
Huit décennies après le massacre de Thiaroye, l’histoire coloniale continue d’interroger les consciences. Lors d’un récent colloque à Dakar, intellectuels et universitaires africains ont revisité cet épisode tragique, soulignant la nécessité de déconstruire les récits coloniaux pour rétablir une mémoire historique affranchie des biais européens. Le professeur François Abiola, figure de proue de cette réflexion, plaide pour une réécriture de l’histoire africaine, ancrée dans la reconnaissance et la souveraineté mémorielle.
La tragédie du massacre de Thiaroye, survenue le 1er décembre 1944, demeure une plaie ouverte dans la mémoire collective africaine. Récemment, un colloque organisé à Dakar a permis de réinterroger cet épisode sombre de l’histoire coloniale, avec la participation d’universitaires et d’intellectuels africains.
Parmi eux, le professeur François Abiola a apporté une vision novatrice. Il a appelé à la déconstruction des récits coloniaux pour mieux reconstruire une histoire africaine affranchie des biais européens.
Thiaroye 1944 : une blessure historique toujours vive
Le massacre de Thiaroye constitue l’un des symboles les plus marquants des injustices subies par les combattants africains. Après avoir participé à la Seconde Guerre mondiale aux côtés des forces françaises, les tirailleurs sénégalais réclamaient leur solde légitime. La réponse des autorités coloniales fut d’une brutalité extrême : une répression sanglante orchestrée par l’armée française. Ce massacre, longtemps occulté, symbolise la violence systémique infligée aux peuples colonisés.
Lors du colloque, des universitaires ont souligné l’importance de ce massacre dans la construction de la mémoire collective africaine. Le professeur François Abiola a rappelé que « Thiaroye 44 n’est pas seulement un événement historique, mais un marqueur de la lutte pour la reconnaissance et la dignité des Africains« .
Déconstruire les récits coloniaux pour reconstruire l’histoire africaine
François Abiola a développé son concept « Déconstruire pour construire« . Il a plaidé pour une réécriture de l’histoire africaine débarrassée des filtres condescendants du colonialisme. Le professeur Abiola a mis en avant quatre axes qui permettront à l’Afrique de se réapproprier son passé. Il s’agit de l’analyse critique des sources historiques, la promotion des témoignages africains, la refonte des programmes scolaires et la valorisation des héros africains.
Ce positionnement a été salué par le professeur Babacar Fall, modérateur du panel. Il a estimé que cette démarche constituait un fondement clé pour les générations futures. Pour lui, il ne s’agit pas seulement de se souvenir, mais de faire de cette mémoire un levier de souveraineté.
Vers une reconnaissance officielle et des réparations
Au terme des discussions, les participants ont réaffirmé la nécessité d’une reconnaissance officielle du massacre de Thiaroye par les autorités françaises. La « Déclaration de Parakou« , élaborée lors d’un précédent colloque, plaide en ce sens et appelle à une mobilisé collective pour que les crimes coloniaux soient qualifiés de crimes contre l’humanité.
La démarche engagée par Abiola et ses pairs s’inscrit dans une dynamique plus large d’émancipation mémorielle et culturelle. En revisitant des épisodes historiques occultés, les intellectuels africains contribuent à forger une identité collective débarrassée des stigmates du passé colonial et orientée vers un avenir autonome.