Les négociations entre les syndicats et le gouvernement guinéen, qui sont pour l’heure suspendues, ont été relancées, mardi, grâce à l‘intervention de l’épouse du Chef de l’Etat guinéen, Henriette Conté. Que peut faire la première dame guinéenne, quand la rue ne souhaite que le départ de son mari ?
« Nous avons été sensibles aux propos tenus par la première dame à l’issue de la rencontre. Nous nous sommes rendus compte qu’elle est la seule au sommet de l’Etat à maîtriser les réalités de notre mouvement ». Ces propos du secrétaire général de l’Union syndicale des travailleurs de Guinée (USTG) faisaient suite à une réunion qui s’est tenue dimanche dernier en présence d’Henriette Conté, l’épouse du chef de l’Etat guinéen. Cette réunion avec les leaders syndicaux, la première dame l’avait souhaité afin de trouver des solutions pour sortir le pays de la grave crise politique qu’il traverse depuis le 10 janvier dernier, date à laquelle l’Inter-syndicale guinéenne a déclenché sa grève générale. Madame Conté, qui a dit vouloir « personnellement » s’impliquer dans la résolution de la crise, a convaincu les syndicalistes de reprendre le dialogue. En dépit, des évènements sanglants de lundi dernier, une trentaine de morts en une seule journée, elle a obtenu leur accord.
La femme providentielle ?
Mardi, les leaders du mouvement social guinéen devaient rencontrer le couple présidentiel, mais c’est Henriette Condé qui s’est présentée au Camp Samory sans son président de mari. « Reprenez le dialogue, s’il vous plaît » aurait-elle plaidé. Les syndicalistes ont accepté. Les pourparlers auxquels ont pris part les chefs religieux ont redémarré, ce mercredi, et sont pour l’instant suspendus pour permettre aux réprésentants de l’Etat d’en référer à leur hiérachie. Madame Conté a donc relancer le dialogue. Serait-elle devenue « la femme providentielle», elle qui avait déjà fait savoir qu’elle mettrait tout en œuvre pour trouver des solutions à cet impasse politique. Une intervention légitime ? « La question se pose moins en termes d’efficacité que de légitimité, estime Pierre Fofana, président du Conseil supérieur des Guinéens de France. Elle semble avoir été efficace puisque les syndicalistes ont accepté sa proposition. Chacun a le droit de proposer sa médiation. Elle a été toujours très présente dans la vie politique guinéenne. C’est une première dame qui est très populaire, une personnalité forte qui mène beaucoup d’actions humanitaires.»
Pour Paul Moussa Diawara, le directeur de la rédaction du site Aminata.com, son intervention participerait d’une stratégie de Lansana Conté dont l’objectif est de « conduire à l’essoufflement du mouvement (syndical) et (lui) permettre de reprendre la main ». Dans cet ensemble, explique-t-il dans un article publié ce vendredi, Henriette Conté « ménage l’Inter-Centrale, l’invite à tout moment, l’occupe », jouant ainsi « actuellement, un rôle clé dans la tentative de (désamorcer) la grève générale ». Une requête a en effet présentée, mardi, dans ce sens aux syndicalistes. Ces derniers lui ont cependant signifié qu’il n’en était pas question tant que leurs revendications ne seraient pas satisfaites. La démarche de Mme Conté doit plutôt, selon Pierre Fofana, être perçue comme « une volonté (du président) d’ouvrir le dialogue. Tout dépendra de l’accueil qui lui sera fait, il semble pour l’instant favorable. La tentative relève moins de la stratégie que de la nécessité de faire face à une urgence.» Et si jouer sa Dame de cœur était la seule concession que Lansana Conté était prêt à faire ? Car satisfaire les doléances des syndicats, qui réclament un nouveau Premier ministre et des élections transparentes, reviendrait d’une manière ou d’une autre à renoncer au pouvoir. Un point sur lequel le président guinéen, même très malade, ne semble pas prêt à céder.