Femmes, maris et enfants étaient réunis à Paris, samedi 7 novembre, pour dénoncer les violences subies par les femmes guinéennes lors du rassemblement du 28 septembre à Conakry, en Guinée. Elles entendaient montrer leur soutien aux victimes et dire qu’elles attendent que justice leur soient rendues.
« Quitte le pouvoir, quitte le pouvoir ! Je te dis quitte le pouvoir !» Place Victor Hugo à Paris, la chanson de l’ivoirien Tiken Jah Fakoly résonne en ce début d’après-midi. Comme un pied de nez à Dadis Camara et à sa junte militaire suspectés d’être responsables des violences et des viols collectifs durant la journée du 28 septembre, à Conakry. Bilan : plus de 157 tués et 1200 blessés. Un chiffre qui pourrait s’avérer plus élevé encore. Pour rappeler ces événements tragiques, le 16e arrondissement de la capitale française accueille des centaines de personnes venues crier leur colère. Seulement, cette fois, à l’appel des femmes des forces vives, ce sont les dames – et pas seulement des Guinéennes – qui battent le pavé en tête de cortège.
“Je suis Iranienne et je comprends la douleur de ces femmes”, explique Zohreh, 52 ans, reprographe. “Dans mon pays, c’est pareil, des femmes sont violées, arrêtées, maltraitées. Quelque soit leur nationalité, les femmes doivent se soutenir.” Malgré un temps capricieux, plus de 400 personnes s’amassent sur la petite place pour marcher jusqu’au Trocadéro. Présentes parmi les anonymes, Aïcha Diallo, ancienne ministre de l’éducation et Assiatou Bah Diallo, rédactrice en chef d’Amina.
Des femmes en tête de cortège
Aux slogans “à bas Dadis!”, “à bas les violeurs!” et “Dadis assassin!”, les femmes avancent dans les rues du quartier huppé. La plupart d’entre elles sont vêtues d’un pagne blanc tacheté de rouge, symbole des violences subies par leurs sœurs. Quelques pancartes et banderoles sont également là pour expliquer aux passants qui s’arrêtent volontiers pourquoi elles manifestent. Sur l’une d’elles, on peut lire : « Le patriotisme commence par le respect du peuple et des valeurs républicaines ». Ce n’est pas dans les habitudes de ces Africaines de manifester. D’ailleurs, selon l’une d’elles, c’est même la première fois qu’elles organisent une marche à Paris. Derrière elles, des hommes, frères, maris, amis, oncles, pères sont venus les soutenir.
“Je manifeste contre l’oppression qu’il y a chez moi,” explique Alassane, 25 ans, réfugié politique. Celui-ci porte la déclaration universelle des droits de l’homme, imprimée sur fond de drapeau guinéen. “J’ai été personnellement touché par ses violences car deux filles de mon quartier ont été violées. Elles sont devenues folles. On est aussi sans nouvelle de mon frère depuis le 28 septembre. Lui aussi s’était rendu au stade.” Pour Hassatou Baldé, membre de l’Initiative de Bruxelles pour le Changement en Guinée, il faut que justice soit faite. “Nous sommes là pour montrer notre détermination face au CNDD (conseil national pour la démocratie et le développement), nous n’accepterons aucune impunité”, assure la jeune femme.
En Guinée, un calme précaire s’est installé depuis les événements. Pourtant, beaucoup de manifestants s’inquiètent encore du sort de leurs compatriotes. “Il y a toujours des assassinats ciblés en Guinée et les disparitions continuent, il ne faut pas l’oublier”, affirme la journaliste Assiatou Bah Diallo. Pour l’heure, les espoirs se tournent vers Ouagadougou où le médiateur et président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, a commencé à travailler pour une amélioration de la situation en Guinée.