La population gabonaise a boycotté largement l’appel aux trois jours de ville morte lancé par l’opposition lancé le 11 septembre pour protester contre l’élection d’Ali Bongo Ondimba à la présidence de la République. Tous les secteurs économiques du pays ont fonctionné normalement, de lundi à mercredi, aussi bien à Libreville qu’à l’intérieur du pays. Pourquoi un tel rejet ? Micro-trottoir dans la capitale gabonaise.
Notre correspondant au Gabon
Les habitants rencontrés dans Libreville ont affirmé ne plus vouloir être les dindons de la farce politique. ‘’ Nous ne voulons plus être utilisés comme la chaire à canon des opposants’’, nous a déclaré Yves Menié, 30 ans, chauffeur de taxi. ‘’Nous avons demandé aux opposants de s’unir et de trouver un consensus autour d’une candidature unique avant le scrutin du 30 août dernier, mais chacun veut devenir président et les résultats a été ce que nous savons tous’’, a lancé pour sa part Pierre Massoda Kombila, 32 ans, ingénieur en informatique. ‘’Que le peuple soit au moins pour une fois respecté. Après tout ce qui s’est passé à Port-Gentil, les leaders de l’opposition devraient faire un examen de conscience avant d’inviter à nouveau les populations à se joindre à leur combat’’, a poursuivi l’ingénieur en informatique.
Une autre catégorie de personnes rencontrées dans la capitale gabonaise, ayant rejeté cet appel aux journées ville morte, a critiqué l’attitude « narcissique » des chefs de l’opposition qui, selon elle, seraient en train de faire pression sur le parti démocratique gabonais (PDG), en utilisant le peuple afin de négocier leur entrée au gouvernement, avec tous les avantages que cela comporte en termes financiers. Beaucoup se souviennent des prises de position radicales du président du Rassemblement pour le Gabon (RPG), Paul Mba Abessole, dans les années 90, de son revirement inattendu, puis de son alliance avec le PDG. D’autres évoquent le cas de l’opposant historique Pïerre Mamboundou, qui après de longues années de tiraillement avec le défunt président Omar Bongo Ondimba, était devenu quelques années avant la mort de ce dernier, un habitué des couloirs du palais présidentiel. Un comportement qui avait fait poussé certains à penser qu’il bénéficiait lui aussi, comme la plupart des opposants et des chefs religieux, des largesses du doyen des chefs d’Etat africains.
Intégrité ou compromission?
Les leaders de l’opposition qui se sont réunis mardi dernier, au 2e jour de l’opération villes mortes, ont avoué que les choses n’ont pas marché comme ils le souhaitaient. Mais ils ont tout de même souligné qu’une bonne partie des fonctionnaires gabonais étaient absents à leurs postes pendant ces jours.
L’échec de l’appel aux journées ville morte, à en croire certains analystes, serait un signe avant-coureur de la mort politique de l’opposition gabonaise incarnée depuis près de 20 ans par Pierre Mamboundou, Zacharie Myboto ou encore Paul Mba Abessole. Pour d’autres, il n’entamera pas la détermination de l’opposition à contester l’élection d’Ali Bongo Ondimba. Ainsi, hier, André Mba Obame, candidat indépendant et ancien ministre de l’Intérieur, déclarait à l’AFP : « Je serai président de la République. Je ne peux pas dire dans combien de temps, mais tant que je ne trahis pas l’immense confiance du peuple gabonais, l’issue est inéluctable ». Et il ajoutait : « Les petits arrangements sous la table, les petites propositions à la sauvette, ça ne m’intéresse pas », excluant donc toute possibilité de négociation son ancien ami.