Elle pouvait le faire, mais devait-elle le faire ? L’histoire de Françoise Mbango étonne. C’est à quelques nuances près l’histoire des femmes mariées qui vont chercher leur bonheur sur Internet et laissent en plant leur progéniture et leur époux, préférant camper en Suisse les rôles d’esclave sexuelle et nounous. C’est que la misère, dit-on, est moins pénible au soleil.
La haine et la colère ont-elles motivé son choix ou bien elle cultive depuis toujours un vrai amour pour la France ? Françoise Mbango n’est pas une victime de dictature au Cameroun, elle n’a pas subi, comme nombre de talents anonymes jamais épanouis, l’indifférence publique… D’où vient-il qu’elle ait pu accepter d’abandonner le Cameroun, où elle était une icône vivante, une personnalité adulée, pour rejoindre la France où elle n’est personne nulle part, surtout pas dans l’équipe olympique.
Est-il possible qu’elle n’ait eu cette nationalité française qu’à la condition de représenter la France ? Il faut quand même relever que tout juste quatre ans après sa médaille à Pékin, elle était sélectionnable par la France, et ceci depuis trois mois : pile poil le délai exigé par le règlement olympique ! Pourquoi ne s’en n’est-elle pas expliquée auprès de ses ex-compatriotes ? Parce qu’il s’agissait de l’exercice de sa liberté la plus absolue ? Nul n’aurait osé lui tenir rigueur d’avoir adopté la nationalité française, si seulement elle s’était contentée de cela. On aurait allégué notre controversé code de la nationalité, on aurait excipé de son droit à aménager à son enfant une cage de Faraday qui le protègerait en France des effets de la misère camerounaise.
Françoise Mbango appartenait d’une certaine façon au peuple camerounais, elle a choisi de faire prévaloir son droit à ne penser qu’à elle. Au pays, elle a une grande communauté de fans à laquelle elle n’a plus rien à offrir que son passé camerounais qu’elle a répudié sans élégance ni explications aucunes.
Alors heureuse ?
Françoise n’est pas passée à l’ennemi, ca n’est pas une déserteuse et elle ne passera pas au tribunal militaire, mais c’est la première fois qu’une personnalité qui a porté si haut les couleurs du Cameroun, se retrouve à porter le maillot bleu-blanc-rouge. C’est inédit et c’est choquant. La pauvreté au Cameroun n’explique pas tout, elle n’excuse pas tout. Et comme dirait le juge Brown, dans Boston Justice : « De toutes les affaires scandaleuses, vaudevillesques et insensées, celle-ci est la plus rocambolesque… ».
Françoise, qui a cessé de représenter le Cameroun pour des raisons sportives devait donc représenter la France pour des raisons financières, soit. Le résultat a logiquement suivi, elle en a eu pour son argent, mais les performances sportives n’ont pas suivi. C’est encore par des Camerounais qu’elle a été soutenue, après son inaptitude à Reims à atteindre les minima olympiques. Ce ne sont pas les Français qu’elle avait à ses cotés, mais bien les Camerounais. Une certaine presse camerounaise a semblé se réjouir de son échec, cela ressemblait plus à de la jalousie amoureuse qu’à une méchanceté vraiment malveillante.
Au surplus, si « la Française Françoise Mbango » s’était qualifiée, peut-être aurait-elle pu passer aux yeux de tous pour un génie, mais elle a échoué, et en tant qu’ancien supporter fervent, je me suis senti trahi, et estime que, à 36 ans sonnés, ses choix professionnels étaient hasardeux.
Françoise Mbango met tout un peuple dans l’embarras. Grâce à elle, en effet, le Cameroun comptait cinq médailles, c’est indiscutable ; à cause d’elle, il ne nous en reste plus que trois, on peut en discuter. Naguère modèle, c’est désormais un rôle d’antihéros et contre-modèle qu’elle doit assumer depuis qu’elle a été tragiquement atteinte de double nationalité.
Il ne lui reste plus qu’à renoncer à la nationalité qui ne lui porte pas spécialement chance. Les moyens ne mènent pas a tout, les moyens ne donnent pas tout ! Et personne n’en aurait voulu à la fédération camerounaise d’athlétisme de s’opposer à ce débauchage sauvage de la France. Mais au fond, c’est bien pour cela qu’elle nous a quittés, on n’a pas su la retenir : Françoise la Française dans l’âme, tu l’aimes ou elle te quitte. Vive l’esprit olympique !