Le Sénat a commencé ce mardi l’examen d’un projet de loi portant sur le développement économique des départements d’Outre-Mer alors que la Réunion connaît de violents mouvements sociaux contre la vie chère. Le texte prévoit notamment la création de zones franches d’activités et des exonérations fiscales.
Les sénateurs français examinent depuis ce mardi un projet de loi pour le développement économique de l’Outre-Mer (Lodeom). Le texte, porté par la ministre de l’Intérieur et de l’Outre-Mer, Michèle Alliot-Marie et le secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer, Yves Jégo, prévoit essentiellement une exonération de charges pour les entreprises installées dans les départements concernés. Présenté en juillet dernier, en conseil des ministres, le projet devrait être adapté au contexte actuel des conflits sociaux et de la crise mondiale. Le gouvernement a déjà annoncé le déblocage d’une enveloppe supplémentaire de 150 millions d’euros qui serviront à financer des mesures complémentaires.
Fort d’une trentaine d’articles, Lodeom « vise à donner aux départements et collectivités d’Outre-Mer, les moyens d’assumer leurs ambitions pour le XXIe siècle », a indiqué Mme Alliot-Marie. Elle a ajouté que cette loi favoriserait aussi la mise en œuvre « d’un modèle de développement économique spécifique basé sur le potentiel de chaque territoire ». Concrètement, le texte propose, entre autres, la mise en place de zones franches d’activités, pour dix ans, et devrait offrir aux petites et moyennes entreprises (PME) des exonérations de 50 à 80%, voire même de 100%, de la taxe professionnelle, de l’impôt sur les bénéfices ou de la taxe foncière. Des aides économiques sont également prévues pour les importations et exportations afin de contrebalancer les surcoûts liés à l’éloignement et à l’insularité.
« Un travail de fond sur l’économie des DOM »
Selon le sénateur UMP Jean-Paul Virapoullé, le projet de loi comporte, certes, des réponses aux mouvements contre la vie chère, que connaissent actuellement les Antilles et la Réunion mais il ne devrait pas dispenser l’Etat d’« un vrai travail de fond sur l’économie des DOM ». En Guadeloupe où les mouvements contre la vie chère ont démarré en décembre dernier avant de s’étendre aux autres départements de l’Outre-Mer, la situation est toujours tendue en dépit de la signature d’un accord salarial. Michèle Alliot-Marie, la ministre l’Intérieur et de l’Outre-Mer, a jugé « inacceptables » certains termes de cet accord. Un point de vue partagé par Laurence Parisot, la présidente du patronat français. Cette dernière a, par ailleurs dénoncé, l’utilisation du terme « économie de plantation » pour désigner l’économie guadeloupéenne dans le protocole d’accord. Il signifierait d’après elle,
« économie esclavagiste ».
Ces réserves nourrissent un climat de tension qui s’est accru, ce week-end, après l’annonce de poursuites judiciaires engagée contre Elie Domota, le leader du collectif Liyannaj Kont Pwofitasyon (LKP) en Guadeloupe. Le parquet de Pointe-à-Pitre a indiqué, samedi, l’ouverture d’une enquête pour incitation à la haine raciale et tentative d’extorsion de signature. M. Domota avait déclaré, la semaine dernière, dans une émission télévisée, que les entreprises devaient soit appliquer la hausse convenue des salaires de 200 euros nets, soit quitter la Guadeloupe, ajoutant qu’il ne « laisserait pas une bande de békés (descendants des colons, ndlr) rétablir l’esclavage » sur l’île.
Le Réunion proteste également contre la vie chère
Ces déclarations ont suscité de vives réactions au sein du gouvernement et du patronat français. Yves Jégo, le secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer, les a qualifiées de «dérapage verbal inadmissible». «Quelle que soit l’intensité d’un conflit social, a-t-il affirmé, dire à une catégorie de la population « faites ça ou partez » n’est évidemment pas acceptable ». Pour Elie Domota, la procédure judiciaire dont il fait l’objet n’est rien d’autre qu’une « volonté affichée de faire taire le peuple guadeloupéen qui revendique l’égalité sociale. »
Si le dialogue, même tendu, est à l’ordre du jour en Guadeloupe, ce n’est pas le cas à la Réunion où plusieurs incidents ont marqué, ce mardi, la deuxième journée de grève générale lancée par le Collectif des organisations syndicales, politiques et associatives de La Réunion (Cospar). Quatre policiers ont été blessés et seize manifestants interpellés. Les négociations devraient reprendre ce mercredi sur cette île.