La polémique sur la vente supposée de l’île de Mbanié n’en fini pas d’enfler au Gabon. Le président Omar Bongo Ondimba a réclamé une enquête pour déterminer si un ministre du gouvernement a bien vendu cet îlot pétrolifère à la Guinée Equatoriale, alors qu’il est l’objet d’un différend territorial entre les deux pays depuis une trentaine d’années. L’opposition réclame la démission du gouvernement.
Avec Panapress
Depuis plusieurs semaines, le sort de l’île supposée pétrolifère de Mbanié est l’objet d’une vive polémique au Gabon. A son origine, le quotidien gouvernemental « L’Union », qui a accusé mi-septembre un ministre du gouvernement d’avoir vendu cet îlot d’une trentaine de mètres carrés à la Guinée Equatoriale. Située entre les deux côtes, dans la baie de Corisco, Libreville et Malabo s’en disputent la propriété depuis une trentaine d’années. Le président Omar Bongo Ondimba a réclamé une enquête policière et le gouvernement gabonais a démenti lundi toute volonté « de vendre une partie inaliénable du territoire national », dénonçant même une « cabale médiatique ».
Mais rien n’y fait. L’opposition, une vingtaine de syndicats et des collectifs d’organisations non-gouvernementales (ONG) ont réclamé la démission des ministres qui seraient impliqués dans le scandale, voire celle du gouvernement. L’hebdomadaire Le crocodile a désigné le ministre de l’Intérieur comme le principal responsable de l’affaire. Il aurait été secondé par deux autres ministres, dont celui de la Communication. De leur côté, les autorités ont suspendus pour trois mois l’hebdomadaire Echos du Nord, qui s’était fendu d’un édito sur le « Mbaniégate ». Son directeur de publication, Désiré Ename, a entamé mardi une grève de la faim.
Le tracé des empires coloniaux imprécis
Le Gabon et la Guinée équatoriale devaient se rencontrer cette semaine, à Genève, sous l’égide des Nations unies, comme ils l’avaient fait le 27 février dernier, pour parvenir à une solution sur le différend de Mbanié. Mais la réunion a été ajournée sine die. Lundi encore, le chef de l’Etat gabonais se montrait pourtant confiant sur une issue rapide à ce litige. De retour de Bucarest (Roumanie), où il a assisté au XIème sommet de la Francophonie, il avait indiqué que le président français, Jacques Chirac, l’avait invité à se rendre à Genève pour signer un protocole d’accord sur l’île de Mbanié avec son homologue équato-guinéen et un représentant du gouvernement espagnol. Outre ce territoire, le Gabon et la Guinée Equatoriale se disputent les îlots de Corisco et Cocotiers. La présence dans les négociations des deux anciens empires coloniaux, l’Espagne et la France, s’explique par le fait pays qu’ils n’ont jamais clairement départagé ces territoires.
Le différend sur Mbanié avait déjà provoqué une crise entre Libreville et Malabo, en 1972, lorsque le président gabonais s’y était rendu pour planter le drapeau national. L’affaire avait rebondi en février 2003, lorsqu’Ali Bongo, le ministre gabonais de la Défense, avait été y visiter une unité de la gendarmerie nationale. Le fils du président y avait alors réaffirmé la souveraineté gabonaise, provoquant l’ire du Premier ministre équato-guinéen Candido Muatetema Rivas.
En novembre 2003, le Président Omar Bongo avait indiqué à une délégation du groupe interparlementaire France-Afrique centrale qu’il était « disposé à adopter une attitude conciliante, suggérant à son homologue équatoguinéen une exploitation commune des ressources de la région contestée ». Théodoro Obiang Nguema s’était pour sa part déclaré prêt à envisager une solution négociée, à titre transitoire, sans toutefois exclure de faire reconnaître, le moment venu, « la légitimité de sa revendication par une instance juridictionnelle internationale ». En juin dernier, les Nations Unies avaient aidé le Nigeria et le Cameroun à trouver un accord sur la péninsule pétrolifère de Bakassi. Mais il existe une autre voie de règlement du litige de Mbanié, par le biais de la Commission du Golfe de Guinée (CGG). L’organe de règlement pacifique des conflits a débuté ses activités en août dernier, à Libreville, en présence de Théodoro Obiang Nguema.