Gabon : Makaya, le poil à gratter de Brice Oligui Nguema


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Moi Makaya
Moi Makaya

Depuis plusieurs mois, un compte baptisé « Moi, Makaya », en référence à une célèbre chronique dans la presse, agite la sphère politique gabonaise. Mais qui est Makaya ? Et que cherche-t-il ?

Son nom rappelle forcément aux plus anciens une chronique du quotidien gabonais L’Union, dans lequel un billet intitulé « Makaya » égratignait chaque matin la classe dirigeante gabonaise, dans les années 1970 et 1980. La chronique existe toujours, mais on est loin de l’époque bénite du journal gabonais. Makaya, pour résumer aux plus jeunes, c’était le citoyen gabonais lambda. Mais Makaya, c’était avant tout une façon pour n’importe quel Gabonais de se mettre au même niveau que les gens « d’en haut ». Makaya étrillait alors les hauts fonctionnaires, les ministres et les « Mamadou » — comprendre ceux qui profitaient du système. Alors, forcément, voir réapparaître un Makaya version 2.0 sur X (ex-Twitter) et d’autres réseaux sociaux marque les anciens fidèles de L’Union.

Lorsqu’on lui écrit, Makaya répond de façon quasi instantanée. Mais pour lui parler, il faut suivre un véritable parcours du combattant dont lui seul décide. Même en privé, il reste mystérieux et aime parler de lui à la troisième personne. Lorsqu’il utilise la première, c’est pour utiliser la célèbre formule « Moi, Makaya ».

Et s’il aime jouer le rôle de « poil à gratter du nouveau régime gabonais », comme il le dit lui-même, il semble assez susceptible. Lorsqu’on lui rappelle que le Makaya des années 70-80 préservait toujours le président de la République, lui assure qu’il ne se fixe aucune limite. « À l’époque, le Président était intouchable. Mais en 2024, il est loin d’être au-dessus de tout soupçon et doit être considéré comme faisant partie du système. Les ‘Mamadou’ de l’époque, il en fera partie si Makaya découvre qu’il profite de l’argent public ou qu’il profite du système pour sa famille ».

« Brice Oligui Nguema ne dispose pas d’un blanc-seing »

Ce Makaya des temps modernes, qui souhaite rester anonyme et qui assure n’avoir aucun lien avec L’Union, a engrangé près de 8 000 abonnés, qui suivent ses posts qui cumulent, chaque semaine, plusieurs milliers de vues. « Ce n’est que le début, assure-t-il. Le quotidien L’Union est tiré à 25 000 exemplaires, X est un véritable terrain de jeu qui laisse le champ des possibles totalement ouvert ». Mais peut-on se cacher et être crédible ? « Vous le verrez au fil du temps, répond-il. L’important n’est pas moi, Makaya, mais les scoops que Makaya va sortir ». Makaya a effectivement sorti quelques informations avant tout le monde, comme la démission d’Alain-Claude Bilie-By-Nze du PDG, le parti de l’ex-chef de l’État Ali Bongo Ondimba, ou encore le mariage du président de la Transition avec sa seconde épouse. De quoi le crédibiliser.

Mais qui est vraiment Makaya ? Dès lors que l’on aborde le sujet de son identité, l’utilisateur botte en touche. « Ce n’est pas Makaya l’important mais les informations qu’il dévoile », dit-il. Oui, mais d’où tire-t-il ces « off » et ces scoops ? « Makaya a quelques sources bien placées, des contacts qui lui écrivent ou lui envoient des audios, des vidéos ou des documents. Makaya recoupe toujours les informations avant de les diffuser ». Mais pas seulement…

Car Makaya, plus que des infos croustillantes, donne beaucoup son avis et semble avoir pris en grippe le président de la Transition, Brice Oligui Nguema. « Makaya est un simple citoyen engagé, Ali Bongo Ondimba n’a pas été dégagé pour qu’on bâillonne notre parole. Brice Oligui Nguema ne dispose pas d’un blanc-seing », se défend-il. Quoi qu’il en soit, la recette fonctionne et Makaya attire de plus en plus de fidèles. « Si des journalistes, des politiques et des membres de la société civile suivent Makaya, c’est qu’il ne raconte pas n’importe quoi », conclut-il.

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