À Goma, le maire impose la fermeture des petits commerces après 17h pour lutter contre l’insécurité. La décision suscite des protestations et des inquiétudes parmi les commerçants.
Dans la ville de Goma, située dans l’est de la République Démocratique du Congo (RDC), une nouvelle mesure fait polémique. Le maire, Faustin Kapend, a récemment annoncé l’interdiction des activités de change, de transfert d’argent, et de vente de cartes prépayées après 17h, en réponse à la montée des actes criminels. Si cette décision vise à renforcer la sécurité dans une région marquée par l’insécurité, elle suscite de vives réactions parmi les commerçants et la société civile.
Une décision pour lutter contre l’insécurité grandissante
La ville de Goma fait face depuis plusieurs mois à une recrudescence de la criminalité. Braquages en pleine journée, meurtres et violences ciblées contre les opérateurs économiques sont devenus monnaie courante. Pour tenter de freiner cette vague d’insécurité, le maire de la ville a imposé une restriction stricte : la fermeture des petits commerces à partir de 17h. Selon les autorités, cette mesure vise à protéger non seulement les commerçants, mais aussi la population qui est fréquemment la cible de criminels armés.
Cependant, cette décision ne fait pas l’unanimité. Les petits commerçants, notamment les cambistes et les vendeurs de cartes prépayées, se retrouvent dans une situation délicate. Nombre d’entre eux dépendent des transactions réalisées après 17h pour leur survie économique. « Nous payons des taxes, et nous avons le droit d’être protégés à tout moment, pas seulement avant 17h », proteste Baingana Bidogo Augustin, représentant des vendeurs de produits de télécommunication. Les commerçants estiment que cette mesure les expose davantage aux extorsions de la part des forces de l’ordre et à d’éventuels abus.
Des risques d’extorsion et d’abus de pouvoir
Francis Mutombo, porte-parole de l’association des cambistes au Nord-Kivu, partage ces craintes. Selon lui, la mise en œuvre de cette décision pourrait conduire à des dérapages de la part des agents de sécurité, souvent accusés d’abuser de leur autorité. Il avertit notamment sur le fait que les forces de l’ordre devraient recevoir des instructions fermes afin qu’il n’y ait point d’abus dans l’application de cette mesure. L’inquiétude est grande quant à la manière dont la sécurité sera renforcée sans tomber dans des pratiques d’extorsion ou de harcèlement.
Du côté de la société civile, des voix s’élèvent pour demander des mesures complémentaires. Christian Kalamo, président de la société civile de la commune de Karisimbi, appelle à une interdiction de la circulation des militaires en dehors des heures de service. Il souligne que la présence massive de soldats en dehors des casernes contribue à l’insécurité, particulièrement dans les quartiers sensibles de Goma. En janvier dernier, le maire avait déjà pris des mesures similaires en interdisant la circulation des motos au-delà de 18h, mais les violences avaient continué, poussant les autorités à chercher d’autres solutions.
Vers un dialogue avec les commerçants ?
Malgré les tensions, certains acteurs locaux appellent au dialogue. Si la décision du maire a pour objectif de renforcer la sécurité, une communication plus approfondie avec les commerçants et la population est réclamée pour expliquer les bienfaits de cette mesure. « Il est nécessaire d’engager des discussions pour éviter que cette restriction ne soit perçue uniquement comme une contrainte supplémentaire, mais bien comme une mesure de protection collective », soutiennent plusieurs associations de commerçants.