L’Union européenne réclame des poursuites judiciaires pour crime contre l’humanité. Washington exige l’ouverture d’une enquête internationale. La CEDEAO demande la mise en place d’une autorité de transition. La Cour pénale internationale ouvre un « examen préliminaire ». Deux semaines après le massacre du 28 septembre, le capitaine Moussa Dadis Camara est plus que jamais dans le collimateur de la communauté internationale. L’Union africaine devrait décider samedi de sanctions à son encontre s’il ne venait pas à renoncer à la présidentielle de janvier.
Les pressions internationales s’accroissent contre le capitaine Moussa Dadis Camara . Le massacre du 28 septembre à Conakry, où plus de 150 civils ont été tués et 1200 blessés selon l’Onu (57 tués selon les autorités guinéennes), est au centre d’une réunion du Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l’Union africaine (UA), jeudi en Ethiopie. Dans les prochaines 48 heures, le CPS devra en outre se prononcer sur des sanctions à l’encontre des responsables militaires guinéens, au terme de l’ultimatum lancé par l’UA au chef de la junte, le 18 septembre, pour qu’il s’engage par écrit à renoncer (ainsi que son mouvement, le CNDD) à la présidentielle de janvier.
La CEDEAO dénonce des «tueries brutales »
Les chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) doivent tenir, de leur côté, un sommet samedi prochain à Abuja, au Niger, pour étudier les moyens de faire pression sur la junte militaire. A l’issue d’une réunion du Groupe international de contact sur la Guinée (GIC-G), lundi 12 octobre, la CEDEAO avait clairement dénoncé « les tueries brutales » du 28 septembre, réclamant le retrait du CNDD de Dadis Camara et l’ouverture d’une enquête internationale. L’organisation a également demandé la mise en place d’une autorité de transition pour préparer les élections de janvier prochain.
L’Union européenne parle de « crime contre l’humanité »
L’Union européenne réclame de son côté des poursuites judiciaires contre Dadis Camara. Pour crime contre l’humanité. « Quand il y a des crimes contre l’humanité, il faut que ces crimes soient jugés (..) s’il y a une justice criminelle internationale, elle doit aussi être universelle, c’est une question de crédibilité !», a chargé le Commissaire au développement de l’Union européenne, Karel de Gucht, mercredi, depuis Addis Abeba.
Même son de cloche à Washington, où l’on réclame le départ du capitaine Dadis Camara et l’ouverture d’une enquête internationale. «Nous faisons pression pour qu’apparaisse une meilleure gouvernance, pour que la corruption soit traitée. C’est aujourd’hui notre objectif principal en Guinée », a déclaré un porte-parole du département d’État.
La CPI lance un «examen préliminaire »
Le bureau du procureur de la Cour pénale internationale a indiqué jeudi qu’un « examen préliminaire » de la situation en Guinée était en cours pour déterminer si des crimes relevant de la compétence de la CPI ont été perpétrés.
Le conseiller du capitaine Camara, Chérif Idriss, a rejeté, dans une intervention sur France 24 jeudi, l’accusation de « crime contre l’humanité », estimant qu’« il faut laisser faire l’enquête et établir les faits avant de condamner les gens ». Des déclarations américaines, le conseiller du chef de la junte s’est dit « indigné », estiment qu’elles risquent de faire « basculer l’unité nationale ». Dadis Camara, qui a toujours nié avoir donné l’ordre aux soldats de tirer lors de la manifestation au stade de Conakry, avait appelé à une « commission d’enquête internationale en rapport avec l’ONU » au lendemain du massacre.
L’attitude de la chine, qui n’a pas jugé bon de se joindre à ce concert de réprobation internationale contre Dadis Camara, suscite des critiques. Accusée de voler au secours de la junte militaire à coups d’investissements faramineux, Pékin a défendu jeudi sa coopération avec la Guinée. « Notre coopération est basée sur l’égalité et le bénéfice mutuel. Elle est en accord avec les normes internationales et les intérêts fondamentaux des deux peuples », a déclaré un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. Selon Le Figaro, la China International Fund (CIF), alliée au pétrolier public angolais Sonangol, s’apprête à investir 7 à 9 milliards de dollars dans des projets miniers, pétroliers et d’infrastructure en Guinée au cours des 5 prochaines années. Le protocole d’accord a été signé le 9 octobre, 11 jours après la répression sanglante de Conakry.