France : Un mémorial pour les soldats musulmans morts à Verdun


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verdun musulman

Le chef de l’Etat français a inauguré, dimanche dernier, à Douaumont un mémorial dédié aux 70 000 soldats musulmans morts pour la France, pendant la bataille de Verdun de 1916. Jacques Chirac leur a rendu hommage à l’occasion de la commémoration du 90e anniversaire de cette page de l’histoire, qui a fait quelque 300 000 morts français et allemands en pleine première Guerre Mondiale.

Louise Simondet

Un mémorial pour les musulmans tombés pour la France pendant la première Guerre Mondiale… Le ministre délégué aux Anciens combattants, Hamlaoui Mekachera, l’avait annoncé comme l’un des temps forts de sa politique pour l’année 2006. Jacques Chirac l’a exaucé… Lors des commémorations nationales du 90e anniversaire de la bataille de Verdun (Meuse) de 1916, le chef de l’Etat a inauguré dans ce haut lieu symbolique, où s’est déroulé l’une des plus grandes et meurtrières batailles du XXe siècle (300 000 morts), un mémorial dédié aux 70 000 combattants musulmans « morts pour la France ». « Avant nous n’avions rien pour honorer la mémoire de ces combattants. Les chrétiens ont une stèle, les juifs aussi. Nous, nous n’avions qu’une stèle qui avait été posée dans les années 80 à l’initiative la Mosquée de Paris. Mais aucune reconnaissance de l’Etat. Ce mémorial, c’est une reconnaissance pour tous les musulmans de France », commente-t-on à la Mosquée de Paris, contactée par Afrik.com. Désormais, la seconde religion de France a sa place dans la nécropole de Douaumont.

Une cérémonie symbolique

« C’était très émouvant. Des anciens combattants de la guerre 14-18 étaient présents. Quatre-vingt dix ans après », note un membre de la Mosquée de Paris. Le Président de la République, entouré de la ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie, du secrétaire d’Etat aux Anciens combattants, Hamlaoui Mekachera, du président de l’Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, et de celui du Sénat, Christian Poncelet et du président du Conseil français du culte musulman, Dalil Boubakeur [[<*> Egalement Recteur de la Mosquée de Paris]], a rendu hommage à ces soldats venus du Maghreb, d’Afrique sub-saharienne et de Madagascar, enrôlés sous l’uniforme français.

« Enfants de France tombés à Verdun, hommes de toutes conditions et de toutes convictions, mais français d’abord dans l’épreuve, je m’incline aujourd’hui devant vous au nom de la Nation », a proclamé, solennellement, Jacques Chirac, devant un parterre de plusieurs milliers de personnes. Le Président a ensuite dévoilé la plaque inaugurale de ce mausolée et a rappelé que des hommes de « toutes les conditions, toutes les opinions, toutes les religions, toutes les provinces et de toutes les origines », ont participé à la bataille. Et de souligner, en évoquant la mémoire des 70 000 combattants musulmans tombés à Verdun : « L’armée de Verdun, c’était l’armée du peuple, et tout le peuple y prenait sa place. C’était la France dans sa diversité ».

Le Mémorial de Verdun : Un endroit emblématique

Face à la nécropole de Douaumont, sur le site même de la bataille, le mémorial de style mauresque, d’une centaine de mètres carrés, a été édifié sur un terrain de 4 000 mètres carrés, près du carré musulman de la nécropole nationale de Douaumont. L’édifice en pierre blanche se dresse à côté de 592 tombes, couvertes de roses rouges et orientées vers la Mecque, où reposent des soldats algériens, marocains et tunisiens. A côté des stèles chrétiennes et israélites, la symbolique du lieu prend toute sa dimension. Ce site a fait l’objet d’une dépollution pour extirper les débris et autres munitions. Au total 219 munitions, allant de la grenade à main à l’obus de 210 mm ont été extraites.

Inspiré de l’art arabo-musulman, ce mémorial comprend, « au centre d’une esplanade, un dôme soutenu par des colonnes qui abrite la stèle musulmane située auparavant en face de l’ossuaire », a expliqué Hamlaoui Mekachera. Composé d’arcades et de murs crénelés, il est recouvert de pierre de Meuse, matériau employé pour l’édification de l’ensemble des bâtiments du site. Le mémorial est surmonté d’une Koubba (coupole), sous laquelle une stèle indique: «Aux soldats musulmans morts pour la France». La construction de ce monument de la mémoire a été décidée le 18 novembre 2005 par le Haut Conseil de la mémoire musulmane. Il a été financé entièrement par l’Etat, à hauteur de « 500 000 euros », selon le ministère français de la Défense.

Une reconnaissance synonyme d’espoir

« Cette reconnaissance a pris du temps, mais aujourd’hui, elle est officielle », souligne-t-on à la Mosquée de Paris. En effet, il aura fallu près de quatre-vingt dix ans pour que les tirailleurs musulmans entrent au Panthéon de la mémoire. Au début des années 20, d’anciens combattants musulmans avaient déjà demandé l’édification d’un tel bâtiment. Leurs revendications étaient restées lettre morte. Mais l’acharnement a payé. Et le ministre, Hamlaoui Meckachera, a voulu souligner par ce geste : « la réparation de l’Etat contre une injustice ». Et de rajouter : « Avec ce nouveau mémorial, la République affirme qu’elle n’oublie aucun de ses enfants tombés au champ d’honneur. A tous, elle veut exprimer le même respect, la même reconnaissance ».

Le secrétaire d’Etat aux anciens combattants a rappelé que de nombreux combattants d’Afrique, venus du Maghreb, mais aussi des pays musulmans d’Afrique sub-saharienne (Mali, Sénégal…), avaient été « authentiquement volontaires ». Hamlaoui Mekachera a insisté sur la dimension symbolique de ce monument : « Nous faisons œuvre de mémoire. Nous faisons aussi œuvre de justice. Nous regardons le passé, parce que nous savons qu’il peut éclairer le présent et l’avenir (…) ». « Cette réponse officielle donne l’espoir d’une plus grande intégration de la communauté musulmane », souligne, pour sa part, le Président du Conseil français du culte musulman. Et Hamlaoui Mekachera d’ajouter : « Alors qu’aujourd’hui, les jeunes Français (issus de l’immigration) se posent des questions sur leur identité, il est important de dire que leurs parents ont participé à la défense du pays ». Une pierre s’est ajoutée, dimanche dernier, à l’édifice de la mémoire collective…

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