Adama Barrow, Président de la Gambie depuis tout juste un an, semble entretenir le flou autour du respect de sa promesse de diriger un gouvernement de Transition, avant d’organiser des élections au bout de trois ans. Suffisant pour que des Gambiens voient en lui un Yahya Jammeh bis, avide pouvoir.
Alors que la Gambie célèbre un double anniversaire, ce dimanche 18 février 2018, l’incertitude plane et la colère enfle chez les populations. La commémoration de son indépendance acquise le 18 février 1965, par cette ancienne colonie britannique, couplée à l’anniversaire de la prestation de serment du nouveau chef de l’Etat, Adama Barrow, en 2017, soulève nombre d’inquiétudes. Pourquoi ?
Pour se faire élire, le candidat Barrow avait accepté un accord des partis de coalition d’opposition, qui lui prévoyait seulement 3 ans au pouvoir, en lieu et place des 5 ans d’un mandat normal. Lors d’un congrès exceptionnel tenu en fin 2016, sept partis d’opposition prennent l’option d’affronter Yahya Jammeh avec un candidat unique. Le congrès d’opposants décide alors que s’il est élu, le candidat de l’opposition ferait un mandat de trois ans avant d’organiser une Présidentielle anticipée pour remettre tous les partis sur la ligne de départ de la course au palais.
Sauf qu’après un an passé au sommet de l’Etat, Barrow semble avoir pris goût au pouvoir. En effet, appelé à gouverner juste le temps de jeter les bases de la transition, avant d’appeler à de nouvelles élections pour que chaque parti puisse présenter son propre candidat, Barrow, selon RFI, insiste : « Mais la Constitution indique 5 ans », avant d’ajouter que « ce sera au peuple gambien de décider, on lui demandera son avis ».
Adama Barrow, selon certains Gambiens, cultive le doute et l’ambigüité sur sa promesse de ne faire que 3 ans au State House, le palais présidentiel, synonyme d’une trahison politique de l’accord entre opposants par l’ex-candidat. Si certains membres de son gouvernement de coalition sont même d’avis que Adama Barrow doit rester au pouvoir un mandat entier, d’autres voient ce revirement comme une trahison de l’accord qui a permis à Adama Barrow d’accéder au pouvoir. Le flou est aussi total sur la limitation du nombre de mandats.
Entre autres griefs des autres partis de la coalition, la nomination « anticonstitutionnelle » de sa Vice-présidente, la traque des biens et proches de Yahya Jammeh. Mieux, certains rappellent qu’avec l’arrestation de l’universitaire Ismaila Ceesay pour « incitation à la violence » pour une interview, la traque des dignitaires de l’ancien régime qui a épargné des soutiens du nouveau Président, les interdictions de marches, Adama Barrow suit les pas de Yahya Jammeh.
Les suspicions sont d’autant plus grandes que l’accord de la coalition prévoyait aussi d’inscrire dans la Constitution une limite de deux mandats présidentiels. Réforme qui n’a pas encore été réalisée par le nouveau chef de l’Etat de ce pays d’Afrique de l’Ouest.