Depuis l’annonce de la création de la zone franche de l’île Mandji, qui s’est transformée par la suite en Zone d’Intérêt Economique (ZIEC) de l’île Mandji, nous constatons que le « Gabon Industriel » prime largement sur le « Gabon Vert », regrette le président de l’ONG H2O, Henri Michel Auguste.
(De notre correspondant)
D’après le président de l’ONG H20, Henri Michel, la définition de la politique du « Gabon Vert » reste floue. Ce qui permet aux industries de différents pays, peu scrupuleuses de l’Environnement, de s’engouffrer dans cette brèche laissée béante, en ce qui concerne notamment la ville de Port-Gentil. « La politique environnementale de la ville dénommée Pilier Vert n’existe pas. Il n’y a pas de réflexion concertée à ce sujet, pas de cahier de charges. Et plus simplement pas le moindre embryon d’idées à ce sujet », affirme Henri Michel. « Comment, dans cet état de fait, nos élus peuvent-ils réagir face à ces marchands du temple si bien rodés à ces manœuvres et pratiques fallacieuses, pour arriver à nous vendre n’importe quoi, au grand mépris de notre santé, de notre environnement et de notre futur ? », s’interroge le responsable de l’ONG.
« La création de la zone économique s’est traduite par la destruction de plusieurs centaines d’hectares de mangrove qui protégeaient la ville de Port-Gentil des inondations, de la houle océanique et des cycles de tornades – phénomènes qui ne feront que s’amplifier au fil des ans, ayant comme facteur aggravant le changement climatique », a-t-il poursuivi. « Qui payera les conséquences dévastatrices de cette atteinte majeure à la mangrove qui protégeait Port-Gentil gratuitement ? » Ce sont certainement les Gabonaises et les Gabonais, particulièrement ceux et celles vivant dans la capitale économique.
« Il y a quelques temps déjà, nous avons eu la chance d’assister à la consultation publique organisée par le groupe OLAM, qui est un acteur essentiel de cette ZIEC, puisque selon leur présentation, il devrait y implanter différentes activités. Lors de cette présentation sur la ZIEC, dans l’ordre des idées fantaisistes, nous avons lu le projet d’hôtels et des zones réservées à l’aquaculture/pisciculture. » Bonnes idées puisqu’il y a des emplois en perspective. Mais comment peut-on prétendre installer les activités citées ci-dessus à proximité immédiate d’un complexe pétrochimique (une raffinerie) et chimique (une usine d’engrais type AZF et une usine d’ammoniac) ?
En ce qui concerne l’activité principale d’OLAM, notamment celle se passant dans l’usine d’engrais chimique, il est vrai que la matière première est proche (le gaz des torchères). Or, dans le monde agricole actuel qui est en profond bouleversement, de plus en plus d’agriculteurs abandonnent les engrais chimiques, car trop polluants et trop risqués pour la santé. Ces risques ont été établis par de nombreuses études scientifiques de par le monde. N’est-ce pas pour cela que l’on a décidé de créer ces chimères que l’on appelle « les OGM ou Organismes Génétiquement Modifiés » afin d’éviter d’utiliser des engrais et des pesticides, qui causent de gros dégâts environnementaux, et contribuent à la pollution des sols, de l’air, des nappes phréatiques, des fleuves et des océans. Tous ces efforts faits pour une production agricole mondiale stagnante n’ont pas empêché aux populations du tiers monde de mourir de faim. Dans un monde où les risques sanitaires sont de plus en plus identifiés, dénoncés et liés à la qualité de l’alimentation, le président de l’ONG H2O estime qu’il est imprudent d’envisager de continuer à vendre des engrais chimiques. Quant à l’argument présenté par les promoteurs de cette usine, « fabriquer des engrais pour l’agriculture villageoise », a-t-il avancé, il ne tient pas puisque la jeune génération ne daigne pas retourner à la terre, et que l’agriculture villageoise est principalement une agriculture biologique (exemple : le projet de 800 hectares de terre lancé par le Président Sassou Nguesso dans son village Edou, au Nord du Congo). En plus sur le plan international, on a et on va avoir de plus en plus de mal à trouver des débouchés pour ce type de produits dangereux dans les années à venir, car la conscience des peuples évolue vers un mieux être et vers une alimentation saine.
Pour prolonger son propos, il a rappelé l’accident du 21 septembre 2001, à Toulouse, en France. L’usine AZF a été détruite par l’explosion d’un stock de nitrate d’ammonium (engrais chimique), entraînant la mort de 30 personnes, faisant 2 500 blessés et 14 000 personnes atteintes de lourds traumatismes psychiques et de lourds dégâts matériels (environ 2 milliards d’euros). Résultat : une ville profondément meurtrie, un procès contre la société Grande Paroisse (groupe Total) depuis plus de 10 ans. A ce jour, aucune indemnité n’a été versée au titre des dommages. Comme nous le voyons ci-dessus, ce genre d’industrie n’est pas sans danger. Le premier risque est la pollution de l’air en cas d’incident ou d’accident. En fonction de la concentration et de la direction du vent, l’air ainsi contaminé provoquerait des vertiges, des nausées, voire la mort par asphyxie de la population en fonction de sa proximité. Le deuxième risque est celui de la pollution par débordement des eaux usées ou par accident. La proximité de la mer engendrerait l’extinction immédiate de la faune et de la flore aquatique sur toutes les zones aquatiques polluées. Le 3ème risque, et non des moindres, est l’explosion de l’usine. Nous en avons déjà évoqué les effets et les résultats sur la déforestation des alentours de Port-Gentil. L’étude d’impact environnementale fournie était digne « d’un rapport pour bisous nounours, où tout le monde, « il est gentil » et tout le monde, « il est beau ».
Le président de l’ONG termine sa déclaration par de nombreuses questions, entre autres, « Pourquoi s’entêter à vouloir installer une telle industrie à proximité immédiate de la ville ? A-t-on pris en compte le voisinage trop proche de deux autres industries à tendance explosive, le terminal pétrolier du Cap Lopez et la raffinerie de la SOGARA ? Ne risque-t-on pas « un effet boule de neige » ? En cas de pollution de l’eau ou de l’air, serait-on capable de circonscrire et d’endiguer ces dernières ? Dans le cas d’une explosion de type AZF, avons-nous assez de lits pour prendre en charge un nombre très important de patients dans notre hôpital où déjà les places sont limitées ? Avons-nous un corps médical en nombre suffisant et capable de traiter les pathologies liées aux accidents majeurs industriels ? En cas de pollution de la mer, qui va restaurer et payer les dégâts causés à l’environnement ? En cas de pollution de l’air, qui prendra en charge et indemnisera les personnes ou les ayants droits ? En cas de catastrophe majeure qui va payer ? »