Il y a quatre ans, les chefs d’état et de gouvernement membres de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) avaient choisi Michaëlle Jean comme secrétaire générale de la Francophonie, pour succéder à Abdou Diouf qui occupait ce poste depuis une douzaine d’années.
Le choix porté sur Michaëlle Jean a été fortement guidé par une série de critères, dont notamment, ses compétences, ses expériences antérieures et sa capacité d’action et de mobilisation qui allie à la fois dextérité et sensibilité. Michaëlle Jean a été considérée par beaucoup comme une candidate de convergence, dans la mesure où, elle faisait le trait d’union entre le Nord et Sud ; plus précisément entre les pays de trois continents majeurs : Afrique, Europe et Amérique (latine et du Nord), ayant le français pour l’une des langues officielles, de travail ou d’administration publique.
L’élection de Michaëlle Jean à l’OIF a d’ailleurs été largement saluée à la fois par la plupart des États et gouvernements membres. Elle n’a pas non plus manqué de susciter un vif intérêt de la population francophone qui voyaient en elle un vecteur qui allait apporter un vent nouveau d’optimisme et insuffler une nouvelle dynamique à l’Organisation et à la réalisation du programme de la Francophonie économique qui ambitionne de devenir un espace économique et commercial.
Tout au long de ces trois ans et demi qu’elle a passée à la tête de l’OIF, Michaëlle Jean a fait montre, avec beaucoup d’énergie, de son engagement sans équivoque, son dévouement sincère et sa détermination à faire de l’OIF un espace de consultation, de dialogue, d’échanges, utiles à la compréhension de défis communs et de partenariats favorisant les actions conjointes et concertées à la recherche de solutions idoines. Elle a su démontrer qu’elle est une communicatrice efficace qui fait entendre la voix de la Francophonie sur la scène internationale, aussi bien au Conseil de Sécurité des Nations Unies que dans d’autres instances internationales et régionales.
Michaëlle Jean a su également démontrer l’étendue de ses qualités managériales, son indépendance d’esprit, sa franchise, et son habileté à gérer des situations de crises délicates et hautement sensibles au sein d’une organisation internationale composée à la fois des États démocratiques, économiquement avancés et fondés sur la primauté du droit et le respect des droits de la personne, mais également des pays pauvres en développement confrontés aux réalités spécifiques des gouvernements peu ou pas démocratiques, répressifs et souvent corrompus, qui foulent aux pieds les droits fondamentaux de leurs peuples.
Mme Jean s’acquitte de cette responsabilité avec compétence et intégrité. Elle porte tous ses efforts et ceux de ses équipes au cours de ce premier mandat qui s’achève en décembre prochaine, pour faire avancer les agendas communs, notamment la consolidation de la paix, de la démocratie et de l’état de droit ; la promotion de la diversité linguistique et culturelle ; la promotion de l’éducation et la formation en français ; la solidarité et la coopération économique indispensables au développement harmonieux et à la réduction de la pauvreté au sein de l’espace francophone.
Avec l’arrivée au sein du cabinet de Michaëlle Jean, d’un diplomate français de calibre international et ancien secrétaire général adjoint des Nations unies chargé des opérations de maintien de la paix, l’ambassadeur Hervé Ladsous, qui a une grande expérience dans les régions en conflits armés, il est indéniable que celui-ci va apporter une réelle plus-value et une plus grande visibilité aux actions d’appui à la consolidation de la paix, de la démocratie et de l’état de droit menées par l’OIF.
Soutien renouvelé du Canada, Québec et Nouveau-Brunswick
N’en déplaise à une certaine presse, très critique, qui a lancée une campagne de salissage sans précédent contre Michaëlle Jean, pour miner sa crédibilité et son intégrité personnelle, et ainsi tenter de nuire à ses chances de rempiler, elle conserve de bonnes chances d’être reconduite à son poste à l’OIF.
En visite officielle en France où il a été reçu par le président français Emmanuel Macron, le premier ministre du Canada Justin Trudeau a, non seulement apporté son soutien inconditionnel à Michaëlle Jean, il a également invité les autres États et gouvernements membres à lui renouveler leur confiance lors du prochain Sommet de la Francophonie prévu à Erevan en Arménie, en octobre prochain, disait-il : « afin qu’elle puisse poursuivre et consolider « l’excellent travail » effectué depuis sa prise de fonction en janvier 2015 ».
À la sortie de sa rencontre avec le premier ministre du Canada, la secrétaire générale de la Francophonie a déclaré : « Le soutien du Canada est très important parce qu’il nous permet de poursuivre énergiquement notre action pour cette « Francophonie des solutions » pragmatique et concrète que nous développons depuis plus de trois ans ».
En mars dernier, le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, également en visite officielle en France, avait déclaré publiquement aux côtés du président français Emmanuel Macron, soutenir pleinement le renouvellement du mandat de Mme Jean à l’OIF, tout en suggérant « davantage de rigueur et de transparence dans la gestion financière et administrative interne de l’OIF ».
Ce n’est pas anodin que les premiers ministres Trudeau et Couillard aient fait leurs déclarations de soutien à Michaëlle Jean juste après leur rencontre avec le président Macron. Ce qui laisse supposer que la France aussi soutiendrait cette candidature. Sans nul doute aussi que nombreux pays africains y verraient d’un œil sa réduction, pour poursuivre et parachever les projets en cours.
« Nous sommes fiers d’avoir une Canadienne à la tête d’une grande organisation internationale comme l’OIF. Madame Jean promeut activement nos priorités canadiennes comme l’égalité entre les hommes et les femmes et l’entrepreneuriat chez les jeunes et les femmes … c’est pourquoi notre gouvernement appuie le renouvellement du mandat de Mme Jean », avait, pour sa part, déclaré la ministre canadienne du développement international et de la Francophonie, Marie-Claude Bibeau.
Alors que les trois gouvernements du Canada qui avaient présentés et soutenus la candidature de Michaëlle Jean en 2014, se disent satisfaits du travail qui a été accompli jusqu’ici, il est déplorable de remarquer que les reproches proviennent très souvent de mêmes gens et sont teintés de beaucoup de partisanerie, au point qu’ils y perdent en crédibilité.
Mais malgré tous les reproches acrimonieux et parfois gratuits, il n’en demeure pas moins que Michaëlle Jean garde le cap sur les objectifs principaux à atteindre, à savoir, la matérialisation de la Francophonie économique, qui était l’un des axes majeurs du mandat que les chefs d’état et de gouvernement de l’OIF lui avaient confiés en 2014 au Sommet de Dakar. Et, fort de la confiance réitérée à la fois par les gouvernements du Canada, du Québec et du Nouveau-Brunswick, tous membres de l’OIF, et de leur appui indéfectible, nous pensons qu’il y a lieu de croire au renouvellement possible du mandat de Mme Jean pour un second mandat à l’OIF, que nous lui souhaitons aussi fructueux que le premier.
Avec cette annonce officielle du premier ministre Trudeau, du soutien inconditionnel du Canada, Michaëlle Jean vient de creuser un écart considérable avec les candidats potentiels qui seraient intéressés à lui succéder au poste de secrétaire générale de la Francophonie.
Il va sans dire qu’à moins de six mois du XVIIe Sommet de la Francophonie à Erevan, il serait hasardeux à un quelconque candidat de pouvoir prétendre gagner à l’élection d’octobre prochain. De toute évidence, il n’y a pas grand monde, à ce jour, qui se bouscule au portillon pour succéder à Michaëlle Jean.
Isidore KWANDJA NGEMBO, Politologue