Le président américain a donné « quelques semaines » au Soudan pour accepter une force militaire mixte des Nations Unies et de l’Union Africaine au Darfour. Si le gouvernement de Khartoum persiste à bloquer ce déploiement, George Bush le menace de sanctions. Certains responsables politiques préfèreraient que des mesures répressives soient appliquées dès maintenant.
« Le monde doit agir. Si le président Béchir ne remplit pas ses obligations, les Etats-Unis agiront ». Après quatre ans que dure le drame du Soudan, le président américain s’est déclaré excédé. Il l’a fait savoir mercredi, lors d’un discours ferme au Musée américain de l’Holocauste. George W. Bush fustigeait l’attitude de Khartoum, qui n’a toujours pas accepté le déploiement d’une force mixte des Nations Unies et de l’Union Africaine (UA), prévu dans une résolution onusienne de 2006. Arrivé, semble-t-il, au bout de sa patience, il a toutefois laissé une « dernière chance » au pays pour répondre « aux efforts du secrétaire général (des Nations Unies, ndlr), et satisfaire aux justes exigences de la communauté internationale ». D’après le porte-parole du département d’Etat américain, Sean McCormack, Khartoum a « quelques semaines pour mettre ne œuvre l’accord qu’il a signé ».
L’option diplomatique privilégiée
Ces menaces interviennent alors que le Soudan a fait un effort lundi. Après des mois de négociations, il a finalement donné son feu vert au déploiement de 3 000 soldats de l’Onu et de six hélicoptères de combat, qui auront pour mission de soutenir les quelque 7 000 soldats de l’UA. Pas assez, selon la première puissance du monde. Elle attend de voir si cet accord se traduira dans les faits et souhaite que le président Omar el Bechir approuve le renforcement de cette force « hybride », qui devrait à terme compter 20 000 hommes. Si le pays ne se conforme pas à ces injonctions, il risque de faire l’objet de sanctions, notamment économiques.
« J’examine également le type de mesures que pourrait prendre la communauté internationale pour que le gouvernement du Soudan ne puisse pas faire survoler le Darfour par ses avions militaires, et si nous n’observons pas de signes de bonnes intentions, nous envisagerons des (…) mesures encore plus rigoureuses », a expliqué George Bush. Dana Perino, une porte-parole de la Maison Blanche, a précisé qu’elle n’a pas « entendu que la question ait été discutée en termes d’options militaires [et que] le président croit que ceci peut être réglé diplomatiquement ».
Pourquoi attendre ?
Selon le premier ministre britannique, qui s’est exprimé mercredi, les Américains et les Britanniques vont s’entretenir ce jeudi sur une nouvelle résolution de l’Onu sur le Soudan avec le Conseil de Sécurité. Tony Blair a précisé que le texte viserait notamment à faire accepter le déploiement de la force mixte, à punir les auteurs de violences et intensifier la surveillance aérienne. D’autant qu’un récent rapport de l’Onu accuse le Soudan de peindre ses avions aux couleurs des Nations Unies pour bombarder le Darfour. Un rapport, qualifié de faux par Khartoum, qui indique par ailleurs que le gouvernement viole l’embargo sur les armes dans le Darfour.
Réagissant à l’ultimatum américain, le ministre soudanais des Affaires Etrangères, Lam Akol, a déclaré dans une interview que les Etats-Unis et la Grande-Bretagne devraient s’attacher à financer les soldats de l’UA qui manquent de moyens. Les représentants de la Chine, de la Russie et de l’Afrique du Sud ont pour leur part déclaré à des journalistes à New York que le moment était mal choisi pour parler de sanctions alors que le Soudan vient d’accepter 3 000 casques bleus.
Aux Etats-Unis, certains prônent une action immédiate contre le régime d’El Béchir. « Les mesures annoncées par M. Bush, combinées à l’engagement sporadique des diplomates américains dans cette crise, ne vont que renforcer la perception de Khartoum selon laquelle les Etats-Unis ne sont pas prêts à des mesures décisives pour arrêter le génocide », a estimé Barack Obama, sénateur démocrate et candidat à la présidentielle de 2008. « Au lieu de menaces, il faut agir maintenant », a conclu pour sa part le présidentiable Joseph Biden, président de la commission des Affaires Etrangères du Sénat.