C’est le plus souvent un homme âgé de 35 à 49 ans, il est pessimiste, se recrute majoritairement chez les ouvriers et les employés, trouve qu’il y a trop d’immigrés en France et vote Front National pour changer cela. L’institut d’études Ifop a publié samedi une radiographie de l’électorat du parti d’extrême droite français. Eléments d’un portrait.
Alors que les Français se demandent quel sera le potentiel électoral de Jean-Marie Le Pen aux élections présidentielles d’avril prochain, l’institut de sondage Ifop (Institut français d’opinion publique) a publié samedi une radiographie de l’électorat de son parti, le Front National (FN). L’étude est basée sur 28 enquêtes réalisées en 2006. Elle cumule un échantillon de 27 338 personnes, parmi lesquelles 1 312 se déclarent « proches » du parti d’extrême droite. La constitution de ce groupe, ainsi que ses points de vue, sont comparés à la composition du reste de la population française et à ses opinions. Il en ressort que la catégorie des ouvriers et des employés « s’enracine et se consolide » au sein des sympathisants du FN, explique Jérôme Fourquet, directeur adjoint du département opinion publique de l’Ifop.
Les premiers représentent 25% de l’électorat FN, contre 14% de la population française, et les seconds 22%, contre 18% dans le reste de la population. Une constante, depuis la naissance du FN, qui amène certains observateurs à se demander si ce parti n’est pas devenu celui « des ouvriers ». Et si ces derniers ne font pas le court trajet qui les mène de l’extrême gauche à l’extrême droite. « Cela est difficile à dire, même si certains s’en sont tirés en 2002 en disant que le parti des ouvriers est celui des abstentionnistes. Une chose est sûr, indique Jérôme Fourquet : le FN est aujourd’hui devant le bloc extrême gauche/parti communiste ».
Des frontistes aux revenus modestes et pessimistes
Ouvriers et employés voient arriver en renfort une troisième catégorie, celle des retraités (25% au FN, 23% en France). Ce qui confirme que les populations les moins possédantes sont attirées par le discours du FN. Conséquence : seuls 31% des sympathisants de ce parti déclarent vivre facilement avec leurs revenus (68% vit difficilement), contre 45% pour la population française (54% vit difficilement). A l’inverse, les cadres et professions libérales sont sous représentés dans l’électorat frontiste (2,5% contre 7% de la population), tout comme les professions intermédiaires (8% au FN contre 14% de la population).
L’une des nouveautés mise en lumière par l’étude tient dans la progression de la part des habitants des communes rurales dans l’électorat du FN (30% contre 25% en France). Ce qui signifie que l’électeur de ce parti, le plus souvent un homme, âgé de 35 à 49 ans, ne connaît pas très bien son ennemi : l’immigrant et « le jeune » issu de l’immigration qui vit dans les banlieues. Il l’aperçoit dans les JT de 13 et 20 heures, peu à son avantage, et le croise dans les villes moyennes où il fait ses courses. Guère plus. Au contraire des habitants de l’agglomération parisienne, qui composent 16% de la population française et seulement 10% des électeurs du Front. Jérôme Fourquet explique ce fait par un phénomène de « repli » des électeurs ruraux, ainsi que par un « vote préventif », comme dans certaines régions d’Alsace qui n’ont jamais connu de problèmes d’immigration ou d’insécurité.
Un tiers pour le vote des immigrés
Ainsi, ils sont 86% à estimer qu’il y a trop d’immigrés en France, contre 53% pour l’ensemble de la population. Dur, l’électeur FN n’en resterait pas moins correct. Alors que 65 % des Français estiment que « tous les étrangers résidant en France devraient avoir le droit de vote aux élections municipales », ils restent 36% à en penser autant au sein de l’électorat de Jean-Marie Le Pen. 8% accepterait que l’Etat aide « financièrement à la construction des mosquées », contre 28% dans l’étude miroir.
Plus ouvert qu’il n’y paraît sur la question de l’homosexualité, le panel frontiste marque sa différence sur la question de la peine de mort, qu’il voudrait voir rétablie à 78%, contre 38% dans le reste de la population. Autre information fournie par l’étude de l’Ifop, si l’électeur FN paraît peu impliqué dans la vie politique française, il a tendance à être assidu lors des rendez-vous électoraux.
Consulter l’étude de l’Ifop