Simon Worou, originaire du Togo, a été élu maire de Sainte-Juliette-sur-Viaur, petit village de l’Aveyron de 577 habitants, dans le sud de la France. Ils sont rares les maires d’origine africaine en France.
Le maire de Sainte-Juliette-sur-Viaur, Simon Worou, est né à Lomé, capitale du Togo, où il a grandi. « On était une génération sans perspective. On avait soif de connaître autre chose », affirme Simon pour expliquer son départ. Il voulait « faire curé » à l’époque avant d’intégrer l’armée française qui recrutait dans son pays d’origine. Naturalisé français depuis 11 ans, il a été élu maire avec 62% des voix au premier tour des dernières élections municipales.
« Je ne me lève pas le matin en me disant que j’ai des origines, non, je me lève le matin en me disant que je suis maire de Sainte-Juliette. C’est mon pacte avec ce village que j’aime beaucoup », déclare-t-il avec un accent du sud de la France. Il poursuit : « dans toute les fêtes de village, je ne suis pas Simon le Noir, je suis Simon ».
« Des électeurs du FN viennent boire une bière à la maison, ça ne me dérange pas »
Simon Worou a parfois été victime de racisme quand il est arrivé dans ce petit village : « quand l’image est positive de soi, la réception, elle, est positive », explique ce maire nouvellement élu. « Des électeurs du FN viennent boire une bière à la maison, ça ne me dérange pas. J’aime l’humain. Beaucoup. Quels que soient ses a priori, ses appartenances », ajoute-t-il encore.
Ses adjoints ont ainsi hésité avant de le mettre tête de liste dans la ville de Sainte-Juliette, à cause de ses origines africaines. « Sur le monde rural, ça pouvait être un peu rédhibitoire, par rapport à certaines personnes. Et puis, on s’est dit que non. L’homme le plus puissant du monde, il est noir. On a dit pourquoi pas Sainte Juliette », déclare le premier adjoint au maire, Alain Pomié.
Je l’ai « senti un peu dans le boulot »
« On est Aveyronnais mais on est ouvert », déclare un habitant du village. « Il est du coin, maintenant ! Il est marié à une dame d’ici, habite une ancienne grange retapée, son fils va à l’école communale. Qu’est-ce que vous voulez, il ne faut pas être raciste ! Il faut tenter. Il est bien gentil, assez jovial et quand il a fait le tour de toutes les maisons, moi je l’ai trouvé bien », indique, à l’AFP, une ancienne agricultrice de 80 ans.
Je l’ai « senti un peu dans le boulot », explique Simon au sujet du racisme, quand il est passé d’un travail à l’abattoir à portier dans un bowling, avant maintenant de gérer une équipe chargée de la propreté à la mairie de Rodez, une ville voisine. Son intégration s’est aussi faite par le sport. Son entraîneur de rugby à Rodez raconte pourtant les « coups durs » qu’il a pu connaître sur le terrain à ses débuts : « les supporteurs lui lançaient des « rasta », « mange ta banane », « oh le nègre » ».
« J’ai été épaté de l’accueil »
Quand il rencontre les grands-parents de sa femme en 1997, dans ce petit village du sud-ouest, ils n’avaient encore jamais vu de Noir :« je faisais mes études de sous-officier dans l’armée de l’Air française, à Rochefort, (en Charente-Maritime) et j’étais invité chez les parents de ma (future) femme. Ses grands-parents n’avaient jamais vu un black de leur vie… Puis mon beau-père, un agriculteur très ouvert, m’a demandé d’aller jouer au rugby dans le village voisin de Cassagnes-Bégonhès. Et j’ai été épaté de l’accueil, adopté ».
Simon Worou a ainsi obtenu 222 voix sur 357 aux dernières élections municipales et a été élu maire sans étiquette, au premier tour, dans la ville de Sainte-Juliette.
Voir le reportage de France 2 sur l’élection de Simon Worou