L’écrivain universitaire français Gilles Perrault a créé un » Groupe de travail sur la Tunisie « , GTT. Ce groupe est né de la conviction partagée par ses membres, Mgr. Jacques Gaillot, l’éditeur François Gèze, William Goldberg, président de la LDH du Rhône et le professeur Albert Jacquard, universitaire, que les » Tunisiens méritent bien mieux que le sort qui leur est fait depuis plus d’une décennie « .
Afrik.com : Pourquoi avez-vous crée l’association » Groupe de travail sur la Tunisie » ?
Gilles Perrault : Nous voulons aider nos amis démocrates tunisiens à reconquérir la démocratie. Le Groupe de travail sur la Tunisie suit avec inquiétude les menées du gouvernement tunisien en vue de mettre la main sur la Ligue tunisienne des droits de l’Homme. Maintenant que celle-ci a été mise sous séquestre par le pouvoir, il apparaît plus que jamais que M. Ben Ali ne tolère pas le moindre espace de liberté ou d’autonomie.
Afrik.com : Quel est l’état de santé de la démocratie en Tunisie ?
G.P. : Le peuple tunisien est au seuil d’une déferlante répressive comparable à celle des années 1990. Nous serons là pour lui témoigner notre sympathie et notre solidarité agissante.
Afrik.com : Justement, quelle est la nature de cette solidarité agissante ? Que pouvez-vous faire réellement ?
G.P. : Nous oeuvrons notamment auprès du Parti socialiste, en France, pour la suspension du RCD, au pouvoir à Tunis, de l’Internationale socialiste et de toutes les instances similaires. Le professeur Schwartzenberg, en sa qualité de député européen, fait des pressions au niveau du Parlement européen pour que le régime tunisien cesse ses harcèlements contre les démocrates. Le Parlement européen est plus que préoccupé par la situation des droits de l’Homme en Tunisie.
Afrik.com : Comment peut-on définir le régime tunisien ?
G.P. : C’est un régime dictatorial et policier. Il n’y a qu’à voir la presse tunisienne pour tout comprendre.
Afrik.com : Y a-t-il une différence entre la Tunisie de Ben Ali et celle de feu Bourguiba ?
G.P. : Ben Ali est un petit homme, il est humiliant pour les Tunisiens. Bourguiba n’était pas un dictateur-gorille. Il avait le statut de Guide suprême même si en fin de règne, on ne pouvait pas parler de modèle de démocratie.
Afrik.com : Avez vous suivi l’affaire de Youssoufi au Maroc et l’interdiction de trois journaux marocains ?
G.P. : Cette affaire me laisse très sceptique. Il est clair que la bonne réponse n’est pas d’interdire les journaux. Sur le fond de l’affaire, j’ai beaucoup de réserves.
Afrik.com : C’est-à-dire ?
G.P. : Jusqu’à preuve du contraire, l’auteur de la lettre, Fkih Baasri, n’a pas authentifié la lettre qui accuse les actuels dirigeants socialistes marocains de complicité avec le général Oufkir dans sa tentative d’assassinat du roi Hassan II, en 1972.
Afrik. Com : Abraham Serfaty affirme que cette lettre est authentique et que l’auteur ne peut pas mentir.
G.P : J’ai un grand respect pour Abraham Serfaty. Mais je vois mal comment Fkih Basri, que je connais, pouvait être au courant de cette soi-disant conjuration. Fkih n’était pas influent dans l’opposition marocaine à l’époque. Dans les milieux de l’immigration, il ne peut pas être qualifié d’élément actif. L’opposition se faisait à Paris et lui était plutôt réfugié dans les pays arabes.
Gilles Perrault est notamment l’auteur d’un ouvrage sur feu Hassan II, roi du Maroc intitulé » Notre ami le roi « .