Le chef de l’Etat guinéen, Moussa Dadis Camara, a invité une énième fois, mardi après-midi, les partis politiques, les représentants des institutions internationales et les diplomates à une rencontre au palais du peuple. Mais cette fois, les poids lourds de la classe politique guinéenne ont boycotté le rendez-vous. Reportage.
Notre correspondant en Guinée
Mardi après midi, contrairement aux précédentes rencontres au palais du peuple, il y avait deux groupes de jeunes présents à la rencontre organisée par le chef de la junte. Les uns soutenant ouvertement Dadis et la tenue des élections en 2010, les autres apparemment plus nombreux défendant tout aussi ouvertement le respect du chronogramme des forces vives. Ce chronogramme prévoit la tenue des élections à la fin 2009. En plus de ces jeunes, il y avait une foule de femmes (les balayeuses de Conakry), massée au balcon, dont on dit qu’elle a été mobilisée par le gouverneur de la ville de Conakry. La tension entre les deux groupes était tellement vive dans la salle que certains redoutaient le pire.
Mais il avait été mobilisé un dispositif de sécurité imposant, voir effrayant. Tout le palais, de l’intérieur et de l’extérieur, était ceinturé par les forces de sécurité. Cette fois, les militaires avaient l’air particulièrement nerveux. Dans la salle, le groupe de jeunes hostiles à 2010 avait été particulièrement contrôlés. Même la presse, de son côté, a reçu des propos hostiles de la part de certains gardes présidentielles. » Aujourd’hui, si quelqu’un manifeste, qui qu’il soit, on va… des connards comme ça ! », a-t-on lancé à la figure des journalistes. Et un autre militaire de renchérir: » Celui qui pagaille aujourd’hui, on va pagaille sur lui… » C’est donc dans ce climat de menace que l’intervention du chef va commencer.
Après les menaces, Dadis fait signe d’ouverture
Par ailleurs, dans son exposé, le chef de l’Etat a été très remonté de voir les ténors de la classe politique bouder sa rencontre. Il s’agit entre autres de Sidya Touré de l’UFR, Alpha Condé du RPG, Cellou Dalhein Diallo de l’UFDG, Jean Mari Doré de l’UPG.
Dans la salle, on notait la présence des représentants des institutions, des diplomates et de certains leaders politiques, pour la plupart des nouveaux. A l’image de l’ancien premier ministre Lansana Kouyaté, Mamady Diawara, ancien député de l’ex parti au pouvoir, le PUP, était présent.
En fait, les leaders politiques qui ont boudé la rencontre, avaient la veille adressé une correspondance au chef de l’Etat sollicitant de lui un cadre plus approprié, restreint pour permettre des échanges fructueux concernant le chronogramme des élections. Par cette stratégie, ils souhaitaient également échapper à d’éventuelles huées des groupes de jeunes et de femmes hostiles au chronogramme des forces vives.
Dans la salle, ayant compris que cette fois-ci, les jeunes étaient divisés, le capitaine a déclaré : » jeunesse, évitez qu’on vous manipule, sinon c’est vous qui allez perdre. .. Cela est dangereux. Je connais la guerre plus que vous. Ce qui amène la guerre ce sont les élections… » Poursuivant, Moussa Dadis Camara dira que cette absence volontaire des forces vives est une façon de tuer la démocratie, c’est un sabotage. Toutefois, il a réitéré sa volonté de respecter le chronogramme proposé par elles.
En signe d’ouverture, le chef de l’Etat s’est dit prêt à rencontrer les forces vives où elles veulent, « même à Djakarta ». Seulement, il leur donne une semaine. Pas plus. Cependant, le groupe des forces vives n’a pas lui aussi dit son dernier mot. Les jours qui suivent nous en diront un peu plus.