Nouvelle tentative de paix. Les dirigeants somaliens ont rencontré lundi, sous l’égide de l’ONU, une délégation de l’opposition. Le premier ministre du Gouvernement fédéral de transition (GFT) et des chefs de l’Agence pour la re-libération de la Somalie (ARS) sont parvenus à un accord pour un cessez-le-feu, une intervention internationale et un retrait des troupes éthiopiennes. Cette décision ne fait pas l’unanimité au sein de l’opposition.
Un accord de plus a été signé, lundi, entre le Gouvernement fédéral de transition et la coalition d’opposition de Somalie. Les deux délégations étaient réunies à Djibouti, sur une initiative onusienne. A la mi-journée l’échec des tractations a officiellement été annoncé, mais les négociations ont pu reprendre et, dans la soirée, le premier ministre de transition Nur Hassan Hussein et Sheikh Sharif Cheikh Ahmed de l’ARS sont finalement tombés d’accord. L’opposant Sharif Hassan Aden, ancien président du Parlement, a pris part à la signature du texte.
Cet accord prévoit un cessez-le-feu effectif sous 30 jours, pour une période de 90 jours renouvelables. Il sera assorti d’un déploiement dans les 120 jours d’une force internationale de stabilisation gérée par l’ONU. Celle-ci sera composée de pays « amis » de la Somalie, mais non frontaliers, afin d’exclure l’Ethiopie. L’exigence de l’opposition, en contrepartie, est justement le retrait des troupes éthiopiennes, qui soutiennent le gouvernement provisoire dans sa lutte contre la guérilla islamiste. L’ARS s’est engagée à prendre ses distances avec tout groupe armé ou tout individu qui se positionnerait contre cet accord de paix.
C’est la première fois ces derniers mois que les deux délégations acceptaient de s’entendre sur un traité, en y réfléchissant conjointement. Lors des dernières tractations, les débats avaient eu lieu séparément, les dirigeants du pays et ceux de l’opposition refusant de se rencontrer. Cet accord naît donc sous de bons auspices et pourrait représenter une véritable avancée vers la paix.
Un accord fragile
Pourtant, l’opposition elle-même est très divisée sur la question et l’un des dirigeants de l’ARS, absent lors de la signature, a d’emblée rejeté cet accord. Cheikh Hassan Dahir Aweys, partisan de la « ligne dure » de l’Agence, s’est exprimé mardi en dénigrant l’accord de Djibouti. Hostile à toute présence étrangère sur le sol somalien, il a par ailleurs appelé à continuer la Guerre Sainte contre l’Ethiopie. Il ne croit pas au retrait des forces éthiopiennes prévu par le traité, puisqu’aucun calendrier n’a été fixé. Leur présence, depuis 2006, cristallise le principal point d’achoppement des négociations. L’opposition les considère comme une force d’occupation depuis le revers imposé, début 2007, aux Tribunaux islamiques qui contrôlaient le pays.
Cet accord semble, de plus, avoir été « arraché » par le représentant spécial de l’ONU pour la Somalie, Amehdou Ould Abdallah. L’ARS est composée de plusieurs factions rebelles modérées pour certaines, radicales pour d’autres, qui n’ont pas toutes pris part aux pourparlers. Cette mosaïque d’opinions rend difficile un consensus sur la position à adopter. Le 16 mai dernier déjà, un appel commun avait été formulé par les participants aux tractations afin d’engager une action immédiate de l’aide humanitaire. La population somalienne, très éprouvée, était à bout de souffle. Le lendemain de cette requête solennelle, le responsable d’une ONG humanitaire somalienne avait été assassiné par des islamistes présumés. Ainsi, la bonne volonté et la collaboration entre gouvernement et opposition n’entraînent pas nécessairement l’assentiment de toutes les forces en jeux. Dimanche 8 juin, à la veille du sommet de Djibouti, le président en exercice du Parlement de transition a été brutalement assassiné par les membres d’une milice islamiste. Ce week-end encore, 28 morts ont été dénombrés à Mogadiscio, victimes d’affrontements entre force somalo-éthiopiennes et milices islamistes.
Un processus de paix interminable
Depuis la chute du dictateur Siad Barré en 1991, les nombreuses tentatives pour ramener la paix en Somalie ont été vaines. Les successeurs du despote se sont retournés les uns contre les autres. Depuis 17 ans, le pays est ravagé par la guerre civile et compte au moins 1 million de réfugiés, pour une population de 7 millions d’habitants. Les troubles engendrés par l’escalade de la violence ont déjà fait plus de 300 000 morts à travers la Somalie. La crise humanitaire qui ne cesse de prendre de l’ampleur menace de devenir la plus grave et la plus importante du continent africain. Une série d’accords humanitaires signés l’an dernier à Mogadiscio sont restés lettre morte, et la Force de Paix Africaine déployée dans la région, avec 2 200 soldats, n’a pas su calmer les tensions.
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