « noire » de ces associations, par « manque de preuves et manque de plaignants ». « Certaines associations se créent juste pour l’occasion et disparaissent. Les gens ont des moyens de recours mais ne les utilisent pas, par peur d’annuler l’effet du pèlerinage. Il y a un début de changement car les enfants qui paient le voyage à leurs parents se plaignent lorsque ceux-ci n’ont pas été bien traités. » Un cadre du Quai d’Orsay précise que si « le pèlerinage sert à gagner le paradis, il sert aussi à gagner beaucoup d’argent ». « Un forfait pèlerinage coûte entre 1 800 et 3 500 euros. Le chiffre d’affaires du pèlerinage dépasse les 50 millions d’euros. Le prix du voyage en France est en-dessous de ceux pratiqués dans d’autres pays d’Europe, ce qui peut expliquer la moins bonne qualité des prestations. Avec 2 millions de pèlerins chaque année, cela représente 4 milliards d’euros. C’est un enjeu économique très important. » Il n’y a pas de liste noire non plus pour les charters. « C’est notre idée mais on ne peut pas discriminer, on est dans une économie libre et une démocratie ! On peut juste faire des recommandations », regrette-t-on au ministère des Transports. « C’est un marché de dernière minute, c’est dans les 8 jours précédant les premiers départs que les demandes d’affrètement augmentent et c’est la pagaille. Il faut rationaliser la commercialisation des produits. Grâce à la brochure, c’est la première fois que les pèlerins seront informés sur leurs droits en cas de litige : il y aura sûrement des retombées. »
Une représentante de la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC) explique : « Nous recevons les demandes des compagnies aériennes qui veulent organiser des vols sur La Mecque. Elles doivent déposer un dossier en précisant le type d’appareil, le nom de l’affréteur, le nombre de passagers, le contrat d’affrètement… Pour le moment, nous avons reçu 5 demandes : Saoudia, Yémen Airways, Royal Jordanian, Nouvel Air et Egypt Air. Toutes sont autorisées pour le moment sauf Nouvel Air, dont le dossier est en vérification. Ça se présente bien au niveau du transport et onze aéroports sont concernés ». Les premiers vols sont prévus le 15 décembre. Le pèlerinage prendra fin le 11 ou 12 janvier, les gros départs auront lieu autour du 20 et les derniers vers le 25.