France-Algérie : la diplomatie l’emporte sur les ambitions politiques


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Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune
Les Présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune

Après huit mois de tensions diplomatiques, un apaisement se dessine avec la préparation d’une visite du ministre français des Affaires étrangères en Algérie. Alors que le président Tebboune a tendu la main à Emmanuel Macron, les interventions du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau sont de plus en plus contestées, tant pour leur approche que pour leurs motivations.

Après des mois de tensions et de crispations politiques entre Paris et Alger, un tournant semble se dessiner dans la gestion des relations franco-algériennes. Les dernières déclarations du président algérien Abdelmadjid Tebboune, qui a appelé à un retour au dialogue avec Emmanuel Macron, tranchent avec la surenchère de certains responsables français, à commencer par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau. Ce dernier, en pleine polémique sur les affaires d’OQTF et d’influenceurs, se trouve de plus en plus isolé alors que la diplomatie tente de reprendre la main.

Une visite diplomatique en préparation

Selon les informations de TSA, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, prépare actuellement une visite à Alger. Bien que la date exacte reste confidentielle, les sources cités par nos confrères confirment que les préparatifs vont bon train. Cette initiative marque un pas vers l’apaisement après huit mois de crise. Pour le président algérien, cette visite représente un pas nécessaire vers une normalisation des relations, d’autant que Tebboune a clairement désigné Macron et Barrot comme ses interlocuteurs légitimes.

Le président Tebboune a lui-même déclaré le 22 mars : « Nous gardons comme unique point, le président Emmanuel Macron. Nous travaillons ensemble. Il y a eu, c’est vrai, un moment d’incompréhension, mais il reste le Président de la République française. Personnellement, tous les problèmes doivent se régler avec lui, ou avec la personne qu’il délègue, à juste titre, en l’occurrence le ministre des Affaires étrangères. »

Retailleau sur la sellette

Ce retour à la raison diplomatique marque un revers pour Bruno Retailleau, contesté pour sa gestion de l’affaire Sansal et son approche martiale des relations avec l’Algérie. Accusé de faire de la crise algérienne un tremplin électoral en vue de 2027, Retailleau est critiqué pour ses immixtions dans les dossiers diplomatiques. Emmanuel Macron n’a pas hésité à le recadrer en affirmant que « l’accord de 1968, c’est le président de la République » et en rappelant que la politique étrangère est du ressort du Quai d’Orsay et non de l’Intérieur.

Le député Manuel Bompard (LFI) a publiquement accusé Retailleau d’instrumentaliser l’affaire Sansal pour servir ses ambitions personnelles, soulignant que « Retailleau n’en a rien à faire de la libération de Boualem Sansal ».

Vers une reprise en main de la diplomatie

L’éventuelle venue de Jean-Noël Barrot à Alger pourrait marquer une reprise en main de la diplomatie par l’exécutif français, éloignant la relation franco-algérienne des querelles politiciennes. Cette initiative serait perçue comme un signal fort adressé à l’Algérie, soulignant la volonté de Paris de renouer avec une approche plus équilibrée et respectueuse.

Yazid Sabeg, ancien commissaire à la diversité, a d’ailleurs appelé la France à faire preuve d’intelligence historique en reconnaissant les crimes commis durant la colonisation. « La France a toujours refusé de regarder en face ce qu’elle a commis en Algérie », a-t-il affirmé. Pour lui, l’apaisement passe par la reconnaissance des crimes de guerre, seul moyen de transformer cette relation conflictuelle en une alliance d’avenir.

La dynamique actuelle démontre que la volonté de pacification l’emporte sur les tentations de surenchère politique. L’isolement progressif de Retailleau pourrait ouvrir la voie à un rééquilibrage de la diplomatie française vers une gestion des relations fondée sur le dialogue et le respect mutuel, répondant ainsi à l’appel du président Tebboune à sortir de la spirale des tensions.

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