Un brûlot contre les pratiques qui ont cours au sein du RDPC, le parti du président camerounais Paul Biya, a été commis en interne par un » courant de modernistes « . Ils y dénoncent la corruption, le népotisme et le dévoiement des idéaux du parti.
Un » groupe de hauts cadres » a rendu public un manifeste critique envers les agissements qui ont cours sein de leur parti, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC). Le brûlot est signé Maître Mila Assouté, ancien député et militant du RDPC depuis sa création en 1985. Il a accepté de nous répondre, en prenant bien soin de préserver le président du parti et de la République, Paul Biya.
Afrik : Pourquoi avoir attendu ce jour pour dénoncer des pratiques qui semblent avoir cours dans votre parti depuis longtemps ?
Mila Assouté : Je suis membre du comité central du RDPC depuis 1996. C’est seulement en tant que tel que, depuis peu, je me suis permis d’analyser les problèmes que connaît notre parti et d’y apporter une réponse.
Afrik : Quels sont ces problèmes ?
Mila Assouté : Nous constatons qu’il y a une déviance ostensible des directives nationales du parti. Les prescriptions du parti son claires : le RDPC doit être un parti de rassemblement et d’avant-garde, de promotion de la démocratie, qui apporte un style nouveau au citoyen, ainsi que la liberté, la dignité et la moralité. Ses dirigeants ne les respectent pas.
Afrik : Vous parlez également de corruption et de népotisme, des maux qui concernent surtout la société camerounaise.
Mila Assouté : Les membres du parti doivent donner l’exemple. Les frustrations nées de la mauvaise gestion du RDPC sont condamnées à s’étendre à toute la société, créant la misère, la violence… et même les guerres civiles. Le RDPC a aujourd’hui la responsabilité de gouverner. Il a signé un contrat social avec le peuple, qui lui a confié la gestion du pays.
Afrik : On a l’impression à travers votre réponse, comme à travers votre manifeste, que l’appareil du parti se confond avec l’appareil de l’Etat.
Mila Assouté : Ce que nous disons ne porte pas préjudice au principe de la primauté de l’Etat sur le parti. Mais le gouvernement est en ce moment une émanation du RDPC. Il a la responsabilité de gouverner en tenant compte des directives du parti.
Afrik : A nouveau cette dialectique héritée de l’époque du parti unique (le RDPC) sous un autre nom…
Mila Assouté : Cette confusion entre le parti et l’Etat est une des conséquences de l’absence de modernisation de l’Etat et du parti que nous demandons et que recommande le Président. La modernisation tarde à venir. Ces archaïsmes sont décriés par le Président mais ce n’est pas à lui de moderniser le pays.
Afrik : Précisément, de la même façon que vous ne critiquez pas Paul Biya dans votre manifeste, vous prétendez vous attaquer aux structures et non aux hommes. Pourtant ce sont eux qui corrompent et sont corrompus.
Mila Assouté : Nous refusons d’entrer dans des querelles de personnes. La direction actuelle du parti est en déphasage avec les directives nationales et elle créé un préjudice énorme pour le parti et le président.
Afrik : Quelles ont été les réactions au sein du parti et de la part du président ?
Mila Assouté : Elles vont au-delà de nos espérances. Nous avons le soutien de la base et 180 lettres d’encouragement de la part des membres du comité central, sur 250, nous sont arrivées. Quant au président, s’il avait été mécontent, je pense qu’il me l’aurait fait savoir.