Le porte-parole du Comité national de défense des droits des chômeurs, Tahar Belabès, est formel. Des jeunes du Sud algérien sont récemment partis combattre au Mali.
La colère, le chômage et la détresse les aurait poussé au Djihad. Tahar Belabès, le porte-parole du Comité national de défense des droits des chômeurs (CNDDC), en est convaincu. De jeunes Algériens partiraient combattre au Nord-Mali. « Je connais des personnes, de Ouargla et d’autres régions du Sud, qui sont parties au Mali, après le déclenchement de la guerre, pour participer aux combats », a-t-il affirmé au quotidien électronique Tout Sur l’Algérie.
Révoltés contre le pouvoir algérien, les jeunes du Sud, en proie à des difficultés sociales, exprimeraient leur colère en rejoignant les groupes armés et de contrebande au Mali selon le porte-parole du CNDDC.
Un avis que ne partagent pas certains députés du Sud, à l’instar d’Ali Hamel, député du FLN pour la wilaya (région) d’Adrar. « A ma connaissance, il n’y a pas de jeunes d’Adrar qui soient partis combattre au Mali. Pour les autres wilayas, je ne sais pas ». Député du FLN pour la wilaya de Tamanrasset, Mohamed Guemama estime que « cette information n’est pas fondée ». Il met un point d’honneur sur les « liens familiaux » qu’entretiennent les Algériens du Sud « avec les Touareg du Mali, du Niger, de la Mauritanie et de la Libye », mais « un Algérien reste un Algérien, et un étranger reste un étranger », s’insurge-t-il.
Selon Lies Boukraa, le directeur général du Centre africain d’études et de recherches sur le terrorisme (CAERT), basé à Alger, « des jeunes venus de différents pays du Maghreb combattent (…) en Syrie » (Magharebia.com). Pourquoi pas au Mali, un pays voisin ?
L’art de contourner
Ce dernier estime que les problèmes de chômage et autres problèmes sociaux ont d’abord existé au Nord et non au Sud. D’après lui, ce problème existe même partout ailleurs : « en France, en Russie et aux Etats-Unis ». Plutôt que de reconnaître les problèmes qui existent sur leur propre territoire, les politiques, de manière générale, ont cette fâcheuse habitude d’exporter ou de transformer un problème local en un problème nationale, voire internationale.
L’appel à l’aide lancé par les jeunes du Sud remonte à 2004, notamment avec la formation du « Mouvement des enfants du Sud pour la justice ». Sous la houlette de Belabès, des milliers de jeunes sont sortis dans les rues de Ouargla. Leur message était on ne peut plus clair. Que l’Algérie n’est pas seulement Alger, et pour réclamer de l’emploi. Le mouvement qui, selon Dahou Ould Kablia, le ministre de l’Intérieur, « a humilié l’Algérie à l’étranger », a sévèrement été réprimé. Une politique de diabolisation a été entreprise à son encontre. Certains, à l’image de Tahar Belabès ont continué pacifiquement le combat, d’autres le poursuivraient avec les armes.
Attentats de révolte
Ces jeunes qui se seraient radicalisés ont pour cible « les symboles économiques de la région » du Sud. « Leur première action était une attaque contre un avion d’Air Algérie, à l’aéroport de Djanet », rappelle Belabès. Le gouvernement s’est alors décidé de prendre les choses en main. Une politique de réconciliation locale a été entreprise. Les jeunes du Sud ont accepté de déposer les armes. Sauf que par la suite, aucun suivi n’a été engagé.
Le militant rappelle également que l’attentat suicide contre le commandement de la gendarmerie à Ouargla, en juin 2012, n’était pas l’œuvre d’un islamiste mais d’un jeune qui s’est révolté contre la « hogra » (oppression), a confirmé Lies Boukraa, le directeur général du Centre africain d’études et de recherches sur le terrorisme (CAERT), basé à Alger.
En marginalisant sa politique économique dans certaines régions du Sud, l’Algérie contribue-t-elle à forger sa jeunesse au djihadisme ?