Au terme de la réunion du G20 à Pittsburgh, aux Etats-Unis, force est de constater que le bilan n’est pas à la hauteur des attentes. D’une part, les participants n’ont fait que proférer des déclarations d’intentions plutôt que de proposer des politiques effectives, et d’autre part, rien n’a été fait pour aider les pays pauvres. Ce sommet a accordé bien plus d’importance aux rémunérations des dirigeants d’entreprises qu’aux besoins du 1,4 milliard d’êtres vivant avec moins de 1,25 dollar par jour. Pour les auteurs, Campbell, Hastings et Lilley et Short, membres du Parlement Britannique et coprésidents de la campagne « Le commerce pour sortir de la pauvreté », l’intégration dans le commerce mondial est une question de vie ou de mort pour les pays pauvres. Dans leur analyse, les auteurs montrent comment le commerce est la meilleure voie pour sortir de la pauvreté et il y a cinq mesures, assez simples, que le G20 pourrait prendre pour permettre aux Etats les plus modestes de sortir de la pauvreté par le commerce.
*Par John Battle, Sir Menzies Campbell, Lord Hastings, Peter Lilley et Clare Short
Toute l’attention lors de la réunion du G20 à Pittsburgh s’est focalisée sur les bonus des banquiers. Mais il y a d’autres problèmes de pénurie du crédit – qui affectent des millions de personnes, plutôt que des centaines, et qui ne reçoivent pas l’attention qu’ils méritent. Notamment la suppression des barrières commerciales à l’encontre les pays les plus pauvres du monde.
Le G20 a énormément discuté du commerce, mais a réalisé peu de choses. Lors du Sommet du G20 à Londres en avril dernier, les dirigeants se sont engagés à « faire tout ce qui est nécessaire pour (…) promouvoir le commerce mondial et l’investissement et rejeter le protectionnisme afin de favoriser la prospérité ». Depuis, rien ne s’est passé, à l’exception de signes inquiétants de protectionnisme renforcé. Cela lésera les gens même dans les pays les plus prospères. Mais cela détournera aussi l’attention de l’opinion publique de quelques mesures simples que pourraient prendre les dirigeants du G20 pour aider les citoyens des pays les plus pauvres de la planète. Pour ces derniers, le fait de ne pas prendre part au commerce peut être une question de vie ou de mort.
De manière ironique, la promotion du commerce et des investissements mondiaux, ainsi que le rejet du protectionnisme, ne coûtera pas beaucoup. Ni les TARP (Trouble Asset Relief Program) coûteux ni les autres plans publics de renflouement sont nécessaires. Le Cycle de Doha n’est pas non plus essentiel. Le commerce est la meilleure voie pour sortir de la pauvreté et il y a cinq étapes assez simples que le G20 et les autres peuvent prendre pour permettre aux pays les plus pauvres de sortir de la pauvreté par le commerce.
Premièrement, les pays riches doivent ouvrir inconditionnellement leurs marchés à tous les pays les plus pauvres (ceux définis comme à faible revenu par l’ONU, y compris le Ghana). Bien que le protectionnisme soit une réaction commune à des moments d’incertitude économique, il causera du tort aux riches comme aux pauvres dans le long terme. La menace de la concurrence aux pays riches est minimale : les personnes les plus pauvres, celles vivant avec moins de 2,70 $ par jour, représentent un cinquième de la population mondiale, mais moins de un cinquantième du commerce mondial.
Deuxièmement, les règles commerciales doivent également être simplifiées. Les règles d’origine complexes signifient que les pays qui ont droit, en théorie, à un libre accès aux marchés développés paient en réalité des droits de douane élevés ou sont exclus par les complications des barrières bureaucratiques.
Troisièmement, les subventions aux produits locaux et aux exportations des pays riches, qui compromettent la capacité des pays pauvres à affronter la concurrence, doivent être réduites ou supprimées. Parmi les pires exemples se trouvent le riz japonais, le coton américain et les vaches de l’Union Européenne.
Séparément, les pays pauvres ont besoin d’opérer un certain nombre de changements aussi, en réduisant notamment entre eux les tarifs douaniers. Les droits de douane les plus élevés dans le monde sont pratiqués entre les pays les plus pauvres, où les États et les fonctionnaires des douanes abusent des règlementations commerciales et compromettent ainsi le commerce régional.
Le rapport 2009 de « Doing Business » sur le climat des affaires, publié par la Banque mondiale, montre que l’exportation d’un conteneur d’un port angolais exige en moyenne 12 documents, coûte 2250 $ et nécessite 68 jours de formalités douanières. En comparaison, dans le pays enclavé qu’est le Botswana, cela durerait 37 jours et au Sénégal, il suffit seulement de 14 jours, mieux que la moyenne mondiale. C’est l’une des raisons pour lesquelles moins d’un dixième des exportations africaines est destiné aux autres pays africains, alors que près des trois quarts du commerce européen se fait en Europe.
Enfin, un investissement renouvelé est essentiel dans les routes, les ports et les structures administratives qui rendent possible ou facilitent le commerce dans les pays en voie de développement. Et il ne s’agit pas seulement du commerce extérieur. En 2006, le Kenya n’a pas pu acheminer son surplus agricole de l’Ouest vers le Nord frappé par la famine, qui a dû attendre l’aide humanitaire internationale.
Lever toutes les barrières dans le G20 est facile et peu coûteux. En pratique, chaque pays du G20 pourrait agir seul. Mais si les pays du G20 travaillaient ensemble et ne consacraient qu’une petite partie du temps et d’énergie qu’ils consacreraient aux bonus des banquiers, alors le bonus des plus modestes serait mesuré en millions de dollars et de vies. La pauvreté tue, mais le commerce sauve.
*Messieurs Bataille, Campbell, Hastings et Lilley et Mademoiselle Short sont membres du Parlement Britannique, et sont coprésidents de la campagne « Trade Out of Poverty » (Le commerce pour sortir de la pauvreté).
Publié en collaboration avec UnMondeLibre.org